Jeudi 30 août 2018 à Kinshasa, la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) a convié la presse à une séance d’informations présidée par son vice-président, Norbert Basengezi Katintima.
Pour une séance d’informations, c’en était une, et pas des moindres. C’est le moins que l’on puisse soutenir. Pas une phrase n’est sortie de la bouche du vice-président de la CENI qui n’ait apporté une information plus ou moins inconnue de l’opinion. Jeudi, chevaliers de la plume et du micro en ont eu pour leurs frais, s’ils en ont engagé, et découvert à quel point le processus électoral qui tend vers son terme en RD Congo a été enfoui dans un épais brouillard. De la part de tous les intervenants, mais surtout des acteurs politiques et des partenaires, ceux de la fameuse communauté internationale y compris, qui gavent l’opinion de langage de bois.
Le lecteur trouvera ci-après le texte intégral de la communication de Norbert Basengezi à la presse, pour en juger personnellement. Même si on peut relever l’un ou l’autre information saillante, qui aurait dû être portée à la connaissance de l’opinion depuis belle lurette.
S’agissant du financement du processus électoral, par exemple, il parait surprenant d’apprendre que depuis le lancement des opérations électorales avec l’enrôlement des électeurs, quoique bénéficiant de la collaboration des experts internationaux via la MONUSCO, qui travaillent à la CENI même, l’administration électorale n’a jamais reçu le moindre sou. Le gouvernement a tout financé, à l’exception d’un soutien logistique qui a consisté à acheminer du matériel du port de Mombassa en RD Congo.
Au sujet de la crédibilisation du processus électoral à travers la supervision des opérations par l’accréditation des témoins, on apprend sans surprise, puisque la mission d’audit conduite par l’Organisation Internationale de la Francophonie l’avait relevé, que les partis politiques pourtant si prompts à la critique n’ont pas accrédité le moindre témoin.
Les informations les plus surprenantes entendues jeudi 30 août à la CENI sont relatives à la machine à voter. Que des calomnies, que des fakes news politiciens, que de la mauvaise foi, y compris de la part de princes d’églises. « La Russie a utilisé 22.000 machines à voter, seulement 30 sont tombées en panne ; L’Irak a utilisé 62.000 machines, 253 seulement sont tombées en panne ; En Roumanie, à Bucarest, les 32 commissions électorales membres de l’AWEB ont félicité la CNEI de la RDC pour l’innovation de l’utilisation de la machine à voter : les collègues de la Commission électorale de la Namibie qui utilisent le vote électronique viennent déjà ici chez nous apprendre comment adopter le système de la machine à voter car ayant l’avantage d’imprimer les bulletins et ainsi permettre le comptage manuel … » a littéralement décliné Norbert Basengezi. Ce n’est pas ce qu’insinuent dans l’opinion ceux qui appellent à un consensus ou à une entente sur ce qui, ailleurs, est déjà entendu par le bon sens le plus élémentaire. « Depuis avril 2018, 1.200 machines à voter sont à l’intérieur du pays dans le cadre de la sensibilisation. Aucune n’est encore tombée en panne … » a encore asséné le vice-président de la CENI.
Ci-après, le texte intégral de la communication du vice-président de la CENI.
J.N.
Mesdames et Messieurs de la Presse ;
La Commission Electorale Nationale Indépendante vous remercie d’avoir répondu à son invitation en vue d’avoir les informations à la source sur tous les points d’actualité liés au processus électoral.
Pendant ces échanges, nous voudrions vous rappeler l’essentiel de nos réalisations ou du chemin parcouru conformément à notre calendrier électoral, des difficultés rencontrées et des solutions apportées, ce qui reste à faire et quelques recommandations.
Depuis le 05 Novembre 2017, date de la publication de notre calendrier jusqu’à ce jour toutes les activités programmées ont été réalisées dans le strict respect des délais prévus.
