En RD Congo, les jours s’égrènent avec la régularité d’une horloge suisse vers les scrutins combinés présidentielle, législatives nationales et provinciales. Le doute est de moins en moins permis, en raison principalement du strict respect du calendrier électorale rendu public voici presque un an, le 5 novembre 2017. Mais surtout, sans doute, de la détermination affichée par les électeurs, 40.224.897 exactement, qui se sont valablement inscrits sur les listes électorales et attendent exercer sereinement leur droit de choisir souverainement ceux qui prétendent présider à leurs destinées pour les 5 années à venir. Le regain de pessimisme électoral induit par un groupe d’acteurs politiques hostiles aux scrutins prévus en décembre prochain paraît désormais voué à un échec cuisant, du fait des défections qui s’observent parmi eux, ainsi que s’y attendaient les observateurs du reste les plus avertis. « En RD Congo, c’est la grande majorité des électeurs qui traîne le reste des parties prenantes au processus vers les urnes et non le contraire. Les vociférations d’opposants manifestement peu désireux de voir les scrutins se tenir tentent d’inverser la tendance mais n’y parviennent pas parce qu’elles sont tardives », analyse cet animateur d’une ONG spécialisée en matière électorale, qui s’est confié aux rédactions du Maximum.
On prend ceux qui en veulent, on fonce
A un mois du lancement de la campagne électorale prévue le 22 novembre 2018, on se trouve littéralement à une étape de non-retour. « On prend ceux qui en veulent et on fonce », dit-on dans les couloirs de l’administration électorale où sont mises les bouchées doubles pour éviter de faire capoter un processus rondement mené, jusque-là. La Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) semble en effet plutôt en avance sur ses propres projections calendaires, avec la combinaison d’opérations de formations d’agents et de déploiement des matériels électoraux deux mois avant les scrutins.
Après le recrutement des agents électoraux, la centrale électorale a lancé le 18 octobre 2018 l’opération de validation des supports destinés à la formation des membres des bureaux de vote et de dépouillement, qui passeront par des cascades de formation avant d’être confrontés aux réalités électorales en décembre prochain. Ici, point de slogan, comme chez les politiques. Une simulation de bureau de vote a été organisée sous la supervision du secrétaire exécutif national de la CENI, Me Ronsard Malonda, afin que tous s’imprègnent du fonctionnement d’un bureau de vote et de dépouillement (BVD), d’un centre de compilation de résultats (CLCR), ainsi que le rôle dévolu à chacun des membres de ses structures opérationnelles.
Durant 3 jours, du 17 au 19 octobre au Kempisky Hôtel de Kinshasa, 140 experts techniciens de la centrale électorale ont été formés par les ingénieurs Sud-Coréens de Miru Sytems, le fabriquant des désormais célèbres machines à imprimer les choix des électeurs. Ici aussi, pas de balivernes. La formation axée sur le software, le hardware et la transmission des données de la machine dite à voter fut strictement technique et destinée à prévenir les problèmes qui peuvent survenir au moment des votes. Le groupe de techniciens formés s’attèlera à son tour à la formation de quelque 25.000 autres techniciens à déployer sur toute l’étendue du territoire national. Objectif visé : atteindre un taux de 99,9 % de bon fonctionnement des machines à voter.
Rien n’est laissé au hasard
A la CENI, rien n’est à minimiser, manifestement. « Nous allons au combat pour la démocratie, les élections et pour la RD Congo. Le maître-mot, c’est les élections le 23 décembre 2018. C’est l’occasion solennelle de rappeler à ceux qui doutent encore que le train des élections n’est plus à la gare. Il avance conformément à notre calendrier électoral. Ce premier maillon d’appui technique est à présent formé et prêt à être déployé. A former à leur tour et à répondre à tous les problèmes techniques de la machine à voter. La CENI en est fière ainsi que la RD Congo. Après le 23 décembre 2018 nous allons conquérir l’Afrique et pourquoi pas le monde avec notre technologie électorale », a doctement déclaré Corneille Nangaa, le président de la CENI, aux techniciens nouvellement formés.
