Toute la RD Congo a vibré, de toutes ses fibres, dimanche 7 février 2016. Pas pour des raisons strictement politiques, même si le politique n’est jamais bien loin de la concrétisation de telles performances parce qu’il a bien fallu que de l’argent soit débloqué avec diligence quelque part, mais pour le foot. La sélection nationale des joueurs évoluant au pays a remporté de manière éclatante le CHAN 2016 organisé … au Rwanda voisin. Un pays qui, ça ne vaut pas la peine de se le dissimuler, a plus que négativement pesé sur le devenir de la RD Congo depuis près de vingt ans. C’est le moins que l’on puisse dire.
Dimanche soir, quelque chose de plus que le sport roi a changé pour des millions des rd congolais, lorsque le Chef de l’Etat rwandais, Paul Kagame, a remis le trophée de la compétition au capitaine des Léopards, Joël Kimwaki Mpela. Pour beaucoup, au pays et à l’étranger, ont perçu à travers cette image qui fait le tour du monde encore aujourd’hui, comme une sorte de remise-reprise symbolique.
Le parcours des fauves de la RD Congo ne fut pas facile, pourtant. L’étape des quarts de finale contre le pays organisateur, le Rwanda donc, fut de tous les périls. Sur le terrain sécuritaire et militaire, comme sur la pelouse du stade Amahoro de Kigali, les Rwandais ont fait ce qu’ils savent faire contre la RD Congo : user de ruse pour parvenir à leurs fins.
Conscients des forces en présence, la sélection nationale rwandaise, les Amavubi, a joué des pieds et des mains pour démoraliser les Léopards. Des agressions physiques à la limite du tolérable ont été perpétré contre le capitaine Joël Kimwaki, le milieu Héritier Luvumbu et d’autres athlètes encore, sous le regard complaisant de l’arbitre du jour. Objectif : éliminer au moins un Léopards, par carton rouge ou par blessure grave, pour espérer venir à bout du Onze national de la RD Congo. La stratégie avait déjà payé par le passé, lorsqu’au cours d’un match du TP Mazembe à Kigali, Trésor Mputu, excédé par les injustices criantes favorisées par l’arbitre du match, avait porté la main sur le gars. Conséquence : une suspension d’un an par la FIFA (Fédération Internationale de Football Association), dont le trésor du foot national ne s’est jamais totalement remis, quoique l’on pense.
La stratégie de démoralisation des athlètes rd congolais, dont on connaît les réactions à fleur de peau, n’a pas réussi à Kigali. On ne la leur fait pas deux fois, aux rd congolais. En football comme dans d’autres domaines. Les Léopards et l’AS V.club de Kinshasa ont perdu pour des longs mois le double meilleur joueur du match, Hériter Luvumbu. Le garçon a reçu sa médaille d’or en marchant sur des béquilles. Mais la coupe est revenue au pays. Pour la seconde fois en l’espace de 6 ans.
Qu’on le reconnaisse ou pas, en deux mandats présidentiels, Joseph Kabila, le Président de la République et premier fan de l’équipe nationale, aura réussi le pari d’offrir des trophées continentaux au pays. Cela restera dans l’histoire de la RD Congo. Avant lui, seul le Maréchal Mobutu, resté au pouvoir durant près de 30 ans, avait réussi le même exploit : en 1968 et en 1974.
Le parcours des locaux au Rwanda et la victoire de Kigali sont indéniablement le reflet de l’évolution de la situation sociale interne de la RD Congo. Quelque chose s’est sensiblement amélioré, à l’évidence, qui permet l’organisation de championnats de football de niveau appréciable, pourvoyeurs d’athlètes d’expérience et de qualité. C’est leur sélection qui a rendu possible l’exploit de dimanche dernier à Kigali, chez le voisin rwandais. Le triomphe des Léopards au CHAN 2016 est aussi le résultat d’une certaine stabilité des institutions politiques du pays.
Au plan strictement sportif et footballistique, la participation des Léopards locaux au tournoi organisé par le Rwanda entraînera des réactions logiques. Vis-à-vis de la sélection nationale A, largement composée de joueurs professionnels évoluant à l’étranger. En quelques mois de préparation à Kinshasa essentiellement, Ibenge a réussi à monter un groupe homogène dont il sera difficile de débarquer l’un ou l’autre athlète. Kigali a révélé l’existence de la fameuse ossature locale de l’équipe nationale dont rêvent les rd congolais depuis des lustres. Il paraîtra discutable de la remplacer à 100 %, désormais. En cette matière comme en d’autres, on ne change pas l’équipe qui gagne.
Au plan socio-politique également, il est loisible de soutenir qu’on ne change pas l’équipe qui gagne. Kigali 2016 aura démontré, en matière de football comme en d’autres, que la stabilité institutionnelle, qui permet une continuité évidente dans les actions à mener, est payante.
E. MUKUNA