Dans la saga de la pandémie de Covid-19, un nouveau variant tient le haut du pavé depuis quelques semaines, faisant sérieusement trembler le monde.
Omicron, du nom d’une énième lettre de l’alphabet grec que l’OMS a décidé d’utiliser pour distinguer les variantes de la pandémie apparue en Chine il y a quelques bonnes années maintenant, avait la particularité d’être d’origine africaine, plus précisément, sud-africaine, les autorités sanitaires du pays ayant déclaré la présence du nouveau variant sur leur territoire le 24 novembre. Omicron a donc été décrété africain jusqu’au mardi 31 novembre 2021, lorsqu’il est apparu que la nouvelle mutation microbienne avait déjà été détectée sur le vieux continent, au Pays-Bas. Un test prélevé le 19 novembre, une semaine avant que les autorités du pays de Mandela ne fassent état de sa présence en Afrique du Sud, avait permis la détection d’Omicron dans deux échantillons prélevés les 19 et 23 novembre, a rapporté l’Institut néerlandais de la santé et de l’environnement (RIVM). Sans pouvoir préciser si les personnes concernées avaient séjourné en Afrique Australe. D’autres cas du variant Omicron avaient pourtant été détectés en Europe, notamment en Belgique, premier pays Européen à identifier Omicron sur un patient en provenance d’un pays étranger, le 22 novembre. Mais Omicron était décrété sud-africain et l’aire de prévalance du nouveau variant étendu à toute l’Afrique Australe, ainsi mise à l’isolement sans autre forme de procès.
16 cas au Pays-Bas
Les Pays-Bas ont ainsi également fait état, lundi 29 novembre, de 14 porteurs du nouveau variant arrivés d’Afrique du Sud, annonçant diverses études sur la propagation du nouveau variant sur son territoire. De nombreux pays du vieux continent aussi, qui se sont empressés sans attendre les instructions de l’OMS, notamment de se barricader pour se prémunir de ces nouvelles contagions made in Africa. Au grand dam des autorités politiques et sanitaires sud-africaines, victimes de leur probité morale et scientifique. L’interdiction de vols en provenance ou en partance de cette partie du continent noir frappant de plein fouet une économie largement touristique, déjà malmenée par les précédentes vagues de la pandémie.
Certes, en Afrique du Sud, les experts constatent la montée en flèche des contaminations : jusqu’à 10.000 cas/jour contre seulement 300 cas avant l’apparition du nouveau variant. Mais «il n’y a pas de raison de paniquer, ce n’est pas un territoire inconnu. Nous avons plus de vingt mois d’expérience en matière de gestion de la pandémie, des différentes vagues et des différents variants», se défendait le 29 novembre, à la suite du président Cyril Ramaphasa, Joe Phaahla, ministre sud-africain de la Santé. Mais rien n’y fait. Même si rien n’indique encore que la forte contagiosité d’Omicron ne prouve pas qu’il est plus dangereux que les variants identifiés avant lui, notamment, le Delta. Plusieurs médecins généralistes, en Afrique du Sud, assurent que le nouveau variant ne provoque que des symptômes légers : une toux sèche, de la fièvre, des sueurs nocturnes «en adéquation avec ce qu’ils ont vu au cours des vagues précédentes». Encore que les premières données épidémiologiques sud-africaines semblent indiquer que les jeunes (moins de 25 ans) semblent les plus touchés par Omicron parce qu’ils sont les moins vaccinés. Or, 90% des patients admis dans les hôpitaux en Afrique du Sud appartiennent à cette catégorie de non-vaccinés, ce qui rend difficile toute appréciation de l’efficacité des vaccins disponibles sur le marché.
Ruée chez les fabricants de vaccins
Pas suffisant pour arrêter les fabricants de vaccins qui se ruent sur l’occasion. Les laboratoires Pfizer et Johnson & Johnson se sont empressés lundi 29 novembre, à la suite de Moderna, d’annoncer des recherches sur une nouvelle version de leurs vaccins anti-covid ciblant spécifiquement le nouveau variant. Au cas où. Pfizer assurant au passage que sa pilule anti-covid, qui a démontré une efficacité à 89 % contre les hospitalisations et décès lors d’essais cliniques a été développée avec l’idée que les mutations du virus allaient apparaître. Même son de cloche du côté de Merck qui s’est déclaré confiant en son antiviral (le Molnupiravir), «qui sera probablement actif contre le variant Omicron ». Quant aux Russes, ils avaient annoncé une adaptation de Spoutnik V au nouveau variant dès le 29 novembre. L’Institut Gamaleïa a déjà commencé à développer une nouvelle version du Spoutnik adaptée à Omicron, selon un communiqué du Fonds souverain russe, concepteur du vaccin. Même si, selon les autorités soviétiques, une dose supplémentaire des versions actuelles de leurs vaccins devraient pouvoir neutraliser Omicron.
Seule rempart contre cette ruée catastrophiste sur l’Afrique australe, l’OMS qui déconseille formellement la fermeture des frontières pour se prémunir contre Omicron. Mercredi 1er novembre, alors que le monde continuait sa mise en isolement de l’Afrique australe, l’OMS a exhorté les Etats à privilégier la vaccination des personnes à haut risque et des personnes vulnérables. Au cours d’une séance d’information à l’intention des Etats membres de l’organisation onusienne, le Dr. Tedros Adhanom Ghebrreyesus, son président, a fustigé les fermetures de frontières en cours dans certains pays, parce qu’elles ne font qu’aggraver les inégalités. «Plus nous laissons la pandémie s’éterniser – en ne remédiant pas aux inégalités en matière d’accès aux vaccins ou en ne mettant pas en œuvre des mesures sociales et de santé publique de manière adaptée et cohérente – plus nous donnons à ce virus la possibilité de muter d’une manière que nous ne pouvons ni anticiper ni empêcher», a-t-il expliqué aux représentants des 149 pays membres de l’OMS.
Une consigne qui devrait être suivie à la lettre, en RDC notamment, où le nouveau variant n’était pas encore détecté au 30 novembre, selon le Dr. Stève Ahuka de l’INRB. Sur Top Congo FM, l’épidémiologiste congolais a néanmoins soutenu que compte tenu de l’importance «des échanges avec les pays d’Afrique Australe, il ne serait pas étonnant que ça arrive. Les services (doivent) demeurer vigilants».
H.O.