La première affaire Katumbi est encore en cours. Poursuivi par le parquet près la cour d’appel de Lubumbashi pour atteinte à la sûreté de l’Etat, l’ancien gouverneur de l’ex. province du Katanga avait obtenu une permission du ministère public pour se rendre en Afrique du Sud poursuivre les soins requis par son état de santé. Une santé altérée par le procès mouvementé ouvert à Lubumbashi en mai dernier : vendredi 12 mai, Moïse Katumbi comparaissait pour la troisième fois, prenant soin chaque fois de s’entourer d’une meute de ses supporters du TP Mazembe, que les forces de l’ordre se chargeaient, chaque fois aussi, de disperser pour laisser les juges travailler dans la quiétude. Au finish, le chairman de Lubumbashi a été formellement inculpé, et s’est fait porter malade aussitôt. Il aurait été incommodé par les gaz lacrymogènes lancés pour disperser ses suiveurs, avait-on appris. Incommodé plus que quiconque, parce que l’opinion n’a jamais eu vent d’une quelconque autre victime des mêmes gaz lacrymogènes, quand bien même tout le monde sait que pour se présenter à l’instruction, Moïse Katumbi était flanqué de sa cour composée de leaders politiques du G7 et d’autres partis politiques qui avaient effectué le déplacement de Lubumbashi à l’occasion.
Maladie politique ?
De l’Afrique du Sud, l’ancien gouverneur de l’ex. province du Katanga s’est rendu en Europe, en Angleterre et en Belgique, avaient annoncé ses proches. L’opinion était sans nouvelles de l’évolution de son état de santé (pas de nouvelles bonnes nouvelles ?) depuis plusieurs semaines lorsque survient la nouvelle affaire Katumbi. Elle l’oppose au Tribunal de paix de Lubumbashi/Kamalondo à un sujet grec, Alexandros Stoupis, qui lui réclame la restitution d’un immeuble qu’il a acquis par héritage de sa mère, Mme Vosnakis.
La nouvelle affaire Katumbi semble bien complexe, en réalité. Il y a, comme on dit, à boire et à manger. Il est ainsi signalé que l’immeuble querellé aurait été acquis par Raphaël Katebe Katoto, le richissime demi-frère de Moïse Katumbi, en 1998, en le rachetant à Mme Vosnakis. D’autres sources renseignent qu’il s’agit d’un immeuble que la Sonas avait déclaré bien sans maître au milieu des années ’70, qui aurait été racheté par Katebe qui l’aurait par la suite revendu à Moïse Katumbi. Dans l’un et l’autre cas, la nouvelle affaire Katumbi s’inscrit dans le large et nébuleux contexte d’acquisitions de biens immobiliers plus ou moins abandonnés par les colons à l’accession de la RD Congo à l’indépendance en 1960. A Lubumbashi comme dans la plupart des villes du jeune Etat rd congolais, les troubles qui ont entouré l’accession du pays à la souveraineté nationale et internationale ont entraîné la perte de documents parcellaires et autres. A Lubumbashi particulièrement, tout le monde en sait quelque chose, comme cette acquisition bruyante par Me Muyambo de la concession dite du Camp PM non loin de l’université de la Kassapa. Elle avait appartenu à un expatrié et a, un peu miraculeusement aux yeux de l’opinion lushoise, échu entre les mains du puissant bâtonnier de Lubumbashi, également cité dans plusieurs dossiers analogues. C’est du reste l’une de ses affaires troublantes, qui l’oppose au même sieur Alexandros Stoupis, qui vaut à Me Muyambo de végéter derrière les barreaux de la prison à Kinshasa.
Acquisitions immobilières douteuses
Manifestement, Moïse Katumbi s’est empêtré dans une affaire analogue, en acquérant un bien immeuble litigieux, comme beaucoup d’autres personnes l’ont fait à travers la RD Congo. S’il n’y a peut-être pas lieu de le lui reprocher outre mesure, il n’y a pas non plus de raison d’en féliciter le candidat à la magistrature suprême. Les raccourcis empruntés pour se hisser au sommet de la bourgeoisie locale et nationale sont, cela est clair, de moralité douteuse. Dans cette affaire, Moïse Katumbi est tout sauf saint.
Mardi 21 juin 2016, le tribunal de paix de Lubumbashi-Kamalondo a condamné par défaut l’ancien gouverneur de l’ex. province du Katanga à 36 mois de prison, soit 3 ans. En soins médicaux à Londres, selon ses proches, Moïse Katumbi n’a pas pu se présenter au procès. La nouvelle affaire Katumbi fait, on pouvait s’y attendre, couler énormément d’encre. Acteurs politiques, ong et médias de l’obédience du richissime président du TP Mazembe ont tôt fait de crier au complot politique. Parce que l’accusé était dans l’incapacité de se rendre au procès, arguent-ils. Mais derrière cet argument, il y a aussi à boire et à manger, comme on dit, encore. Dans cette affaire où certains ont la liberté de parole et d’autres sont liés par le serment et les exigences déontologiques de leurs professions, l’équité n’est pas de mise. Si les avocats et les partisans de Katumbi peuvent crier sur tous les toits, il, n’en va pas de même pour les juges, qui sont astreint à la stricte discrétion sur le secret de leurs délibérations. Ainsi, nul ne sait encore aujourd’hui si l’accusé avait le droit de ne pas se rendre au tribunal. La permission de se rendre aux soins obtenue par Moïse Katumbi en mai dernier était assortie de sérieuses restrictions : le lieu des soins était indiqué, l’Afrique du Sud ; autant que le comportement de l’inculpé qui est astreint à la plus grande discrétion au sujet du procès en cours à la cour d’appel de Lubumbashi. Lorsque les avocats et les partisans du chairman du TP Mazembe avancent que son absence au tribunal était justifiée, ils s’abstiennent de fournir les preuves de l’état de santé de leur client, aussi bien que du droit qu’il aurait obtenu de se rendre à Londres après l’Afrique du Sud. Sur ce plan du droit aussi, rien n’indique que Katumbi soit aussi saint que le prétendent ses partisans.
J.N.