Dans certains médias et réseaux sociaux congolais, il ne fait pas bon être Olivier Kamitatu, directeur de cabinet et membre de la cellule d’appui à l’implantation de Ensemble pour la République, le parti politique de Moïse Katumbi. Cet ancien speaker de la chambre basse du parlement et ancien ministre du Plan sous Joseph Kabila avait signé «un message clair, celui du respect de la constitution et de la prise en compte de l’aspiration du peuple», estampillé de la formation politique de son patron, l’ex-gouverneur du grand Katanga.
L’homme éprouve quelque mal à se départir des propos péremptoires qu’il tenait naguère à ce sujet.
Mardi 7 mars 2022, il a cru devoir se mêler de la polémique ambiante sur la nécessité ou non de modifier la constitution, suscitée par certains acteurs politiques de la majorité au pouvoir en les critiquant vivement. «La constitution a-t-elle empêché les retentissants succès du programme des 100 jours, du projet Tshilejelu, de Kinshasa Zéro trou ou des Jeux de la Francophonie ? A-t-elle empêché de partager les milliards de D. Gertler et revendre ses blocs pétroliers », avait écrit Kamitatu, s’attirant aussitôt les foudres de nombreux internautes qui n’avaient trouvé rien à redire lorsque d’autres acteurs politiques de l’opposition, comme André Claudel Lubaya, s’étaient également prononcés contre toute tentative de modification de la loi fondamentale. Devant l’ampleur des critiques ad hominem qui le ciblaient, le dircab de Katumbi a choisi de retirer prestement son tweet provocateur.
Trop tard
Mais le mal était fait. Dans ce domaine informatique, rien ne se perd, rien ne se crée comme dirait le philosophe turc Héraclés d’Ephèse. Tout le monde avait lu les critiques acerbes de Kamitatu, ou en avait eu vent.
Plusieurs internautes ont eu beau jeu d’exhumer une de ses interviews alors qu’il était membre de la majorité présidentielle kabiliste en sa qualité de président de l’ARC, un parti politique auquel il a renoncé récemment au profit de Ensemble pour la République de Moïse Katumbi. C’était le contre-pied flagrant de sa position actuelle, preuve pour ses pourfendeurs d’une versatilité particulièrement inacceptable.
A nos confrères de Jeune Afrique qui l’interviewait, l’alors tout puissant ministre du Plan de Muzito expliquait l’immobilisme du gouvernement par le fait de la coalition. Exactement comme celle dont est issue le gouvernement en place aujourd’hui. «Une coalition entraîne toujours des blocages. Mais ceux-ci tiennent aussi à notre constitution. C’est un copier-coller de la Vème République française. Notre démocratie n’est pas aussi achevée que celle de la France. Le chef de l’Etat doit avoir plus de pouvoir. Au lieu d’un binôme président-Premier ministre, nous avons besoin d’un leadership fort, avec une autorité bien établie», affirmait Olivier Kamitatu.
Présidentialiste
Au sujet des élections, Kamitatu ne pensait pas autre chose que ce que certains dans les milieux favorables à l’Union sacrée de la Nation de Tshisekedi disent à l’heure actuelle, à savoir que «cinq années ne suffisent pas pour reconstruire le pays. A partir de la troisième, la question politique prend le dessus».
Même sur la question du retrait ou non de la mission onusienne de la RDC, Olivier Kamitatu s’est montré d’une certitude sans fard, assurant qu’«on ne peut pas sous-traiter indéfiniment la sécurité du Congo. C’est une question de souveraineté». Autant que sur les contrats chinois, que son nouveau patron semble particulièrement abhorrer : «le modèle chinois nous permet d’atteindre une croissance soutenue par les investissements dans les infrastructures», déclarait-il le 8 mars 2000 dans son interview à Jeune Afrique affichée sur tous les réseaux sociaux depuis quelques jours avec des commentaires aigres-doux.
Dégâts
Même si le directeur de cabinet de Katumbi s’est empressé de retirer son tweet querellé du 7 mars 2022, les dégâts semblent énormes, y compris au sein de son nouveau parti politique. Moïse Katumbi a publié une série de nominations politiques qui, si elles ne sanctionnent pas formellement son dircab, consacrent son éviction du secteur de la communication de Ensemble pour la République.
En effet, en nommant 7 nouveaux secrétaires nationaux de sa formation politique, Katumbi a pratiquement évincé Olivier Kamitatu (et Francis Kalombo, en fait) au profit de Laurent Onyemba, avocat au barreau de Kinshasa, qui est désormais chargé aussi bien de la communication du parti katumbiste que des relations avec les médias.
Dans la foulée de ces nominations publiées mardi 7 mars, un transfuge du RCD-K-ML Jérôme Kamate se voit confier le secteur des adhésions, implantation et suivi des effectifs. Quant au département de l’animation des structures et développement des fédérations, il échoit à Adèle Ndongala Matomina, alors que celui de la capacitation et de la construction identitaire revient à Georges Zuka Mondo. Trois autres postes de secrétaires Nationaux ont été créés : les Relations avec les notabilités, élus et cadres, confiées à Jean-René Ikanga Bonga ; les Implantations extraterritoriales et organisations affiliées ou associées, placées sous la direction de Faustin Batongo Libembe ainsi que les Implantations extérieures et Congolais de l’Etranger, que dirigera Jerry Biangani Tampwo.
Olivier Kamitatu ne portera plus la communication du parti de Moïse Katumbi.
JM