Les alertes lancées, principalement par les comparses de l’ex. Gouv’ de l’ex. Katanga se seront lamentablement révélées. Fausses. Lundi 9 mai 2016, il n’a jamais été question d’arrêter Moïse Katumbi, mais seulement de l’auditionner sur les soupçons, plutôt lourds, qui pèsent sur sa personne et celles de certains de ses proches. La procédure a duré 8 heures, mais ne s’est pas terminée. Le chairman du TP Mazembe doit retourner devant les enquêteurs mercredi 11 mai, selon des sources judiciaires à Lubumbashi, confirmées par un tweet de son épouse, Carine Katumbi.
L’ancien gouverneur de l’ex. province du Katanga, Moïse Katumbi Chapwe, a le feu aux trousses, au propre comme au figuré. L’homme semble en avoir tellement fait et présumé de ses moyens de narguer durablement les institutions judiciaires de l’Etat rd congolais. Depuis mercredi 4 mai dernier, le ‘chairman’ du TP Mazembe figurait en bonne place parmi les personnalités devant faire l’objet d’investigations judiciaires diligentées par l’office du Procureur Général de la République sur injonction du Ministre de la justice, Alexis Thambwe Mwamba. Katumbi et quelques comparses congolais et étrangers devaient s’expliquer sur le séjour jugé irrégulier et suspect dans l’ex. province du Katanga d’un nombre anormalement élevé d’anciens militaires Américains et Sud-africains à son invitation ou celle d’une agence de sécurité privée proche de lui, Pomba One Security. En deux mots comme en mille, de sérieux soupçons de recrutement et de formation de mercenaires pèsent sur l’ancien patron du PPRD Katanga qui, après être passé à l’opposition il y a quelques mois, avait menacé de plonger la RDC dans « un chaos indescriptible » si Joseph Kabila ne quittait pas le pouvoir avant la fin de l’année.
Invitation à comparaître dramatisée
Dès vendredi dernier, le Procureur général près la cour d’Appel de Lubumbashi avait adressé une invitation à comparaître à Moïse Katumbi, qui décida d’éconduire sans ménagements l’huissier de justice porteur du mandat de comparution avant de se lancer à corps perdu dans une tentative désespérée de convertir l’exploit judiciaire en saga politicienne. La veille déjà, alors qu’aucune initiative n’avait encore été prise par le parquet, le monde entier était alerté par Monsieur Katumbi et certains de ses collaborateurs que sa résidence à Lubumbashi était encerclée et que des éléments lourdement armés des forces de sécurité à bord de deux véhicules de transport de troupes étaient venus se saisir de sa personne sans aucune forme de procédure. La dénonciation s’est révélée fausse. Parce que située sur deux avenues, la résidence de Moïse Katumbi n’est pas encerclable. Surtout pas par deux véhicules seulement.
Le bluff de l’encerclement a pourtant failli marcher. A la demande de la victime supposée, un détachement de la police de Mission des Nations-Unies (Monusco) sera rapidement déployée sur les lieux pour « protéger » le richissime ancien gouverneur par un commandant aussi complaisant que naïf qui s’était laissé ainsi manipuler été dépêchée. Tout le long du week-end, une certaine presse acquise à Moïse Katumbi a entretenu le suspens sur la « menace » physique qui pesait sur l’homme qui s’était empressé, aussitôt après la demande d’enquête du Garde des Sceaux congolais, d’annoncer… sa candidature à l’élection présidentielle dont personne ne connaît les tenants et les aboutissants, la Commission électorale étant encore occupée à compléter le fichier des électeurs.
Subterfuges pour se soustraire de la justice
De fait, Moïse tentait de la sorte de faire diversion et se protéger par ce subterfuge de la justice de son pays. Selon les informations obtenues de sources sûres à Kinshasa, le Commandant local de la police de la Monusco responsable de la décision d’envoi de casques bleus à la résidence Katumbi a été relevé de ses fonctions pour avoir « réagi avec précipitation en se basant sur des fausses rumeurs ». Mieux, de New York au siège des Nations-Unies, le porte-parole du Secrétaire Général des Nations-Unies, Stéphane Dujarric, a indiqué samedi à la presse qui lui posait la question de savoir si la mission onusienne avait mis fin aux poursuites des autorités congolaises contre l’homme d’affaires katangais que « La Monusco n’a pas le mandat de pourvoir à la protection rapprochée des leaders politiques ».
Ne s’avouant pas vaincu pour autant, Moïse Katumbi se tournera dimanche 8 mai vers la Belgique, ancienne puissance coloniale à laquelle de mauvaises langues disent qu’il a rendu « de très bons services » pendant son long mandat à la tête de la plus riche province de la RDC pour réclamer une sorte de retour d’ascenseur. Il se rendra personnellement au consulat du Royaume à Lubumbashi, où, selon la presse Belge, il a carrément sollicité l’asile politique, espérant recevoir le traitement réservé au lanceur d’alerte Assange par l’Ambassade de la l’Equateur à Londres et échapper ainsi aux investigations judiciaires. Mais là aussi, choux blanc : contacté par le Consul, le Libéral Didier Reynders, chef de la diplomatie belge, après des entretiens téléphoniques respectivement avec Moïse Katumbi et le Premier ministre congolais Matata Ponyo à Kinshasa depuis Jérusalem (Israël) où il était en mission, opposera une fin de non-recevoir courtoise mais ferme à l’hébergement au consulat belge d’un homme poursuivi régulièrement par la justice de son pays. Il pria M. Katumbi de retourner chez lui. Simplement.
