Au Nord-Kivu et en Ituri sous état de siège depuis fin mai 2021, la paix est loin d’être acquise. Il va de soit que venir à bout de la terreur causée par les groupes rebelles étrangers dans cette partie de la RDC depuis au moins trois décennies ne peut être une génération spontannée. Tout autant, du reste, que mettre hors d’état de nuire les nombreuses milices locales qui poussent comme des champignons. Les nouvelles du front semblent néanmoins de moins en moins mauvaises depuis plusieurs semaines. Et l’extraordinaire publicité consacrée à l’infortune des populations civiles congolaises victimes des exactions de ces forces négatives va decrescendo.
Pourtant, ce ne sont pas les forfaits perpétrés par les ADF, CODECO et autres maï-maï qui font défaut. Pas vraiment, parce qu’à Butembo, la capitale économique du Grand Nord-Kivu, ces fameux maï-maï ont attaqué une position FARDC à Kambogho, une sortie de la ville. Bilan : 4 assaillants ‘‘neutralisés’’ et 1 capturé.
Dans la même région, une cinquantaine de kilomètres plus loin dans la chefferie de Watalinga, des terroristes ADF ont fait incursion à Luanoli, groupement Bawisa, provoquant une débandade généralisée. Mercredi 12 janvier dans la journée, ces égorgeurs ont tué 7 personnes qui se rendaient aux champs et incendié un centre hospitalier et des habitations à Buthotholya dans le secteur de Ruwenzori sur la route Beni-Kasindi.
Renseignements militaires efficaces
Il reste que de telles agressions se font de plus en plus rares, preuve que les mesures d’exception prises par Félix Tshisekedi (état de siège et mutualisation des forces militaires ougandaises et congolaises) se révèlent efficaces, selon des observateurs. Les faits d’armes enregistrés sur le terrain des opérations militaires confirment eux aussi l’ascendant pris sur l’ennemi par les troupes loyalistes dans cette guerre asymétrique.
Les renseignements militaires des deux côtés de la frontière ont contribué à ces performances. Benjamin Kisokerano, chef des renseignements, des finances et des approvisionnements des terroristes ADF a été capturé le 11 janvier à Uvira alors qu’il tentait de gagner le Burundi voisin. Ce proche collaborateur de Jamil Mukulu, le n° 1 des ADF en détention en Ouganda depuis 2015, était recherché depuis cinq ans. Considéré comme un des cerveaux-moteurs des ADF, Kisokerano est à la tête de l’aile anti-Daech des ADF (l’aile rivale qui a fait allégeance au groupe islamiste étant dirigé par Mussa Baluku). A ce jour, plusieurs têtes d’affiches ADF ont été arrêtés dans la région de Beni, notamment : Abdou Omar (instructeur), Kavugho (ravitailleuse depuis 23 ans) et son chauffeur Mumbere.
Un chef spirituel CODECO appréhendé
Dans la province voisine de l’Ituri, Kalu Litso Isaka alias «savant», co-fondateur et féticheur de la milice CODECO ainsi que 6 miliciens de ce groupe armé ont été appréhendés à Wadha (groupement Budhu, secteur de Walendu Tatshi, Djugu) par les FARDC et présentés le 10 janvier au gouverneur militaire Johnny Luboya Nkashama à Bunia.
Dans la foulée de ces prises, l’armée a lancé un avis de recherche à l’encontre de quelques personnalités locales parmi lequelles un chef coutumier et des opérateurs économiques du cru, pour participation à un mouvement insurrectionnel.
Libération d’otages
Par ailleurs, les opérations militaires ont permis la libération d’une quarantaine d’otages des ADF et des miliciens maï-maï et CODECO à Otmaber et Ndimo (Sud d’Irumu). 25 rebelles ADF/MTN ont en outre été neutralisés et 10 armes AK-47 récupérées, rapporte le commandement militaire local.
A cette étape de la guerre, les stratégies mises en œuvres se complexifient chaque jour un peu plus. Le 10 janvier, les états-majors des FARDC et de l’UPDF ont publié un communiqué conjoint faisant état de «la présence dans la région des éléments d’un groupe armé avec des plans sinistres visant à discréditer les performances réalisées par les forces conjointes contre les rebelles ADF… ». Le communiqué signé par les généraux Flavia Byekwaso (UPDF) et Léon-Richard Kasonga (FARDC) renseigne que les ADF envisagent de saper la confiance entre populations civiles et forces coalisées en arborant des tenues de l’UPDF lorsqu’ils commettent de nouvelles atrocités contre les civils. En effet, le 6 novembre 2021 à Butembo, des agents de la DGDA avaient intercepté un véhicule transportant des tenues militaires similaires à celles de l’armée ougandaise, renseignent des sources dans la région ainsi que 100 sacs à dos, gourdes et écharpes militaires en provenance de Chine.
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