Le sinistre survenu sur Avenue des Forces Armées dans la commune de la Gome, mercredi 12 décembre 2018, est des plus sérieux et lourd de conséquence, même s’il ne perturbera pas outre mesure le processus électoral qui dans 9 jours, atteindra son ultime étape. Alors que l’UE, notamment, vient de prolonger les sanctions prises à l’encontre d’un groupe de responsables politiques en RD Congo pour entraves au processus électoral, l’incendie des entrepôts de la CENI révèle que les sorciers ne sont peut-être pas ceux que l’on a incriminé.
Ce n’est un secret pour personne en RD Congo : la coalition katumbiste renforcée par les candidats invalidés à la présidentielle du 23 décembre 2018, Jean-Pierre Bemba Gombo et Adolphe Muzito, ainsi que de nombreux autres acteurs politiques devenus opposants au régime pour une raison ou une autre, œuvre à l’instauration d’une nouvelle période de transition politique en RD Congo. Et joue des pieds et des mains pour torpiller le processus électoral. Désigné « candidat unique » de cette frange de l’opposition politique rd congolaise, Martin Fayulu Madidi, en campagne insurrectionnelle plus qu’en campagne électorale depuis le 5 décembre courant, n’a eu de cesse d’inciter à la révolte le jour du vote en exhortant les populations à s’opposer à la machine à voter et à exiger le bulletin papier. Faute de quoi elle devrait « se prendre en charge ». Au lancement de sa « campagne électorale » dans la région perturbée de Beni au Nord-Kivu, le candidat Lamuka a invité la population à ne pas permettre le déploiement des machines à voter. Carrément.
Jeudi 13 décembre 2018 à Kinshasa, aussitôt la nouvelle de l’incendie des entrepôts de la CENI parvenue à l’opinion, les yeux se sont naturellement portés vers les adversaires du processus électoral en cours. Dans un communiqué extrêmement explicite, le coordonnateur du Front Commun pour le Congo (FCC), Néhémie Mwilanya Wilondja, a accusé Martin Fayulu et la coalition Lamuka d’avoir perpétré le forfait de l’avenue des Forces Armées. Après que Henri Mova Sakanyi, le vice-premier ministre et ministre de l’Intérieur eut déclaré à la presse que l’incendie était vraisemblablement d’origine criminelle. Tout en assurant l’opinion de la poursuite du processus électoral selon le calendrier arrêté par la centrale électorale.
Autre réaction dans la famille politique kabiliste, celle Barnabé Kikaya Bin Karubi, le conseiller diplomatique de Joseph Kabila. Dans un posting sur son compte tweeter, jeudi 13 décembre 2018 à 5 h 30, annonce l’«incendie criminel du dépôt central de la CENI. 7.000 Mavs, urnes et isoloirs calcinés. Les ennemis de la démocratie passent à la vitesse supérieure. Coup d’épée dans l’eau. Solutions de rechange disponibles ».
Chez les radicaux de l’opposition, les réactions fusent en forme de fuite en avant et de contre-accusations à la limite du mensonge grossier. Sur les réseaux sociaux, le tweet de Barnabé Kikaya est antidaté et falsifié : il aurait été posté plusieurs heures avant le sinistre, prétendent ses détracteurs qui l’accusent ainsi de préméditation criminelle. Mais l’affaire ne tient pas la route. L’original du posting faisant foi.
Dans un point de presse, le même jeudi à Goma, Martin Fayulu verse dans les mêmes accusations que d’aucun à Kinshasa et en provinces, qui l’ont vu à l’œuvre ces derniers, jugent farfelues. «Le camp Kabila ne veut pas organiser les élections. Ils ont trouvé des subterfuges de type machine à voter, 10 millions de fictifs. Nous l’avons dénoncé, ils nous ont poussé à bout, ils pensaient que nous allions boycotter les élections comme le président Tshisekedi l’avait fait en 2006. Nous avons dit non. Le mot boycott n’est pas dans notre vocabulaire. Nous l’avons dit clairement. Et nous avons souligné que nous n’accepterons pas les élections chaotiques. Et ils sont vu que nous faisons la campagne, nous invitons la population à aller voter le 23 décembre, puis aujourd’hui il y a incendie de l’entrepôt pour nous dire qu’ils ne sont pas prêts à organiser les élections ». Une diatribe pour la consommation extérieure, selon la plupart d’observateurs. Qui notent qu’en fait de campagne électorale, les affiches du candidat Lamuka à la présidentielle du 23 décembre 2018 sont déjà si peu visibles. A Kinshasa comme partout à travers l’immense RD Congo. Des élections, la caste politique genevoise n’a jamais voulu. C’est connu.
J.N.