Ces activités peuvent être relevées à divers niveaux ci-après :
I. Au niveau juridique
Il faut noter l’adoption par le Parlement et la promulgation par le Président de la République des lois essentielles à l’organisation des élections dans notre pays. Il s’agit de :
1. Le 29 Juin 2016 : Promulgation de la loi n°16/007 modifiant et complétant la loi n°04/028 du 24 Décembre 2004 portant identification et enrôlement des électeurs en République Démocratique du Congo ;
2. Le 24 Décembre 2017 : Promulgation de la loi n°17/013 du 24 Décembre 2017 modifiant et complétant la loi n°06/006 du 09 Mars 2006 portant organisation des élections présidentielle, législatives, provinciales, urbaines, municipales et locales ;
3. Après la clôture de l’opération de Révision du fichier électoral dans les provinces du Kasaï, Kasaï central à Kamiji et Luilu dans la Lomami le 31 Janvier 2018, la CENI a accéléré avec la centralisation des données électeurs en vue de permettre l’élaboration de la loi sur la répartition des sièges. Celle-ci a été débattue et adoptée au Parlement et a été promulguée par le Chef de l’Etat, le 08 Mai 2018.
Nous remercions le Président de la République et le Parlement pour avoir avec célérité doté à la CENI des outils juridiques nécessaires pour la réalisation de sa mission.
II. Au niveau politique et social
Nous avons à partir du Ministère de l’Intérieur 601 partis politiques et 69 Regroupements politiques. Nous remercions les partenaires politiques pour leur comportement en répondant à nos réunions du comité de liaison (Majorité comme Opposition) ainsi que nos partenaires sociaux (Confessions religieuses) pour nous avoir accompagnés tout au long de ce processus.
Les mêmes remerciements s’adressent au personnel des médias publics et privés tant de la presse écrite que ceux de la presse audiovisuelle.
Nous regrettons seulement qu’à ce jour il y ait uniquement 374 signatures du code de bonne conduite par les partis et regroupements politiques et moins de 150 associations ayant signé la Charte de Bonne conduite.
Nous regrettons également qu’aucun parti politique et/ou Regroupement politique n’aie envoyé un témoin sur terrain. C’est l’une des conditions pour organiser des élections apaisées.
Coup de chapeau à certaines organisations de la société civile comme SYMOCELL, CASE, Dignité humaine, PANEL DES EXPERTS, AETA, EDUCIEL et surtout l’Eglise Catholique et l’Eglise protestante qui ont aligné des observateurs.
Rares sont les journalistes sauf pour les 5 cas de journalistes internationaux qui ont reçu nos cartes d’accréditation. Un processus doit être témoigné et observé. Non dans le débat contradictoires seulement, mais par les faits. Nous en appelons à la bonne conscience de tous pour envoyer les témoins et observateurs.
III. Au niveau financier et logistique
La CENI remercie le Gouvernement congolais pour la prise en charge financière et logistique de ce processus dans toute sa globalité.
Nous n’avons jamais eu de financement extérieur, ni pour la Révision du Fichier électoral ni pour l’achat des matériels (camions, camionnettes, motos, moteurs hors bords,…).
Pendant la RFE, nous avons collaboré difficilement avec l’appui de la MONUSCO mais la CENI reste reconnaissante pour le pont aérien qu’’elle nous a facilité entre le port de Mombassa et la RDC grâce à ses Antonov et Hyllochine (Au total 16 hélicoptères et 5 gros porteurs). Dans l’entre temps, l’appui technique de la Communauté internationale est toujours réelle avec ses 132 agents qui collaborent avec nous dans ce bâtiment et en provinces dans le cadre de la Division électorale de la MONUSCO et du PNUD/PACEC.
Au même moment, le Gouvernement de la République nous avait acheté 97 camionnettes ; 50 camions Kamaz, 10 camionnettes militaires auxquelles s’ajoutent 220 camions, 150 camionnettes, 50 Moteurs hors bords et 1500 Motos et des vélos.
En plus de ces engins, le Gouvernement a acheté 5 avions gros porteurs en dehors de deux existants et 8 hélicoptères.
