Rhétorique belliqueuse, bisbilles et passe d’armes entre le gouverneur de la ville province de Kinshasa, le PPRD Gentiny Ngobila Mbaka et le vice-premier ministre de l’intérieur et sécurité l’UDPS Gilbert Kankonde autour des travaux de réhabilitation du marché central de Kinshasa dit «Zando» choquent l’opinion publique. Entre l’intervention du chef de la territoriale nationale en faveur de Safricom Sarl, bénéficiaire d’une concession au marché central de Kinshasa et l’insistance pour le moins diplomatique du chef de l’exécutif provincial de Kinshasa de poursuivre le partenariat avec cette entreprise gérée par des sujets libanais dans la poursuite des travaux de rénovation de Zando, laisse tout observateur pantois.
Le nœud du problème !
Le 13 juin 2005 la société Safricom avait signé une convention de concession avec la ville de Kinshasa aux termes de laquelle elle avait l’obligation d’effectuer des aménagements dans le marché central en vue d’une exploitation optimisée de ce lieu de négoce qui était devenu un foutoir, un dépotoir où les marchands opéraient étouffés dans un environnement envahi par des constructions anarchiques jusque sur les rues adjacentes. Ces constructions pour la plupart sont érigées par le concessionnaire sur la voirie urbaine, occasionnant des inondations dans le secteur.
L’état du marché était d’autant plus délétère que les nouvelles autorités urbaines ont jugé qu’il nécessitait des mesures urgentes. Le nouveau gouverneur Gentiny Ngobila a ainsi pris l’engagement d’assainir ce lieu à travers une campagne de salubrité de la ville dénommée «Kin Bopeto», lancée en grande pompe par le chef de l’Etat.
Fort de cet engagement, Ngobila qui ne voulait plus de projets inachévés ou bâclés, décide de résolier le contrat signé une quinzaine d’années plus tôt entre Safricom et le gouvernement provincial précédent au motif que cette entreprise n’avait pas rempli sa part du contrat, se référant à l’article 20 de la convention signée entre les deux parties. «Mais comme on l’a vu dans sa dernière correspondance adressée au gouverneur de la ville de Kinshasa, le ministère de l’intérieur évoque des décisions de justice pour intervenir de manière hiérarchique comme s’il était question d’une simple matière administrative à compétence partagée, alors qu’il s’agit en fait d’une péripétie judiciaire dans laquelle la ville défend l’intérêt public. Ce faisant, l’autorité territoriale nationale fait fi de la loi organique n° 08/012 du 31 juillet 2008 portant principes fondamentaux de la libre administration des provinces et apparaît dans le rôle incongru et fâcheux du défenseur des intérêts privés… », fait remarquer Charles Kabuya, un haut fonctionnaire de l’administration publique de Kinshasa. Pour qui, les décisions du tribunal de commerce de Kinshasa étaient entachées de plusieurs irrégularités, mais qui au fond, ne remettent pas en question le bien-fondé de l’exécutif de la ville à mettre fin à une convention au nom de l’intérêt public. Par ailleurs, les termes du référé-liberté évoqués sont en contradiction avec le fait même que la société Safricom, appartenant à des sujets étrangers, bénéficie d’une convention de concession juteuse avec la ville de Kinshasa alors que la réciprocité n’est pas certaine ailleurs pour les Congolais.
Contrairement à ce que laisse entendre le VPM de l’Intérieur, Safricom Sarl n’est pas une société étrangère devant bénéficier de certaines exonérations prévues dans le code des investissements congolais mais bien une entreprise de droit congolais. Le fait qu’elle soit dirigée par des sujets étrangers ne lui confère cependant pas un caractère d’extranéité. «Il est clair que l’invocation des motifs chargés d’arrière-pensées sur un éventuel abus de pouvoir ou une discrimination fondée sur l’origine des opérateurs économiques ne serait que fallacieuse», a renchéri Charles Kabuya.
Que veut au juste Ngobila ?
L’objectif visé sur ce dossier par le chef de l’exécutif provincial est l’intérêt général. Le Grand marché est devenu un dépotoir, une honte en plein centre de la capitale, à tel point que ces dernières années beaucoup ont appelé à ce qu’il soit rasé.
« Un seul individu ne peut pas bloquer la modernisation d’une infrastructure aussi importante juste pour préserver ses propres intérêts, qui ne profitent d’ailleurs qu’à lui-même, car la ville n’en tire aucun profit alors que les besoins financiers de la capitale sont immenses. On pourrait même considérer que la ville est spoliée depuis 15 ans par le truchement d’un contrat manifestement léonin, et par-dessus tout mal exécuté par le concessionnaire », a-t-il conclu.
La réhabilitation envisagée du marché central de Kinshasa rencontre les attentes des kinois qui veulent voir cet espace situé au cœur du quartier des affaires assaini et exploité dans l’intérêt de tous. Butée à une propagande aussi insidieuse que pernicieuse, l’action du gouvernement provincial est moins comprise par le patron de la térritoriale alors qu’elle devrait s’inscrire dans une dynamique de modernisation. On ne peut pas comprendre que le VPM puisse apporter son soutien à Safricom alors que cette dernière, en dépit du contrat signé avec la ville n’a jamais amorcé un quelconque début des travaux de réhabilitation du marché central de Kinshasa qui demeurre toujours dans la crasse autant que les bâtisses à l’intérieur sont délabrées.
AM