Un groupe d’ONGDH a publié le 16 novembre 2015 une déclaration invitant le Président Joseph Kabila à clarifier sa position sur les «intentions» que lui prêtent «certains Congolais» de vouloir se maintenir au pouvoir. L’un de ces animateurs, Me Muila Kayembe, estime que «La déclaration et l’engagement du président de la République de s’investir dans l’alternance démocratique au sommet de l’Etat et de ne pas être candidat aux prochaines élections présidentielles mettraient fin à l’agitation et rassurerait les uns et les autres pour l’implication de tous dans la tenue et la réussite du dialogue». Ces ONGDH soutient qu’« il est du devoir citoyen et républicain du président de la République, Joseph Kabila, d’apporter cette clarification avant la tenue du dialogue ». Autrement : pas de clarification, pas de forum…
En plus, ces Ong considèrent que «La réussite du dialogue dépend aussi du taux d’implication, d’inclusion et d’appropriation des parties prenantes au processus électoral » au motif qu’une frange « non moins importante de forces politiques et sociales qui se réservent de participer à ce dialogue justifie sa position par l’intention, qu’elle prête au président de la République, de se servir de ces assises pour prolonger son mandat ».
Cette déclaration a été abondamment exploitée par la presse le lendemain le lendemain de sa publication. Ainsi, un journal de référence paraissant à Kinshasa démontre l’impératif de l’inclusion par le rappel de la Cns de 1990 et des Concertations nationales de 2013. De la première, elle note : « Dans les années 1990, la Conférence nationale souveraine a subi le même sort. Ce n’est qu’après avoir accumulé un grand nombre d’erreurs que le pouvoir mobutiste a fini par accepter le principe d’inclusivité, en convoquant finalement une Conférence nationale souveraine, élargie à toutes les forces sociales et politiques ». Des secondes, il tranche : « En excluant de gros calibres, tels que l’UDPS d’Etienne Tshisekedi, l’UNC de Vital Kamerhe, etc., ces assises avaient creusé leur propre tombe ».
Pourtant, il est connu de tout le monde qu’en 1990, le bras de fer portait non sur l’inclusivité des participants mais sur le format des assises. Le Pouvoir mobutiste voulait une conférence constitutionnelle ; l’Opposition et la Société civile une conférence nationale souveraine.
S’agissant des Concertations nationales, il est également connu de tous que les Tshisekedistes et les Kamerhistes n’en voulaient pas. S’agissant du Dialogue, tout le monde entend les membres du G7 et de « Dynamique » se déclarer non concernés.
En quoi alors la Majorité peut-elle être rendue responsable de l’inclusion de la non-inclusion du G7 et de « Dynamique » ? Ce serait même le comble que de voir Joseph Kabila implorer les réfractaires…
De contradictions en contradictions
Pour revenir à recommandation des ONGDH, la démarche est d’une malhonnêteté notoire. En voici la démonstration en trois points :
Les 11 et 12 août 2014, le Bureau politique du Msr (Mouvement Social pour la République) tient à son siège de Kinshasa «une session extraordinaire élargie aux délégués des 26 Fédérations du Parti correspondant aux26 futures provinces de la République » (!), session à l’issue de laquelle il publie le document intitulé «Déclaration Politique du Mouvement Social pour le Renouveau en rapport avec le débat sur la révision Constitutionnelle».
La déclaration note que «Depuis la publication, le 26 mai 2014, du calendrier des élections urbaines, municipales et locales par la Commission Electorale Nationale Indépendante, un débat politique en République Démocratique du Congo a pris un coup d’accélérateur. Ce qui est tout à fait logique dans un contexte de pluralisme politique». Elle relève qu’«Il est également observé qu’à partir du compte-rendu du Conseil des Ministres du 09 juin 2014, annonçant la volonté du Gouvernement de réaménager le cadre légal qui régit les élections dans notre pays, notamment, par le projet de loi portant révision de certains articles de la Constitution, ce qui aurait pu demeurer un débat démocratique sain, vire malheureusement à une polémique stérile…».
Se déclarant «Dépité et désappointé par cette agitation», le Msr «s’empresse d’inviter l’ensemble des forces politiques et sociales du pays au calme et à la sérénité». Estimant qu’«En ce qui concerne particulièrement les dispositions intangibles prévues à l’article 220 de la Constitution, le Mouvement Social pour le Renouveau considère que cette question ne devrait aucunement être au centre du débat de l’heure », le parti de Pierre Lumbi se félicite des faits suivants : « Primo, le Gouvernement qui a initié le projet de révision constitutionnelle, annoncé le 09 juin 2014, n’a pas repris l’article 220 dans sa ligne de mire », « Secundo, le Président de la République lui-même n’a jamais levé une quelconque option relative à cette matière. En plus, il n’a donné mandat à personne de le faire à sa place » et « Tertio, le Mouvement Social pour le Renouveau fait remarquer que la Majorité Présidentielle à laquelle il appartient, n’a jamais, jusqu’ici, débattu de la question, ni levé l’option d’une quelconque révision des dispositions intangibles de la Constitution ».
