L’article 3 de la Loi n° 07/008 du 04 décembre 2007 portant statut de l’opposition politique en République Démocratique du Congo dispose que « Les partis politiques et les regroupements politiques dans les assemblées délibérantes font une déclaration d’appartenance à la majorité ou à l’Opposition politique, auprès des bureaux respectifs de l’Assemblée nationale, du Sénat, de l’Assemblée provinciale, des conseils de ville, municipal, de secteur ou de chefferie », tandis que l’article 4 précise : « Est réputé avoir renoncé au statut de l’opposition politique, le parti politique ou le regroupement politique qui accepte de partager les responsabilités de l’Exécutif aux niveaux national, provincial, urbain, municipal ou local ». En se portant candidats au poste de gouverneur et de vice-gouverneur de province soit au nom de leurs partis ou de leurs regroupements politiques, soit en tant qu’indépendants, les opposants vont-ils renoncer à leur statut ? Terrible est l’épreuve…
La date fixée par la Céni pour l’élection des gouverneurs et vice-gouverneurs de province est connue : c’est le 26 mars 2016. Les listes des candidatures réceptionnées, traitées et retenues par la Centrale électorale comprenait 135 dossiers dont 76 seulement ont été jugées recevables.
Depuis, c’est le branle-bas de combat dans les états-majors des partis et regroupements politiques, relayés par les ONGDH. Au travers des médias, les réactions vont dans tous les sens : «La Céni est pointée du doigt par l’opposition» (Rfi), «Mwenze Kongolo appelle la Ceni à surseoir à l’élection des gouverneurs», «RDC : le Collectif de 33 ONG accuse la Ceni d’hypothéquer son indépendance» et «Onésime Kukatula : La Ceni a obéi aux injonctions des textes légaux et non de la majorité» (Radio Okapi), «Election des gouverneurs : la Céni s’est discréditée» (Le Potentiel), «Candidatures irrecevables : la CENI accorde deux jours de recours» (L’Avenir), «Election des Gouverneurs : la CENI renvoie les candidats contestataires devant les Cours d’Appel !» (La Prospérité), etc.
Absence remarquée et remarquable : le «Front citoyen 2016». Depuis le 16 février 2016, cette organisation politico-civile est comme interdite d’antenne et de colonne.
Qu’à cela ne tienne !
Le prix de l’honneur ou du déshonneur
Au-delà du débat sur la légalité ou non de la validation et l’invalidation des candidatures, un sujet est sciemment entouré de mutisme, exprès : le sort des candidats de l’opposition qui seront élus gouverneurs de province.
Tous le savent, pourtant, la Loi n° 07/008 du 04 décembre 2007 portant statut de l’opposition politique en RDCongo renferme des dispositions qui poseront un sérieux problème aux candidats de l’opposition à l’élection des gouverneurs et cie. L’article 4 de cette loi dispose que : «Est réputé avoir renoncé au statut de l’opposition politique, le parti politique ou le regroupement politique qui accepte de partager les responsabilités de l’Exécutif aux niveaux national, provincial, urbain, municipal ou local».
Or, un parti ou un regroupement ne se conçoit que sur base de l’existence des personnes physiques qui en sont membres. Concrètement, le Mlc Jacques Ndjoli ou l’Unadef Christian Mwando – candidats indépendants soient-ils – devraient s’afficher pour le compte de la Majorité puisque ne pouvant plus prétendre appartenir à leurs partis politiques respectifs.
Il ne peut, du reste, en être autrement dès lors que ces partis dénient, par exemple, aux « Kengistes » et aux « Luhakistes » l’appartenance à l’opposition, et ce, sur base du même article suffisamment clair en ce que ce qui est valable au niveau national l’est absolument au niveau provincial, urbain, municipal et local. Ndjoli ou Mwando accueillant avec tous les honneurs dus à son rang Evariste Boshab à sa descente soit d’avion ou de train, soit de bateau ou de voiture au chef-lieu de Tshuapa ou de Tanganyika, c’est cela, le prix de l’honneur ou du déshonneur à payer !
Moralité : la ré-visitation des lois
Dans une chronique récente, nous avons soulevé la question d’applicabilité de l’article 68 par rapport à l’article 75 de la Constitution, le premier définissant les 4 institutions de la République, en l’occurrence le Président de la République, le Parlement, le Gouvernement et les Cours et Tribunaux, le second faisant constater la vacance de la présidence de la République et non de la fonction du Président de la République.
Dans la chronique présente, démonstration est faite de l’applicabilité de l’article 4 par rapport à l’article 3 de la loi portant statut de l’opposition qui dispose que : « Les partis politiques et les regroupements politiques dans les assemblées délibérantes font une déclaration d’appartenance à la majorité ou à l’opposition politique, auprès des bureaux respectifs de l’Assemblée nationale, du Sénat, de l’Assemblée provinciale, des conseils de ville, municipal, de secteur ou de chefferie ». Aucune place n’est laissée aux Indépendants !
Moralité : la ré-visitation des lois de la République s’impose, surtout celles à caractère essentiellement politique.
C’est bien dommage qu’il se soit tenu à Kinshasa, le 18 février 2016, un colloque sur les 10 ans de la Constitution sans que les initiateurs ne se soient préoccupés d’y intégrer les lois d’application, cas de la Loi n°04/002 du 15 mars 2004 portant organisation et fonctionnement des partis politiques, de la Loi n° 08/005 du 10 juin 2008 portant financement public des partis politiques et, tout naturellement, de la Loi portant statut de l’Opposition.
En attendant, le bon sens commande de l’admettre : l’élection des gouverneurs de province bousculera sérieusement l’architecture des partis et regroupements politiques dans la perspective, cela va de soi, du Dialogue politique national inclusif. Simplement parce que la nature, dit-on, a horreur du vide.
LE MAXIMUM AVEC OMER NSONGO DL