Arrivé à Kinshasa le 2 décembre dernier, le co-médiateur du dialogue politique inclusif sollicité par Kinshasa, l’ambassadeur algérien Saïd Djinnit, est rentré à New York le week-end dernier. Au secrétaire général des Nations, Ban Ki moon, qui l’avait chargé de l’évaluation de la situation avant de prendre le taureau rd congolais par les cornes, l’Envoyé spécial pour la région des Grands Lacs présentera sans nul doute les positions inconciliables de l’opposition politique rd congolaise et de la majorité au pouvoir. Si cette dernière, rangée derrière son autorité morale, Joseph Kabila Kabange, est prête à débattre des dangers qui guettent le processus électoral en cours et la fin de la seconde mandature présidentielle, une grande partie de l’opposition s’y oppose avec fermeté.
C’est à peine si cette attitude de refus n’est pas vantée sur tous les tons. La presse paraissant à Kinshasa rapporte que la Dynamique de l’opposition, un regroupement animé par Vital Kamerhe, Eve Bazaiba, Martin Fayulu, Jean-Lucien Busa, Ingele Ifoto et l’une ou l’autre vedette des écrans de télévisions de la capitale, il n’est pas question de dialoguer avec Joseph Kabila qui ne respecterait pas ses engagements.
Même son de cloche ou presque, du côté des néo-opposants du G7 où on estime que le Président de la République a l’obligation d’organiser les élections, c’est-à-dire, son départ, à leur entendement.
A ces postures, on peut ajouter celles de l’UDPS/Tshisekedi qui peuvent être traduites comme une sorte de tabula rasa, le parti du vieil opposant rd congolais réclamant quasiment une sorte de cession de souveraineté, qui dépossède du même coup le Chef de l’Etat actuel de tout ou partie de son pouvoir. C’est ainsi que certains observateurs, à Kinshasa et ailleurs, entendent les exigences du parti d’Etienne autour du partage de l’initiative de la convocation du dialogue national inclusif.
En deux mots comme en mille, chez les opposants, la priorité c’est le départ de Joseph Kabila du pouvoir. A Saïd Djinnit, Ingele Ifoto, un ancien ministre des mines sous la transition 1 + 4, qui s’était fait connaître de l’opinion par sa propension à dépenser sans compter (apesa atala te = qui distribue sans regarder au porte-monnaie), aurait carrément déclaré qu’il n’est pas possible d’accorder à M. Kabila une nouvelle transition en violation de la constitution. Tout comme on rapporte que Vital Kamerhe, l’ancien président de l’assemblée nationale passé à l’opposition, aurait demandé à l’émissaire de Ban Ki moon dire au Président de la République de quitter le pouvoir au lieu de multiplier les manœuvres dilatoires.
Tout se passe donc comme si le problème rd congolais se réduisait au départ de Joseph Kabila du pouvoir et à son remplacement, aux mêmes lieux et places, par l’un ou l’autre ténor de l’opposition. C’est loin d’être vrai et beaucoup d’observateurs avertis en doutent. C’est le cas de l’ambassadeur Nkema Liloo, un fin diplomate qui s’était fait connaître sous Mobutu par ses qualités de négociateur et son ouverture politique à … l’opposition à l’époque. Nkema, c’est le père spirituel de l’ouverture politique concédée par le vieux dictateur au début des années ’90, dont la démocratisation actuelle est une suite laborieuse mais logique.
Sur la toile, lundi 7 décembre 2015, cet observateur extrêmement averti rappelle qu’en 1997, il avait publié une chronique invitant le pouvoir mobutiste à négocier avec ce qui n’était alors qu’une rébellion AFDL. Naturellement, il n’avait pas été entendu, et la suite des événements finira par lui donner raison. L’homme fait remake (lire ci-contre), rappelle sa chronique de 1997 publié dans Le Soft de Finances, et réitère ses conseils : il faut dialoguer parce que l’enjeu de ces assises ne se limite pas à un problème de conquête ou de conservation du pouvoir. C’est l’existence de la RD Congo en tant qu’Etat dans les frontières héritées de la RD Congo qui est menacée.
C’est connu, la classe politique rd congolaise n’a jamais brillé par quelque qualité particulière en dehors du fait de se nourrir du pouvoir, de ses attributs, ou de ce qui peut en rester. Les postures de refus, qui ne sont pas sans rappeler les attitudes contre-productives de la même opposition vis-à-vis du pouvoir de Mobutu, semblent dictées par la fin des délais constitutionnels. Mais elles ne peuvent être valable que si après la fin du mandat présidentiel en cours donnera lieu à un exercice et à une gestion sereine du pouvoir d’Etat en RD Congo. Si ce n’est pas le cas, le chaos à venir, que nombre d’observateurs beaucoup plus sérieux que les braillards qui se recrutent dans les rangs de l’opposition politique en RD Congo craignent, sera aussi l’œuvre des opposants.
Les Kamehre, Bazaiba, Ingele Ifoto et autres troubadours ne sont donc que des apôtres d’un chaos à venir dont ils espèrent pouvoir tirer profit.
J.N.
25 05 15