Les Allemands l’ont élue pour les diriger, et elle a dirigé les 80 millions de la population pendant 18 ans avec compétence, habileté, dévouement et humilité, tout en gardant la fermeté en ce qui concerne l’indispensable réduction du train de vie chez ceux qui animent les institutions publiques.
Durant ces 18 années à la tête de son pays, aucune transgression n’a été enregistrée à son encontre. Elle n’a assigné en justice aucun de ses pourfendeurs et Dieu sait s’il y en a sur les berges du Rhin.
Elle n’a pas prétendu être la créatrice de gloire. Elle ne s’est pas adjugée des millions d’Euros. Elle n’a pas combattu ceux qui l’ont précédée et ne les a pas discrédités. Elle n’est pas apparue dans les rues de Berlin pour être déifiée.
Angela Merkel, une grande dame que ses compatriotes ont surnommé “La dame du monde” est parfois décrite comme l’équivalent à elle seule de six millions d’hommes.
Elle a quitté la direction de son parti la CDU et l’a remise sans état d’âme à ses successeurs, laissant l’Allemagne et son peuple dans les meilleures conditions imaginables.
La réaction des Allemands a été sans précédent dans l’histoire de ce grand pays européen.
Dans toutes les villes et les petits hameaux d’Allemagne, des hommes, des femmes et des enfants sont sortis sur les devantures des échoppes et les balcons des maisons pour l’ovationner spontanément et chaleureusement pendant 6 minutes continues. Il n’y a pas eu de chants, pas de poèmes populaires, pas d’écumes, pas de vacarmes, pas de drapeaux.
On n’a pas entendu de tonitruants éloges, ni de louanges dithyrambiques hypocrites ou de tambourinages avec des cris d’enthousiasme à la gloire de ce grand personnage.
L’Allemagne est restée un corps uni dans l’hommage à cette femme d’exception qui a fait bénéficié à son pays d’un leadership exemplaire à plus d’un titre, une physicienne chimiste qui n’a pas été tentée par la mode ou les lumières et qui, originaire de la très pauvre ancienne Allemagne de l’Est, ne s’est guère préoccupée d’accumuler des comptes en banque, des biens immobiliers, des voitures, des yachts ou des avions privés.
Elle a quitté son poste après avoir placé l’Allemagne au sommet de l’émergence en Europe. Elle est partie sans que ses proches ne la convainquent de tirer profit de tout cela pour se pérenniser au pouvoir.
Lors d’une conférence de presse, à une journaliste qui lui a posé la question suivante: «Mme Merkel, nous remarquons que votre habillement est toujours le même. N’avez-vous pas d’autres tailleurs?», elle a répondu: «je suis une employée du gouvernement et non une top modèle».
A la question de savoir combien elle avait de personnel de maison pour nettoyer sa résidence, préparer ses repas, etc, sa réponse a été la suivante : «Non, je n’ai pas de domestiques à temps plein. Je n’en ai pas besoin. Mon mari et moi faisons ce travail à la maison tous les jours». Un autre journaliste lui ayant posé la question : «Qui lave vos vêtements, vous ou votre mari ? » s’entendit répondre «Je range les vêtements, et mon mari fait fonctionner la machine à laver généralement la nuit, parce que l’électricité est disponible à ce moment-là et qu’il n’y a pas trop de pression dessus dans l’immeuble où se trouve notre appartement. Nous estimons qu’il est important de tenir compte aussi de nos voisins et de la gêne que nous risquerions de leur imposer bien que le mur qui sépare notre appartement de celui des voisins est épais». Avant d’ajouter ironiquement: «Je m’attendais à ce que vous me posiez des questions sur les succès et les échecs de mon travail au sein du gouvernement mais je me rends compte que vous êtes plus intéressés par ces problèmes domestiques».
Ce n’était pourtant pas sans intérêt car on a pu ainsi apprendre que celle qui a présidé aux destinées de la première puissance économique d’Europe occidentale a toujours vécu dans un appartement normal presque comme un allemand lambda. Un appartement qu’elle habitait avant d’être élue chancelière (premier ministre) de l’Allemagne et qu’elle n’a jamais quitté tout au long de ses 18 ans à la tête du pays. Qu’elle ne possède pas de villa cossue, d’une flopée de domestiques, de piscines ou de jardins est un bel exemple pour bon nombre de dirigeants de pays africains dont le train de vie fastueux contraste étrangement avec l’immense misère dans laquelle croupissent leurs peuples et qui continuent à considérer la sobriété et la frugalité comme une inacceptable humiliation.
J.M.
UNE GOUVERNANCE EXEMPLAIRE : Angela Merkel : une ovation méritée
