Le chef de l’Etat, Félix Antoine Tshisekedi a instruit « le gouvernement de prendre toutes les mesures appropriées pour que seuls les avions répondant aux normes puissent voler avec des passagers dans nos airs ».
La question de la viabilité des aéronefs opérant en RDC est un serpent de mer. A chaque crash, elle se repose avec acuité. Le pilotage de l’Etat dans ce domaine est des plus confus et désinvoltes. L’Etat devrait gagner au bas mot 160.000 USD, en 2019, pour le survol de son espace aérien par des aéronefs immatriculés à l’étranger. Et près de 25 millions USD pour le go-pass. Mais ici aussi règne l’incurie. L’espace aérien de la RDC est un trou noir.
« Combien d’accidents d’avion et de victimes faudra-t-il comptabiliser avant que les moyens et les énergies soient mobilisés pour résoudre les problèmes urgents ? Combien de Congolais devront encore périr avant que la culture de la prévention entre dans nos mœurs et coutumes ?», cet extrait d’un mémo de l’Union nationale des pilotes du Congo (UNPCO) résume l’état des lieux de la navigation aérienne en RDC. Et l’UNPCO de poursuivre, «(…) les mauvaises conditions d’exploitation des aéroports et de contrôle de la circulation aérienne qui n’atteignent pas le niveau exigé par les normes internationales … des aéroports mal équipés, sans aide à la navigation, des nids de poule et de dos d’âne sur certaines pistes, des informations météorologiques non fiables et parfois inexistantes… ». Ce mémo adressé à l’Autorité de l’aviation civile, AAC, date d’il y a 10 ans, quand toutes les compagnies aériennes de la RDC ont été blacklistées par l’Union européenne.
Qu’attend le chef de l’Etat du gouvernement? Avis d’experts, il va falloir avant tout amender le code des investissements en vigueur depuis 2002. Ce code stipule que les engins lourds, des navires et des aéronefs de seconde main sont acceptés en exonération totale en RDC. Mais 10 ans après, l’alors ministre des Transports et des Voies de communication, Justin Kalumba (actuellement ministre des PME & Artisanat), prend un arrêté en 2012 interdisant l’importation des avions de plus de 15 ans. Cet arrêté fut des mécontents au sein même de l’appareil de l’Etat. La confusion était à son paroxysme lorsque le certificat de navigabilité sera refusé à l’un de deux Airbus de la Compagnie africaine d’aviation, parce que vieux de 17 ans. Pour certains experts, l’âge de l’avion n’a rien à voir avec le nombre de ses heures de vols, encore moins avec sa qualité et sa fiabilité technique. L’arrêté de Kalumba tombe prématurément en désuétude, comme celui de son prédécesseur (feu) Henri Kuseyo, en 2006, qui visait les aéronefs teufs-teufs de marque Antonov. A l’époque, un avion de ce type avait raté son envol et s’était écrasé sur un petit marché dans la banlieue de Kingasani, dans l’Est de la capitale. Cité par Kuseyo comme ayant donné l’ordre à l’appareil de voler, Me Nkulu Kilombo, alors ministre près le président de la République, avait risqué sa place. La RDC a compté jusqu’à 54 compagnies aériennes, sans qu’une seule ne dispose d’un seul aéronef sorti directement d’usine, conséquence des faveurs désinvoltes du code des investissements. Beaucoup ne fonctionnent qu’en louant un avion. Par ailleurs, créer une société de transport aérien est devenu avant tout une affaire des relations…politiques pour des marchés de transport des marchandises pour le compte du gouvernement. Comme s’il s’agissait de motos ou de véhicules terrestres, l’Etat a même concédé, en 2016, aux transports aériens, un moratoire de deux ans pour se conformer aux normes standards et mettre à jour tous les documents d’exploitation, surtout le certificat de navigabilité et la licence d’exploitation.
Selon la loi, ce certificat est valable un an. L’opérateur doit le renouveler régulièrement en prouvant à l’AAC sa capacité d’exercer en toute sécurité et en toute sûreté ses activités commerciales de transport aérien. Dans l’entre-temps, le gouvernement fait voter au Parlement un chapelet de lois, neuf en tout, sur l’aviation, parmi lesquelles, la ratification des conventions relatives à l’aviation civile internationale, l’unification de certaines règles de transport aérien ou encore la loi sur la réparation des dommages causés à des tiers par des aéronefs en plein vol. Depuis 2017, le budget ne prévoit pas de recettes sur le droit d’inscription d’un aéronef au matricule aéronautique de la RDC. L’État se passe également de droits de contrôle technique des aéronefs, la taxe de délivrance d’une patente pour pilote, la taxe sur l’autorisation d’installation d’une balise d’approche sur une piste privée, la taxe d’agrément d’un centre d’enseignement aéronautique, la taxe portant sur la modification aux mentions d’un certificat d’immatriculation d’un aéronef congolais. En d’autres termes, la non-perception des recettes de ces différentes taxes revient à dire que les actes y afférents ne sont pas exécutés par les services attitrés dont l’Autorité de l’aviation civile.
Par ailleurs, dans le cadre des impôts sur le commerce extérieur et les transactions internationales, l’Etat restaure la taxe d’autorisation d’importation d’un aéronef. Et pour l’exercice 2019, le Trésor prévoit de gagner quelque 117.467.314 FC, soit un peu plus de 70.000 USD. Du menu fretin. Par contre la taxe d’autorisation d’importation d’un aéronef repris la rubrique « Autres recettes à caractère fiscal » des Transports et Voies de Communication reste gelée. L’Etat a notamment réactivé le droit de contrôle technique des aéronefs. L’Etat compte en gagner quelque 5 .847.769 .893 FC, soit plus de 3,5 millions USD à fin 2019. L’Etat ne prévoit plus des prévisions de recettes sur cet acte mais reçoit annuellement des recettes sur la taxe de délivrance du certificat de radiation d’un aéronef. En 2017, le ministère des Transports et des voies de communication, avait perçu près de 30 millions FC soit environ 20.000 USD. Pour autant, les droits d’inscription d’un aéronef au Matricule aéronautique de la RDC n’a plus rien rapporté depuis 5 ans.
POLD LEVI MAWEJA