Les affrontements entre les FARDC et les rebelles du M23 ont gagné en intensité, mercredi 25 mai 2022 en territoires de Nyiragongo et Rutshuru (Nord-Kivu). Vers 4 h00 locales, les positions récupérées la veille par les forces gouvernementales congolaises sur les collines surplombant Kibumba et Buhamba ont de nouveau été attaquées mais l’assaut a été repoussé, selon le porte-parole militaire dans la région. De Rutshuru où des combats entre le M23 et les FARDC font rage depuis le 19 mai, notamment à Nyarubara et Runyonyi, les affrontements se sont étendus à Chanzu et Musungati et tournaient à l’avantage des forces loyalistes jusqu’au lundi 23 mai, lorsque les assaillants ont repris quelques positions à Nyarubande, Rupangu et Ruginga.
Mardi 24 mai, la situation demeurait confuse sur la ligne de front, la seule chose certaine étant que les affrontements se poursuivaient et se rapprochaient de Bunagana, entraînant l’annulation des épreuves préliminaires de l’examen d’Etat dans cette agglomération. Selon des témoins, les FARDC pilonnaient des positions ennemies sur la petite colline de Umugongo Winzoru d’où le M23 tentait de se réorganiser pour repartir à l’attaque. Mais pas seulement. Les chefferies de Bukumu, Kibumba, Buhumba et Kibati étaient sous le feu de l’artillerie ennemie depuis 8 h 00 du matin, selon un tweet du Mwami Butsitsi Kahembe.
Bon comportement des FARDC
En fin de matinée du 24 mai, il semblait que les FARDC s’en tiraient plutôt bien, récupérant plusieurs collines récemment occupées par les forces ennemies à Rutshuru. C’est ce qui aurait provoqué l’entrée en lice des soldats rwandais venus à la rescousse du M23, selon plusieurs témoignages d’habitants. Même situation dans le territoire de Nyiragongo où les FARDC semblaient gagner du terrain, réussissant ainsi à empêcher l’accès de la route Goma-Rutshuru aux rebelles.
Mercredi 25 mai, les combats n’avaient pas faibli à Rutshuru. Mais selon des sources militaires, les FARDC n’avaient concédé aucune des collines conquises. Malgré un repli stratégique vers Kibati autour de 9 heures locales. Bien plus, dans les groupements de Kibumba et Buhumba, les FARDC avaient repris plusieurs localités des mains des assaillants qui les occupaient depuis l’aube. C’est à ce moment qu’une nouvelle attaque de Kibumba par des M23 soutenus par l’armée rwandaise (RDF) a été signalée. Ils avaient traversé la frontière congolaise à Kasizi en passant par Hehu-Kiroje-Kibiriga pour atteindre Kingarame.
Kibumba attaqué plusieurs fois
En milieu d’après-midi, des sources ont fait état de la reprise de Kibumba et de quelques localités par des éléments RDF. Tandis que d’autres assuraient que l’axe Goma-Rutshuru demeurait sous contrôle des FARDC, même si la circulation était interrompue à hauteur de Kibumba en raison de l’intensité des affrontements.
Néanmoins, le soutien avéré du Rwanda aux mutins du M23 ne faisait plus l’ombre d’aucun doute. Dans un communiqué y relatif, publié mercredi 25 mai à Goma, les FARDC ont fait état de «plus de 20 obus et bombes tirés de l’Est vers l’Ouest de l’axe routier Goma-Rutshuru qui ont explosé mardi 24 et mercredi 25 mai sur le territoire congolais à Katale, non loin de la piste d’aviation de l’Institut Congolais pour la Conservation de la Nature (ICCN), à Rumangabo et ses environs». Mais aussi qu’à l’issue des affrontements de Kibumba dans la nuit du lundi 24 à mardi 25 mai 2022, «l’ennemi a abandonné des armes et des effets militaires récupérés par les FARDC. Il s’agit notamment d’un mortier 60 mm, d’une arme AK 81, de 08 roquettes antitank, d’une chaîne de munitions de PKM, d’une paire de tenue militaire, d’un casque et de deux gourdes militaires non utilisés ni par les FARDC, ni par les terroristes du M23». L’allusion à l’armée rwandaise est nette et claire. Le porte-parole militaire du gouvernorat du Nord-Kivu a promis de porter ce cas devant la Commission conjointe de vérification élargie de la CIRGL pour appréciation tout en rassurant sur la situation à Kibumba, malgré la nouvelle attaque rebelle.
Rumangabo repris
C’est plutôt de Rumangabo qu’était venue la mauvaise nouvelle de la journée. Les assaillants avaient attaqué à l’arme lourde et légère le camp militaire vers 18 heures locales, selon des témoins, avant que plusieurs sources n’annoncent le repli des FARDC et le déplacement du personnel du Parc des Virunga vers Rutshuru Centre, Kiwanja et Rwindi.
Après des affrontements violents, les FARDC ont délogé le M23 de Rumagabo jeudi 26 mai dans la matinée. Au milieu de la journée, ils poursuivaient leur avancée vers Kibumba et Buhumba. Dans la foulée de ces victoires des troupes gouvernementales, a également été annoncée la récupération de toutes les localités du groupement de Kisigari.
Ce que les militaires n’ont pu déclarer clairement mercredi 25 mai, les politiques l’ont fait. Devant le Conseil exécutif de l’Union Africaine, le vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères, Christophe Lutundula a condamné en des termes sans équivoque l’implication du Rwanda dans les attaques des positions des FARDC par le M23. Une déclaration politique de la RDC est attendue dans les heures qui suivent a-t-il annoncé. «Le M23 soutenu par le Rwanda a attaqué les troupes internationales de la MONUSCO. Nous ne pouvons pas rester indifférents», a déclaré, entre autres, Christophe Lutundula.
De son côté, le ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, Patrick Muyaya, a annoncé la saisine par la RDC de la Commission conjointe de vérification élargie à la CIRGL pour attester le soutien de Kigali aux forces rebelles qui opèrent en RDC. «Nous devons tous, chacun nous lever pour qu’aucune tentative, d’aucune manière, d’aucun groupe, d’aucun pays ne tente de prendre un seul centimètre de notre territoire. Ils seront tous vaincus», a déclaré en substance le ministre Muyaya à l’issue d’une réunion de crise convoquée autour du 1er ministre à Kinshasa.
Aux dernières nouvelles, le président de la République, Félix Tshisekedi, a décidé d’ajourner sa participation au sommet des chefs d’Etat prévu à Malabo pour suivre personnellement la situation au front de Rutshuru et Nyiragongo.
J.N.