L’ex. gouverneur du Katanga semble donc s’être mis dans de biens sales draps en suivant les conseils de la noria de courtisans qui lui avaient promis un traitement « spécial » du fait de sa célébrité.
Candidature à la présidence pour s’immuniser
Sa stratégie pour échapper aux poursuites judiciaires avait été lancée dès jeudi 4 mai 2016, lorsque trois heures à peine après le point de presse annonçant l’injonction faite au PGR par le ministre de la justice, il s’empressait d’annoncer avec force publicité sa décision d’accepter d’être le candidat de quelques partis assez peu représentatifs de l’opposition à la prochaine présidentielle alors que quelques jours auparavant il faisait état de sa volonté d’attendre des ralliements plus significatifs avant de se prononcer. Plusieurs observateurs, à Kinshasa et à travers le monde, ont flairé l’astuce. L’ancien gouverneur tentait tout simplement de se mettre dans la peau d’un candidat président de la République, dans l’espoir d’être en quelque sorte « immunisé » avant l’heure, compte-tenu du moment qu’il a choisi pour annoncer sa candidatures à une élection dont ni le corps électoral, ni le calendrier ne sont même pas encore connus. C’est donc pour se mettre hors du champ des poursuites pénales qui pesaient sur lui que Moïse Katumbi aura pris une décision aussi précipitée et lourde de conséquences pour la cohésion d’une opposition qu’il affirmait quelques jours seulement plus tôt vouloir fédérer. Sa sortie opportunistes n’a du reste pas tardé à susciter l’ire de leaders politiques de l’opposition comme l’UNC Vital Kamerhe, ou encore l’UDPS Félix Tshisekedi avec lesquels il avait laborieusement entrepris de se rapprocher et qui ne décolèrent pas face à cette annonce que tous jugent « prématurée ».
Kamitatu, Kalombo : mensonges sur le net
S’inscrivent également dans la stratégie de contrer la procédure judiciaire à son encontre, les scénarios montés pour se présenter à l’office du procureur général, lundi 9 mai 2016. C’est le G7 Olivier Kamitatu Etsu qui est monté au créneau pour donner le ton sur son compte Tweeter dès les premières heures de la journée, à 10 heures 7’. « Des arrestations ont commencé parmi lesquelles Robot, le danseur de Mazembe ». Un peu comme si, malgré sa disposition à se rendre chez le juge, Moïse Katumbi était malgré tout persécuté et malmené par les forces de sécurité aux ordres du pouvoir à Lubumbashi. Quelques minutes après, c’est l’ex. PPRD Françis Kalombo qui prenait le relais en annonçant sur son site Tweeter, lui aussi, « Moïse Katumbi jeté à l’arrière d’une voiture pour une destination inconnue ». Et Olivier Kamitatu de poster une sorte de conclusion politisée à souhait : « Procès de la honte : les juges se déclareraient incompétents pour envoyer Moïse Katumbi et le dossier à la Haute Cour Militaire à Kinshasa ».
En fait, des sources concordantes l’ont renseigné tout le long de la journée du lundi 9 mai : pour répondre à l’invitation du Parquet de Lubumbashi, l’ex. gouverneur du Katanga avait choisi de se donner en spectacle et de provoquer les magistrats instructeurs en défiant le caractère secret d’une instruction pré juridictionnelle en droit positif congolais en se faisant accompagner par une foule de quelques 400 « sympathisants », parmi lesquels le danseur de Mazembe auquel fait allusion le tweet d’Olivier Kamitatu. Une énième astuce pour contourner la procédure, selon un juriste interrogé par Le Maximum, qui confirme le caractère non public que cette étape de la procédure. Moïse Katumbi, dûment informé par la batterie d’excellents avocats dont il s’est entouré savait donc bien que ce lundi à Lubumbashi, ce n’est pas son procès qui s’ouvrait mais une première comparution au cours de laquelle il devait simplement répondre aux questions des enquêteurs avant la fixation éventuelle de l’affaire devant le tribunal compétent.
Quoiqu’il en soit, il n’est pas certain que Moïse Katumbi s’en tire grâce aux stratagèmes cousus de fil blanc concoctés jusqu’à présent par des affidés amateuristes qui tentent de bénéficier de sa légendaire « générosité », assure un professeur de procédure pénale à l’Université de Lubumbashi sous anonymat. L’ex. gouverneur du Katanga devant non seulement expliquer les mensonges de Darryl Lewis, le sujet Américain arrêté au cours de la manifestation du 24 avril dernier, qui a menti sur sa qualité d’ancien de la marine US avant de l’avouer devant avocats et représentants de son ambassade à Kinshasa. Mais aussi sur la destination d’une demi-douzaine d’autres sujets américains, invités par les soins de Moïse Katumbi ou des proches, mais dont les traces de sortie du pays sont introuvables.
J.N.