Les opinions émises dans cette rubrique n’engagent que leurs auteurs
Depuis l’arrestation de l’honorable Vital Kamerhe, nous lisons beaucoup de textes controversés, preuve de la liberté de pensée et d’expression garantie par notre constitution (…).
A) Certains, notamment parmi ses partisans de l’UNC qui pensent que cette arrestation a pour but d’assombrir le casier judiciaire de Kamerhe pour l’écarter de la course du 2023 ;
B) D’autres estiment que c’est juste un jeu de Fatshi et son allié pour distraire la population et qu’en fin de compte, l’affaire sera sans suites ;
C) D’autres enfin sont d’avis que c’est une bonne chose pour l’Etat de droit que le président avait promis lors de sa campagne. Ils l’encouragent à continuer avec la même allure jusqu’aux membres de l’ancien régime.
Pour y voir clair, il importe de savoir pourquoi et comment les poursuites contre VK ont été enclenchées ?
C’est le directeur général (révoqué depuis) de la Rawbank, Thierry Taeymans qui, après avoir été arrêté pour complicité de détournement de deniers publics, qui, après avoir remboursé les fonds versés dans cette banque et avoir perdu son poste, a déposé plainte à son tour contre Vital Kamerhe qu’il considère responsable de ses malheurs, en tant que donneur d’ordre. Le patron de Safricas, Eric Blattner, attributaire du marché des sauts-de-mouton et le commerçant libanais Jamal Samih exécutant de projets des maisons préfabriquées eux aussi incarcérés pour présomption de détournement ont joints d’autres pièces compromettantes sur la gestion par le Dircab du chef de l’Etat des fonds alloués à ces projets.
On ne voit pas en quoi cela concerne le président de la République ou son parti.
Il faut que les Congolais vivent maintenant avec l’idée d’un pouvoir judiciaire indépendant de l’exécutif. Le parquet peut inviter n’importe quel Congolais, même le directeur du cabinet présidentiel. Formatés mentalement par des décennies de dictature depuis la deuxième République, beaucoup ne peuvent pas imaginer qu’un un dircab du président soit interpellé par le ministère public. Il ne faut donc pas nécessairement voir une « main noire » derrière cette affaire car le parquet qui a reçu des dénonciations crédibles ne pouvait pas rester les bras croisés.
A ceux qui estiment que M. Kamerhe étant directeur du cabinet du chef de l’Etat ne peut être responsable seul de ses actes (Lamuka), il faut rappeler que la responsabilité pénale d’une infraction est toujours individuel dans un Etat de droit. En outre, nul n’est excusable pour avoir exécuté un ordre manifestement illégal. A lui de dénoncer et prouver…
Du reste comment Fatshi pouvait-il lancer ce projet emblématique de 100 jours essentiel pour sa propre visibilité et détourner les fonds qui y ont été alloués alors qu’il aurait pu ne pas lancer ces travaux et s’emparer de ces fonds car personne ne lui avait demandé de les lancer ?
Après avoir parlé, regretté, critiqué nos dirigeants sur l’affaire de 15 millions de dollars volatilisés en « rétro-commissions », il ne faut pas que certains compatriotes essayent hypocritement de couvrir de telles pratiques de malversations. Lorsqu’on a invité M. Kamerhe, la plupart étaient dubitatifs estimant que c’était une mascarade. Quand le procureur l’a placé sous mandat d’arrêt provisoire pour les besoins de son enquête, ils affirment que Fatshi l’a trahi, qu’ils « bouffaient ensemble » etc. Au point qu’on se demande finalement si on ne veut pas à la fois une chose et son contraire : la justice et l’impunité des délits et des crimes. Un grand peuple ne doit pas être aussi versatile.
La justice est apolitique et indépendante et doit le demeurer. Dépassons nos émotions et sentiments partisans ou communautaires et cessons de faire croire qu’il y a en RDC des gens qui soutiennent ceux qui détournent les deniers publics. M. Vital Kamerhe jouit jusqu’à preuve du contraire de la présomption d’innocence et des droits de la défense.
Isaac kabundi (Ingénieur)