La cascade de manifestations publiques de protestation initiée par le Comité Laïc de Coordination (CLC), lancée lundi 21 octobre 2019 dans les rues de la capitale rd congolaise, n’a pas tenu la route. Pas du tout, malgré tout le renfort de publicité et de soutiens politiques de tout ce qui entend se réclamer de l’opposition au pouvoir en place en RDC. La gravité des motivations avancées par les organisateurs, la lutte contre la corruption et le détournement des 15 millions de rétrocession et la démission des juges de la cour constitutionnelle, n’aura manifestement pas suffi pour mobiliser les âmes kinoises accaparées par des préoccupations plus existentielles. Il n’y a même pas de contestation sur la question : la marche du CLC du 21 octobre n’en fut nullement une, quoique son principal initiateur, l’historien Isidore Ndaywell, ait voulu s’en défendre au terme d’une prestation plutôt piètre. Un communiqué du Commissariat provincial de la Police Nationale fixe les esprits : « Malgré les nombreux itinéraires pris par les marcheurs, tout s’est déroulé dans le calme et le respect de l’ordre public. Le Commissaire principal félicite les Kinoises et les Kinois qui ont pris part à cette marche pour la discipline dont ils ont fait montre pendant le déroulement de cette activité », écrit le Général Sylvano Kasongo, qui félicite également les éléments de la PNC chargés de l’encadrement. Ils s’étaient tournés les pouces, comme on dit. Isidore Ndaywell et ses amis de la nébuleuse politique de l’archidiocèse de Kinshasa avaient pourtant vu les choses en grand, en très grand même. En faisant partir les manifestants du jour de toutes les paroisses de l’immense capitale de la RDC vers une douzaine de points de ralliements. Mais rien n’y a fait. Le cœur n’y était pas. Il n’y est pas encore, un peu moins de 10 mois après l’accession au pouvoir d’Etat d’un acteur majeur de l’opposition politique que la même église catholique semblait soutenir becs et ongles il y a moins d’un an.
Pas plus d’une vingtaine de manifestants
Sur les artères kinoises, lundi 21 octobre, nul n’a aperçu plus d’une vingtaine de manifestants à la fois (dans les meilleurs des cas). Au lieu de ralliement de de l’Hôpital catholique de Monkole à Mont Ngafula, il n’y avait pas âme qui vive jusqu’à 9 h 30, ni banderoles, ni calicots pestant contre le détournement de 15 millions USD. Personne ne s’était empressé pour dénoncer l’impunité, non plus. Une situation qui était loin d’être exceptionnelle, puisque plus loin de là, à la place Pompage dans la même commune mais vers l’ancien cimetière de Kinsuka et le site kimbanguiste de Lutendele, les manifestants se faisaient toujours attendre alors que les aiguilles des montres titillaient les 11 h 00, cet avant-midi. Même à l’autre bout de la ville, Place Ste Thérèse dans la commune de Ndjili, les manifestants pourtant rodés par les nombreuses sorties publiques organisées par Martin Fayulu Madidi ne se sont pas rués devant la tribune érigée pour la circonstance. Jusqu’à 10 heures, l’ambiance était des plus moroses, à peine une quarantaine de personnes, selon les estimations les plus optimistes, qui ont tôt fait de se disperser sans attendre le démarrage de la manifestation.
Places de l’Echangeur et des Artistes
Ce n’est que place de l’Echangeur à Limete et Place des Artistes à Matonge, qu’un semblant de manifestation a été observé. A Limete, seulement une dizaine de personnes étaient au rendez-vous du CLC à 10 heures, alors qu’y étaient attendus des manifestants en provenance des paroisses de Matete, Kisenso, Lemba et Limete. Elles s’encourageaient à qui mieux mieux aux sons d’une fanfare tonitruante, arborant banderoles et calicots exigeant le remboursement des 15 millions USD et fustigeant le manque d’intégrité des juges de la cour constitutionnelle. Place des Artistes à Matonge dans la commune de Kalamu, les manifestants du CLC (environ une centaine) conduits par Isidore Ndaywel en personne ne sont arrivés que vers 11 heures. Pour entendre Hervé Diakiese lire le mémo rédigé pour la circonstance, qui assurait que « nous avons marché pour dire que le Congo est un bien à nous tous. Il n’est pas la propriété privée d’un groupe de privilégiés qui auraient tous les droits de s’accaparer et de jouir impunément de toutes les richesses du pays (…) ». Et encore que «cette croisade ne s’arrêtera pas que tant que la RDC demeurera le paradis de la corruption, de l’impunité et de l’injustice». En attendant ces échéances infernales, les laïcs catholiques n’auront même pas réussi à approcher le purgatoire. Faute d’adhérents à la croisade.
J.N.