Ces matériels sont en route et le Président de la CENI est à Séoul pour l’expédition des machines à voter où plus de 70 000 sont déjà produites.
Nous assistons à des débats politiques autour de cette machine. Nous voudrions vous livrer ces quelques informations par rapport à ces machines :
1. Depuis avril 2018, 1200 machines à voter sont à l’intérieur du pays dans le cadre de la sensibilisation des électeurs. Pendant 4 mois aucune n’est tombée en panne ;
2. La Russie a utilisé 22 000 machines, seulement 30 sont tombées en panne ;
3. L’Irak a utilisé 62 000 machines, 253 seulement sont tombées en pannes ;
4. En Roumanie, à Bucarest les 32 commissions électorales membres de AWEB ont félicité la CENI de la RDC pour l’innovation de l’utilisation de la machine à voter ;
5. Les collègues de la Commission électorale de la Namibie qui utilisent le vote électronique viennent déjà ici chez nous apprendre comment adopter le système de la machine à voter car ayant l’avantage d’imprimer les bulletins et ainsi permettre le comptage manuel aussi ;
6. Les Britanniques envoyés en RDC par leur Gouvernement pour travailler avec la CENI sur la machine à voter, ont dressé un rapport assorti des recommandations. Ils n’ont pas trouvé d’inconvénients à l’usage de cette machine ;
7. L’UDPS nous a posé 47 questions et nous y avons répondu depuis le mois de juin. Bref, nous collaborons avec tout le monde (les partis et regroupements politiques, les Eglises, la Société civile, les fonctionnaires) et c’est un grand signe pour la transparence dans la réalisation de notre travail ;
8. Ces matériels engagent 1200 congolais qui toucheront chacun 150 USD pour la sensibilisation sur toute l’étendue du territoire, nos ports, nos aéroports seront dotés de ces machines ;
9. Le reste des questions sur l’énergie est réglé par la batterie à Lithium qui dure 72 heures par rapport au seul jour que dureront les opérations de vote ;
10. La question des personnes âgées ou de celles qui ne savent pas lire est prise en charge par l’article 58 de la loi électorale ;
11. Ces machines sont victimes de l’intoxication due à la peur des acteurs politiques comme en 2006 où l’on voyait déjà la photo de Joseph Kabila dans les kits bureautiques, ou en 2011 dans le stylo prévu par la CENI pour le vote ;
12. Avec ces machines à voter, le pays aura gagné en termes d’argent, de temps pour ne pas aller jusqu’en Aout 2019 avec des bulletins pre-imprimés utilisés en 2006 et 2011 qui n’ont pas empêché que les élections soient traitées de catastrophiques. Le problème est donc ailleurs et pas avec ces machines à voter.
Pour mettre fin, à l’intoxication concernant les électeurs dont les empreintes sont illisibles dans le fichier électoral, la CENI informe, tout en rappelant que leur présence est autorisée par l’article 22 des mesures d’application de la loi sur l’identification et l’enrôlement des électeurs, qu’elle procède dès ce lundi 03 Septembre 2018 à l’affichage des listes provisoires des électeurs aux sites de vote.
Nous mettrons ainsi fin au débat des présumés électeurs fictifs. Il sied de rappeler à ce stade que contrairement à 2006 et 2011 où il n’y a pas eu d’audit du Fichier électoral, la CENI a elle-même provoqué l’Audit du Fichier électoral pour rendre plus crédible ce processus. Nous invitons donc tous les leaders du FCC, de l’Opposition, des Eglises et confessions religieuses de passer dès lundi à certains sites de Kinshasa pour consulter les listes provisoires et ainsi mettre fin à ce débat.
Les radiés ou doublons ne figureront pas sur ces listes provisoires.
Les listes définitives après correction de ces premières seront affichées selon notre calendrier, le 22 Octobre 2018.
