Dans les années 60, Patrice Emery Lumumba avait parié sur la démocratie parlementaire mais à la suite d’une pirouette sponsorisée par des hommes d’influence belges et américains, Mobutu et sa soldatesque instaurèrent une dictature parmi les plus cruelles du continent.
Mzee Laurent Désiré Kabila a voulu, à son tour, instaurer une démocratie populaire, mais des mercantilistes occidentaux, toujours les mêmes, et leurs relais locaux dans la région l’ont assassiné.
Joseph Kabila son successeur a fait à nouveau le pari de la démocratie parlementaire en en instaurant les fondamentaux qui ont permis la tenue des premiers cycles électoraux réguliers respectivement en 2006, 2011 et 2018, la dernière aboutissant même à une alternance pacifique et démocratique au sommet de l’Etat qui a vu arriver au pouvoir Félix Tshisekedi, leader de l’opposition radicale. Certes, comme les expériences précédentes, celle de Joseph Kabila n’a pas été sans défauts, mais elle fut prometteuse à plus d’un titre. Toutes choses restant égales par ailleurs, aucun gouvernement congolais, auparavant n’a obtenu de tels résultats en terme de croissance économique, de redistribution des richesses, de recul de la pauvreté et de maîtrise par les Congolais de leur destin. La RDC a propulsé son armée dans le top 10 des forces africaines. Or ces avancées significatives dans les secteurs de transport, des assurances, de l’énergie et des finances publiques grâce au boom minier avec la promulgation du nouveau code minier sont précisément des faits qui ont accentué le désamour de certains occidentaux contre le quatrième président rd congolais.
Assoiffés de vengeance, quelques officines suprématistes de l’hémisphère Nord de la planète qui sont à la manœuvre tiennent à interrompre coûte que coûte cette expérience progressiste favorable aux Congolais mais qui réduit leurs marges exorbitantes de profits.
Alors que la majorité parlementaire du FCC avec qui il a signé en 2019 un accord de coalition lui était acquise en dépit de quelques malaises, le président Tshisekedi a annoncé le 2 novembre des consultations en vue de refonder l’action gouvernementale sur les ruines de l’ordre institutionnel voulu par le peuple souverain au terme des élections générales du 30 décembre 2018. Subséquemment, une épreuve de force se profile entre lui et son prédécesseur. Elle n’est certainement pas dans l’intérêt des Congolaises et des Congolais. «Si l’ambassadeur des États-Unis ne cesse d’exiger que l’ex-président Kabila soit totalement mis sur la touche, les Européens, ayant financé les observateurs électoraux et sachant mieux que personne dans quelles circonstances Tshisekedi est arrivé au pouvoir, auront vraisemblablement plaidé pour la modération et le réalisme», indique à ce sujet Colette Braeckman du quotidien belge Le soir dans un article intitulé «Tshisekedi bute sur l’écueil kabiliste».
Le président Tshisekedi serait bien inspiré par ces conseils de sagesse qui viennent pour une fois d’outre-Méditerannée car, à ce stade, la dissolution de l’Assemblée nationale s’avère impossible sinon irréaliste. La convocation d’élections législatives serait extrêmement onéreuse pour une économie sinistrée notamment par la pandémie à Covid-19. Quant aux débauchages par la corruption de députés fidèles à Kabila pour la création d’une nouvelle majorité, elle se heurte à des obstacles majeurs pouvant déboucher sur des conflits aux conséquences imprévisibles pour la stabilité du pays et la crédibilité du président qui doit accéder à la présidence tournante de l’Union africaine en 2021.
Les errements vers lesquels les hommes d’influence étrangers et nationaux entraînent Fatshi risquent de le mener vers d’insondables abysses. Comment ces agitateurs peuvent-ils imaginer que des alliés étrangers pourraient mieux prendre en charge les intérêts d’un leader congolais mieux que son propre peuple qui lui a octroyé le pouvoir ? A la fin des consultations présidentielles, il est clair que le FCC a résisté aux menaces et tentatives de corruption. Cette loyauté n’est pas le fruit du hasard : Kabila l’a construite par la conviction qu’il a su inocculer à ses partisans qu’il était homme de parole.
A l’orée du retour à l’autocratie
Plusieurs voix s’élèvent désormais pour dénoncer les dérives dictatoriales à Kinshasa sur fond de tribalisme. Il y a deux semaines, Augustin Kabuya, le n°2 de l’UDPS menaçait carrément de mort des membres du FCC, scandalisant les Nations-Unies et des associations civiles qui l’ont vertement condamné et réclamé en vain des poursuites judiciaires contre lui.
Mais, Barnabé Milinganyo, un analyste politique ‘’libre penseur’’ réputé pour son franc-parler même contre Kabila, a été lourdement condamné par des juges du TGI de Kinshasa/ Gombe pour outrage et menace de mort après avoir émis l’hypothèse d’ennuis qui arriveraient au président Tshisekedi s’il persistait dans la voie dans laquelle «la légèreté de son entourage l’entraîne». La flagrance périmée plus de trois jours après les faits a servi de couverture à un scénario écrit d’avance par… Augustin Kabuya qui continue de menacer impunément de mort ceux qui ne pensent comme lui.
Autant que l’interpellation de l’artiste Tshala Muana, la condamnation de Milinganyo pose la question de la liberté d’expression depuis l’alternance démocratique de janvier 2019.
L’instrumentalisation de la justice pour broyer toute voix discordante semble enclenchée.
Cette haine que l’on s’amuse à semer dans la communauté nationale ne sera pas sans suites sur la cohésion nationale et le développement du pays. Milinganyo n’est pas le seul à se livrer à des analyses au vitriol contre un leadership présidentiel jugé trop sectaire et peu clivant. De plus en plus de Congolais qui ont goûté aux délices de la liberté se lèvent contre la caporalisation assumée par le pouvoir actuel. Gare au retour de la manivelle qui risque d’ébranler les fausses certitudes d’un groupe d’excités ivres de la place dominante qui est la leur aujourd’hui.
A.M
PROCES POUR OUTRAGE AU CHEF DE L’ETAT : Recul démocratique constant