Même si la plupart des critiques émises contre la machine à voter n’ont pas brillé par leur pertinence, la centrale électorale accorde une attention particulière à bien expliciter à tous le caractère incontournable du recours à cette innovation d’ordre pratique introduite dans le système électoral rd congolais. La CENI s’est ainsi assurée de l’accompagnement des techniciens de Miru Systems pour en garantir le succès, même s’il est noté avec satisfaction que des premiers exemplaires de la machine à voter déployés sur le terrain depuis plusieurs mois maintenant, aucune n’est encore tombée en panne. Et, dans deux localités de la RD Congo, à Kenge dans la province du Kwilu et à Kimvula dans la province du Kongo Central, des expériences de vote grandeur nature sur une population non initiée à la machine à voter ont permis à 635 électeurs d’accomplir leur devoir civique en 11 heures seulement. Durant l’exercice, seule la batterie intégrée conçue pour assurer l’autonomie fonctionnelle de la machine à voter a été utilisée … à seulement 30 % de sa consommation.
Machine à voter : impossible retour en arrière
Parce qu’au sujet de cette machine à voter sur laquelle les opposants au calendrier électoral en vigueur ont cristallisé les débats ces derniers jours en RD Congo, c’est aussi l’irrémédiable point de non-retour. Les Sud-Coréens de Miru Systems ont pratiquement déjà tout livré à la CENI qui s’affaire au déploiement des engins à travers le territoire national conformément à une technique déjà éprouvée. Rien n’est laissé au hasard, à en juger par les déclarations des spécialistes en la matière qui ne se recrutent qu’au sein de l’administration électorale, quoique prétendent quelques acteurs politiques en RD Congo.
Au week-end dernier, quelque 35.500 de ces machines étaient déjà réceptionnées par la CENI. Un lot était attendu au port Kenyan de Mombassa, lundi 22 octobre, qui est destiné aux hubs des provinces de l’Est du pays, a révélé Corneille Nangaa le 19 octobre au Kempisky Fleuve Congo Hôtel de Kinshasa. « Le transport a commencé et les arrivages sont bien programmés », a-t-il assuré. Dans l’ensemble, 107.000 machines à voter sont attendus en RD Congo pour 80 à 90.000 bureaux de vote.
Processus financé à 70 %
Le financement du processus électoral, lui non plus, ne devrait pas poser de problème. Puisqu’il ne reste que 122 millions USD à verser à la CENI par le gouvernement sur les quelque 440 millions USD sollicités par la centrale électorale pour l’exercice budgétaire 2018. C’est ce qui ressort de la réunion interinstitutionnelle présidée par le président de la République, vendredi 19 octobre 2018 à Kinshasa, dont il ressort que le taux de décaissement en faveur de l’administration électorale a atteint plus de 72 %.
De la Chine ont déjà été réceptionnés 111 containers de kits BVD, d’isoloirs, d’urnes et d’encre indélébile. De l’Inde 15 containers de panneaux solaires pour antennes sont attendus à Matadi le 28 octobre 2018. Sans compter les engins qui serviront au déploiement du matériel électoral, camions, hélicoptères et avions gros porteurs, dont la réception était prévue samedi 20 octobre 2018.
De quoi persuader les plus pessimistes parmi les acteurs politiques, qui ont décidé de se réunir prestement pour tenter de se mettre en ordre de bataille. Une réunion de certains leaders de l’opposition politique est prévue en Afrique du Sud dès ce 23 octobre 2018, qui discutera de la cohésion dans les rangs et de la fameuse candidature unique à présenter à la présidentielle 2018. Même si les divisions internes, qui ont resurgi ces derniers jours, n’incitent guère à l’optimisme. Mais mieux vaut tard que jamais, sans doute.
J.N.