Une délégation comprenant 15 membres du Conseil de sécurité des Nations-Unies a séjourné durant 48 heures à Kinshasa pour discuter avec les parties prenantes au processus électoral en cours en RD Congo et du retrait des forces onusiennes réclamé avec de plus en plus d’insistance par Kinshasa. La délégation conduite par l’Ambassadeur Français aux Nations-Unies, François Delattre, a eu des entretiens avec la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI), les candidats à la présidentielle prévue le 23 décembre 2018, la Majorité présidentielle au pouvoir, le 1er ministre, chef du gouvernement et le président de la République, Joseph Kabila.
A la CENI, la délégation du Conseil de sécurité a été mise au courant de l’évolution du processus électoral rd congolais, qui a atteint son point de non-retour. La tenue des scrutins combinés législatifs nationaux et provinciaux et présidentiel a été confirmée, toutes les étapes calendaires ayant été scrupuleusement respectées par l’administration électorale. Pour des raisons de souveraineté, le gouvernement de la RD Congo a fermement décliné l’offre d’assistance financière ou logistique de la communauté internationale. La CENI a réitéré cette volonté du gouvernement devant la délégation du Conseil de sécurité qui semble avoir effectué le déplacement de Kinshasa pour tenter de faire fléchir Kinshasa sur le sujet. Les aspects relatifs au consensus sur l’utilisation de la machine à voter et sur le retrait des enrôlés sans empreintes digitales ont également été évoquées, mais la centrale électorale n’a pas cédé d’un iota. Les divergences sur la machine à voter seront réglées au cours d’une réunion technique avec les candidats qui ont des réclamations à faire valoir, et les enrôlés sans empreintes digitales ne seront élaguées des listes électorales que s’il s’avérait qu’ils étaient des enrôlés fictifs à l’issue de l’examen des listes électorales en cours d’affichage dans les sites de vote.
Le processus avance, il ne reculera pas
Pour l’essentiel, « ce qui est noté, c’est que le processus électoral avance bien et que le 23 se tiendront les élections », a déclaré à la presse Corneille Nangaa. Même son de cloche, ou presque, de la part de l’Ambassadeur Delattre qui a expliqué à la presse que « notre objectif prioritaire aujourd’hui, c’est bien qu’il y ait élections le 23 décembre, que ces élections soient crédibles, qu’elles soient transparentes, qu’elles se tiennent dans un climat apaisé ».
Auprès des acteurs politiques de l’opposition et de la majorité au pouvoir, les membres du Conseil de sécurité ont fait face à des revendications diamétralement opposées.
Outre la récusation de la machine à voter et l’élimination sans autre forme de procès d’électeurs sans empreintes digitales, les délégués de l’opposition ont fait valoir l’obligation d’accepter l’appui de la communauté international au processus électoral. L’ensemble des leaders présents à la rencontre du vendredi dernier ont prié les membres du Conseil de sécurité de « ne pas céder au chantage à la souveraineté du gouvernement ‘sans légitimité’ de Joseph Kabila, de reconduire le mandat de la mission onusienne et d’assurer la participation effective de la MONUSCO dans l’ensemble du processus électoral.
Tandis que la majorité présidentielle, lassée de dialogues et de discussions politiques interminables tient plus que jamais à emmener le peuple Congolais aux urnes, avec la machine à voter, sans le soutien de la communauté internationale et sans tergiversations. Au sortir de l’audience avec la délégation du Conseil de sécurité samedi dernier au Fleuve Congo Hôtel, Néhémie Mwilanya, le directeur de cabinet du président de la République qui conduisait la délégation du Front Commun pour le Congo (FCC) a réaffirmé leur détermination à aller aux élections. « Nous avons suffisamment dialogué dans ce pays, nous avons trouvé le consensus sur les questions essentielles qui peuvent permettre l’organisation des élections », a-t-il déclaré à la presse. Ajoutant que «la machine à voter est une question technique. Nous avons la CENI qui est pouvoir organisateur des élections, ce pouvoir il le tire de la constitution, nous devons faire confiance à la CENI. Donc nous n’avons pas d’avis à donner vis à vis de la machine à voter sauf que nous constatons que depuis qu’on parle d’elle, on ne dit pas exactement ce qu’on reproche à cette machine. Nous commençons à comprendre qu’il y a une équipe qui n’a pas envie de jouer».
Devant le Chef du gouvernement et le président de la République, les membres de la délégation co-présidée par les ambassadeurs de Bolivie et de la Guinée Equatoriale se sont exprimés chacun au nom de son pays. Même si dans l’ensemble tous se sont montrés d’accord sur le fait qu’ils sont là pour appuyer et accompagner le processus, travailler sur ce qui reste à faire, rassembler les Congolais, trouver le consensus pour aller ensemble aux élections et veiller à ce que tout le monde se sente partie prenante, selon les explications à la presse de Leila Zerrougui, la représentante du secrétaire général des Nations-Unies en RD Congo.
Crédibilité et transparence
Pas question de reculer donc, mais de poursuivre le processus. Reçue par Joseph Kabila, samedi 6 octobre 2018 au Palais de la Nation, a réitéré cet objectif central du Conseil de sécurité : « … que les élections du 23 décembre soient crédibles et transparentes et se tiennent dans un climat apaisé », selon les termes du Français François Delattre.
Au cours d’un point de presse en la salle de conférences de la mission onusienne à Kinshasa, François Delattre a encore expliqué que « la machine à voter a été évoquée. Nous avons rappelé la position du Conseil de sécurité et appelé par le dialogue à trouver les voies d’un consensus le plus large possible permettant de créer les conditions d’élections réellement crédibles et transparentes ». Et le seul dialogue possible est strictement technique, puisqu’une partie de la classe politique s’oppose à tous nouveaux conciliabules politiciens.
J.N.