Désigné candidat unique de 5 leaders de l’opposition à l’issue du conclave de Genève, le 11 novembre 2018, Martin Fayulu est rentré à Kinshasa par l’aéroport international de Ndjili dix jours plus tard, le 21 novembre 2018. Un retour voulu en fanfares, qui a plutôt révélé aux observateurs l’ampleur de la tâche qui reste à accomplir par le candidat de la nouvelle plateforme « Lamuka ». Le moins qu’on puisse affirmer est que rien n’est acquis, pour Fayulu lui-même, mais aussi pour ses nouveaux alliés, Jean-Pierre Bemba Gombo et Moïse Katumbi. Et encore moins, pour ceux qui à Kinshasa et dans les contrées tribales de l’ex Bandundu croient pouvoir compter sur le «soldat de Bemba et Katumbi ». L’affaire est plus compliquée, en réalité.
Pour rassembler foules à l’occasion de son retour à Kinshasa et faire figure de leader incontestable au même titre que Vital Kamerhe ou Félix Antoine Tshisekedi, le candidat unique de Genève a dû user de subterfuges, comme son nouveau mentor Moïse Katumbi plusieurs mois avant lui. En annonçant avec fracas que les autorisations d’atterrissage du jet qui devait le ramener chez lui n’avaient pas été accordées. En réalité, beaucoup le savaient à Kinshasa, il ne semble pas que Martin Fayulu ait loué quelque jet que ce soit, puisque le candidat unique de Genève n’avait jamais annulé sa réservation sur un vol ordinaire en partance sur Kinshasa dans une compagnie aérienne internationale bien connue. « L’affaire du jet privé interdit d’atterrissage, c’est pour fixer l’opinion sur un cas qui n’en valait pas la peine », explique au Maximum un cadre de la RVA, agacé par les calomnies à répétition contre l’entreprise.
5000 combattants à l’accueil : les parrains n’ont pas bougé
Mais le subterfuge n’a pas tenu toutes les promesses, puisqu’à l’accueil de Fayulu le 21 novembre dernier, seulement quelque 5 mille combattants de tous les partis politiques de Lamuka réunis avaient pu être mobilisés (chiffres de la police). A grand renfort de « primes de transport » comme tout le monde à Kinshasa. Derrière le nouveau candidat unique, il n’y a pas encore affluence. Certainement pas autant qu’à l’occasion du retour triomphal de Jean-Pierre Bemba, quelques mois plus tôt. Mercredi 21 novembre 2018, c’est à peine si les combattants du MLC étaient visibles devant la tribune pourtant érigée juste en face du siège du parti sur Avenue de l’Enseignement à Kasavubu.
Il n’y a donc pas eu de cadeau en termes de combattants de la part des nouveaux parrains du candidat de la Dynamique de l’opposition à la présidentielle 2018. Probablement parce qu’il n’en faut pas, raisonnablement, pour jouer au faire-valoir. Ce que Katumbi et Bemba attendent de leur soldat, ce n’est pas de se muer en leader populaire incontestable, c’est de faire capoter la présidentielle de décembre prochain et ouvrir la voie à l’organisation de nouvelles élections d’ici deux ans pour leur permettre de revenir aux affaires.
Faire avec dans la confusion régnante
En attendant ces échéances peu enthousiasmantes, Fayulu doit faire avec. Y compris cette confusion sans commune mesure au sujet de la participation aux prochaines élections. Au sein de la plateforme née à Genève, Lamuka, tous les candidats sauf Martin Fayulu lui-même, se sont effectivement réveillés et apprêtent leurs matériels de campagne électorale. Avec ou sans la machine à voter, dont personne ne parle vraiment plus, d’ailleurs. Sur un tweet, le 25 novembre 2018, le candidat unique de Genève exhortait encore ses sympathisants à se rendre aux urnes le 23 décembre 2018 « pour glisser dans l’urne le bon bulletin, sans utiliser la machine à voter ». Un appel à l’abstention qui passe mal, même dans sa nouvelle plateforme électorale. « Ce sera compliqué de dire à mes électeurs de glisser un bulletin pour moi et de jeter l’autre, celui de mon candidat à la présidentielle », explique ce cadre de l’AMK (Alliance des Mouvements Kongo), candidat à la présidentielle à Kinshasa.
Dans ces conditions, des voix s’élèvent, insistantes, qui exhortent Martin Fayulu à se défaire des liens de Genève. Au nom de Dieu le Père et de la tribu. Et à se présenter aux votes, avec ou sans la machine à voter. Pour ne pas laisser se disperser celles des troupes qui lui sont encore acquises, même si elles ne sont encore que tribales et bandundoises. Comme aux précédentes élections, en 2006 et en 2011.
J.N.