Le Bureau politique précise que « Certains Partis politiques et personnalités de la Majorité Présidentielle ont cru bon de prendre publiquement position sur la question, ce qui est de leur droit en tant qu’acteurs politiques » et fait observer que « …l’opinion ne doit pas perdre de vue que ces prises de position restent personnelles et n’engagent pas la Majorité Présidentielle ». Aussi, déclare-t-il : «Au stade actuel, il n’y a pas lieu de s’affoler ou même épouvanter nos paisibles concitoyens comme le font des politiciens d’une certaine opposition ». Dans les paragraphes suivants, on peut découvrir les phrases telles que le Msr «en Membre loyal et discipliné», «La Majorité Présidentielle est une coalition politique suffisamment structurée et organisée», etc.
La déclaration est signée Yves Mobando et Laurent Simon Ikenge. Elle est encore affichée sur le site internet du parti.
- Les termes «glissement», «troisième mandat» etc. ne sont pas une création de la Mp. Toutes les ONGDH, tous les médias, tous les partis politiques savent qu’ils ont été lancés par l’opposition, principalement par Vital Kamerhe (dont on connaît la fertilité de l’imagination), ce à partir non pas des affirmations du Président Joseph Kabila, mais d’un débat public dans lequel se sont retrouvés ses proches, débat nourri, pour paraphraser le Msr, par des « prises de position (…) personnelles» qui «n’engagent pas la Majorité Présidentielle ».
D’ailleurs, aucun activiste des droits de l’homme, aucun professionnel des médias, aucun acteur politique, voire aucun diplomate ne peut, à ce jour, fournir la moindre preuve d’une déclaration publique ou d’une confidence du Raïs faite dans le sens du non-respect de la Constitution. Même Moïse Katumbi, interrogé par Christophe Boisbouvier sur une connaissance éventuelle de sa part d’une réunion au cours de laquelle une stratégie de violation de la loi fondamentale a été concoctée, a été honnête : il n’en est pas au courant.
- Pierre Lumbi est demeuré durant plusieurs années conseiller spécial du Chef de l’Etat en matière de sécurité. A ce titre, il devrait en savoir beaucoup. Or, manifestement, il n’en sait rien. Chose grave : il en est réduit, lui aussi, à ressasser les « intentions » prêtées au Président de la République.
- Pas plus tard qu’en septembre 2015, dans la foulée des événements suscités par le G7, l’Autorité morale de la Mp a renouvelé son engagement à respecter la Constitution. Il a même mobilisé ses troupes pour les échéances électorales à venir.
« A malin, malin et demi »
Pour autant qu’elles soient dans une démarche intellectuelle sincère, à qui les ONGDH signataires de la déclaration du 16 novembre 2015 devraient demander les preuves des allégations relatives au « glissement », « au troisième mandat » et patati patata ? Est-ce au Président Joseph Kabila, lui qui n’a jamais rien dit à ce propos, ou – sauf à évoluer dans «La République des Inconscients», livre prémonitoire de Modeste Mutinga – c’est plutôt à Kamerhe, Fayulu, Lumbi, Kamitatu, Mwando, Kyungu etc. qui les répètent à tout bout de champ. Des avocats de profession qui demandent à la victime d’apporter des preuves des accusations dont elle est l’objet, ce n’est que dans ce pays où ils ont pignon sur rue !
En fait, la démarche de ces ONGDH n’est rien d’autre qu’un stratagème pour faire peser de nouvelles hypothèques sur le Dialogue boycotté par le G7 et la « Dynamique ». On comprend dès lors pour qui roulent-elles.
Pourtant, le Dialogue est le cadre indiqué de clarification ! Ne peut donc rejeter pareil cadre que celui qui a un agenda caché. La réalité de cet agenda est qu’avec des initiatives qui trahissent le doute, ONGDH, Opposition « G7 » et « Dynamique », médias proches ne rassurent pas quant à l’alternance politique escomptée de l’échéance 2016. Ils ne savent pas comment s’y prendre.
On pourrait, dès lors, les soupçonner de suggestionner plutôt à Joseph Kabila le « glissement », « le troisième mandat », le temps de pouvoir se préparer en conséquence.
Qu’ils aient le courage de l’admettre, et cela mettrait fin à l’agitation !
LE MAXIMUM AVEC OMER NSONGO DIE LEMA