La femme qui avait décrété, il y a 6 ans, que Kinshasa était la capitale mondiale du viol, est revenue sur les lieux des crimes. Margot Wallström a séjourné à Kinshasa du 3 au 4 mars 2016. Cette fois-ci en qualité de ministre suédoise des affaires étrangères. Au cours de cette visite qui intervenait à la veille de la commémoration de la journée internationale dédiée à la lutte pour les droits de la femme (8 mars), Margot Wallström a rencontré des associations de femmes pour évoquer la politique féministe suédoise en la matière. Mais elle a aussi expliqué sa nouvelle croisade en RD Congo : la Suède milite pour le respect des échéances constitutionnelles en RD Congo, a-t-elle affirmé. « La Suède souhaite que le Congo soit un exemple d’alternance politique apaisée pour le reste de la région d’Afrique centrale », a-t-elle indiqué. Évoquant le procès et la condamnation par la Cour d’appel de Goma (Nord-Kivu) des jeunes activistes du Mouvement pro-démocratie Lucha, elle a simplement jugé inacceptable que « la jeunesse soit privée de moyens d’expression » (Il s’agit de moyens de s’opposer au pouvoir, en fait. Parce que de moyens d’expression pour les jeunes, il en existe en RD Congo, qui ne posent aucun problème à personne). Pour elle, l’organisation des élections cette année en RDC est une opportunité de mobiliser la jeunesse autour d’un processus inclusif en faveur de la démocratie et de l’État de droit. Des lois de la République que ces jeunes réfractaires à toute législation relative aux droits associatifs en RD Congo, Margot Wallström n’a fait aucun cas, préférant tout mettre dans le même sac des valeurs civilisatrices à inculquer aux africains, sans doute.
Dans tous les cas, il semble évident que lorsqu’elle va en croisade en RD Congo, Margot Wallström, défenseur des femmes violées ou ministre des Affaires étrangères de la Suède, vient dispenser des leçopns et administrer des remontrances. En avril 2010, alors envoyée spéciale de l’ONU pour les violences faites aux femmes et aux enfants dans les conflits, Margot Wallström avait échangé avec des victimes de viol à Bukavu, à l’est de la République Démocratique du Congo, région où des groupes armés locaux et étrangers sévissent depuis plus de 20 ans.
Après ce séjour, devant le Conseil de sécurité de l’ONU, elle avait carrément qualifié la RD Congo de « capitale mondiale du viol », sans tenir compte ni faire la moindre allusion aux causes profondes des viols, qui restent liées aux affrontements armés récurrents dans lesquels la responsabilité des pays occidentaux est lourdement engagée. Du haut de la tribune des Nations-Unies, l’occasion était belle pour rapporter au monde qu’en RD Congo « Les femmes n’y sont toujours pas en sécurité, sous leur propres toits, dans leurs propres lits, lorsque la nuit vient », déplorant l’impunité et appelant le Conseil à agir.
Les progrès de la RD Congo
Face à la presse à Kinshasa, le 4 mars 2016, la chef de la diplomatie suédoise s’est rétractée : « Ce n’était pas mon expression. (…) J’ai cité quelqu’un qui a appelé la RDC la ‘capitale mondiale du viol’». Expliquant ses nouvelles convictions, elle a déclaré qu’elle croyait «… que les FARDC (armée congolaise, dont des militaires sont accusés de viol) ont fait beaucoup de ménage dans leurs rangs, a-t-elle précisé. Je crois que l’impunité n’est pas partout, quelques personnes ont été poursuivies, et aussi punies. (…) Des choses ont avancé dans la bonne direction mais (…) il reste encore beaucoup à faire. » C’est qu’entretemps, Madame est devenue ministre des affaires étrangères et a changé de fusil d’épaule. Son dada aujourd’hui, c’est l’alternance politique. Rien d’autre. Même si Margot Wallström ne dit pas clairement ce qui se cache derrière l’expression alternance politique qui, chez les acteurs politiques de l’opposition, équivaut à leur accession au pouvoir en remplacement de la Majorité actuelle. De la possibilité qui existe, de voir la majorité au pouvoir se succéder à elle-même sans pour autant énerver la constitution et les lois de la République, aucune allusion de la part de la ministre Suédoise des affaires étrangères et de ses amis de l’opposition.
J.N.