Je ne devrais pas parler des cas des candidats avant la fin du contentieux des candidatures étant donné que la CENI est déjà dessaisi des dossiers de candidatures. Mais puisque la presse a fait beaucoup des polémiques sur 2 cas : Fréderic Batumike et Aimé Kilolo, il est approprié d’apporter quelques éclaircissements.
1. Concernant le cas de Monsieur Fréderic Batummike du Sud-Kivu
Il s’agit ici d’un député provincial condamné pour crimes contre l’humanité par la Cour Militaire du Sud-Kivu. C’est seulement hier, 29 Août 2018 que la Cour Militaire du Sud-Kivu a déposé son Arrêt au Secrétariat exécutif provincial du Sud-Kivu. Et le Secrétaire Exécutif Provincial nous l’a immédiatement transmis, il y a seulement 24 heures.
Nous rappelons à toute l’opinion que la loi électorale n’exige pas qu’il soit joint l’extrait du casier judiciaire à la déclaration de candidature d’un candidat député national ou provincial (Articles 121 et 149 de la loi électorale).
Il est dès lors logique que l’opinion se pose la question de savoir par quel élément le juriste du BRTC de la CENI pourrait découvrir cette condamnation dans le chef de Monsieur Fréderic Batumike.
La CENI fait remarquer donc à juste titre que la grande responsabilité est placée du côté des partis et regroupements politiques ainsi que des organisations de la société civile qui devraient avoir des témoins, journalistes et observateurs qui devraient dénoncer ce cas dès l’affichage par le BRTC. Ce qui n’a pas été fait.
Ailleurs comme à Gbadolite, il a été dénoncé lors de l’affichage le cas des candidats n’ayant pas la nationalité congolaise.
Vous comprendrez donc, Mesdames et Messieurs de la presse, pourquoi nous insistions sur votre présence au début.
2. Concernant le cas de Monsieur Aimé Kilolo
Il s’agit d’un candidat suppléant frappé d’une double cause d’invalidation : sa nationalité belge et sa condamnation pour subornation des témoins. Comme non dénoncé aussi pendant l’affichage, nous n’avions aucun élément de le déclarer non conforme.
C’est par les deux lettres du Ministre de la Justice nous envoyant l’Arrêt que la Chambre d’Appel de la CPI a rendu dans l’Affaire de subornation des témoins que nous nous sommes rendus compte qu’il était condamné et qu’il était belge.
La plénière de CENI l’a invalidé pour ces deux causes d’inéligibilité.
Enfin, la solution à ce problème c’est la moralisation de la classe politique et la maitrise de la loi électorale. L’article 16 de la loi électorale voudrait que leur Parti et/ou Regroupement politique les remplace par d’autres. L’Alliance politique Convention des Congolais Unis et alliés l’a déjà fait pour le cas de Batumike.
Demain commence le dossier de règlement des contentieux électoraux à la Cour Constitutionnelle. C’est la CENI qui est mise à la barre et nos avocats et experts seront là. Nous nous abstenons donc d’entrer dans ce dossier pour ne pas gêner les autres institutions.
Pour ceux-là qui ont perdu leurs cartes d’électeurs, ils peuvent se procurer des duplicata aux antennes de la CENI.
Nous vous avons appelé à ces échanges de partage d’informations afin d’avoir les informations nécessaires à la source afin de vous aider à recadrer vos débats pour l’intérêt des électeurs.
Nous réitérons que le lundi, 03 septembre 2018 nous affichons les listes provisoires et que tout le mois de septembre est consacré au repérage des Bureaux de vote (BVD) et à l’identification des superviseurs et agents membres des BVD. Il est prévu 640 000 agents à engager.
«Ne soyez donc pas distraits, le train a déjà quitté la gare».
La CENI vous remercie de cette collaboration et vous invite parmi les observateurs des élections du 23 décembre 2018.
Si tout va bien, la passation pacifique du pouvoir dans ce pays est prévue au 12 janvier 2019. Travaillons-y tous.
Norbert BASENGEZI KATINTIMA