Reléguée aux oubliettes, la question de la candidature unique de l’opposition ? Apparemment, en dehors de la plateforme Arc-en-ciel du sénateur Mabaya Gizi qui a donné de la voix sur le sujet pour en appeler à de nouvelles rencontres aussitôt que les listes définitives des candidats à la présidentielle de décembre 2018 seront connues, personne n’en a pipé mot. Depuis notamment que les opposants ont affiché un semblant d’unité en exigeant le retour préalable de Moïse Katumbi et sa participation à la prochaine compétition électorale. Mais rien n’est aussi peu sûr que cette candidature à la présidentielle hors délais, entre autres griefs : elle est impossible à déposer sans en même temps consacrer la suprématie de l’impétrant sur tout le monde, ses collègues de l’opposition y compris.
Dans les rangs des opposants, nul n’ignore que l’affaire Katumbi est quasiment close, sauf coup de force. Mais chacun ici fait semblant d’y croire et se tient coi, en attendant de voir venir. « Après tout, les candidatures aux trois scrutins combinés de décembre prochain déposées, ça ne sert à rien de s’exposer à la vindicte de l’électorat katumbiste ou de Katumbi lui-même. Autant attendre qu’ils se convainquent d’eux-mêmes que nous n’y sommes pour rien », explique une source de l’UNC interrogée par Le Maximum lundi 20 août 2018. Tous ont convenu de faire semblant d’attendre, la publication des listes officielles des candidatures retenues, avant de foncer. D’ici là, les bases électorales sont assidûment entretenues, même dans les rangs des katumbistes, où Delly Sessanga, un de ses plus bouillants lieutenants, s’est offert un voyage express dans sa province kasaienne d’origine. « Pas seulement pour convaincre son électorat d’attendre Moïse Katumbi », selon des sources à Kananga.
Le week-end dernier à Kinshasa, les katumbistes ont multiplié les sorties médiatiques pour tenter de défendre leur mentor, ou de justifier les fonds reçus, selon leurs détracteurs. Dans les médias, l’ex. UNC passé également par le PPRD, Jean-Bertrand Ewanga, assurait sans grande assurance que « le vrai combat pour l’opposition aujourd’hui reste celui des élections inclusives, crédibles, et non celui du candidat commun tant le FCC et alliés s’obstinent à imposer la machine à tricher, un fichier corrompu et s’acharne contre Moïse Katumbi et Jean-Pierre Bemba ». La machine à voter est un engin innocent, cela, même Jean-Pierre Bemba qui n’a pas pipé un mot contre elle, en est conscient. Autant que tous ces acteurs politiques de l’opposition qui ont accouru à la CENI au premier gong pour y déposer en bonne et due forme les dossiers de leurs candidats aux législatives et à la présidentielle. Tout comme la crédibilité des élections, qui n’est pas un fait acquis à l’avance mais dépend aussi des efforts de l’opposition pour en assurer la mise en œuvre, selon les observateurs. Ne reste donc plus que la question de l’inclusivité du processus à l’un ou l’autre candidat. Qui ne concerne pas tout le monde. On peut douter que tous les candidats de l’opposition sacrifient une alternance pacifique au pouvoir aux voies insondables de Katumbi et ses lieutenants, qui du reste ne représentent pas grand’chose en dehors des écrans de télévision de la capitale.
Le week-end dernier les a vu se pavaner ci et là, haranguant quelques partisans recrutés à la hâte. Au cours d’une matinée politique au siège de son parti, le MPCR, dans la commune de Kasavubu, Jean-Claude Mvuemba a exhorté les candidats de l’opposition politique à ne pas aller aux élections de décembre prochain tant que Moïse Katumbi était exclu du processus. L’élu de Kasangulu (2006 et 2011), un territoire semi-rural situé à quelques encablures de Kinshasa sur la route de Matadi, connu pour ne pas être un as du raisonnement cohérent, a assuré à la poignée de combattants rassemblés devant lui que « empêcher Katumbi, c’est empêcher 30 % des congolais qui le soutiennent de partout avant même les élections ». Plus facile à affirmer qu’à démontrer. « Mvuemba lui-même ne vaut pas plus son siège co-naturel de Kasangulu puisqu’il est l’unique élu du MPCR, le parti politique dont il est le président fondateur », a rétorqué aussitôt un élu PPRD interrogé par Le Maximum. « Même en multipliant tous les Mvuemba, Lutundula, Sessanga, Mwando du monde, cela ne fait pas 30 % des 40 millions d’électeurs », conclut-il, sûr de lui. Ce n’est très faux, en réalité.
J.N.