Sauf imprévu, Kinshasa abritera courant août 2018 la réunion du Groupe d’action contre le blanchiment d’argent en Afrique centrale, GABAC.
Le GABAC salue, en effet, la détermination de la RD Congo dans la lutte contre les blanchiments des capitaux mais recommande aux autorités de Kinshasa de tout mettre en œuvre pour permettre à la CENAREF, Cellule Nationale des Renseignements Financiers, de remplir les critères dictés par les dispositions réglementaires qui organisent cette structure, singulièrement son indépendance vis-à-vis des institutions publiques.
Dans l’entre-temps, cinq ans après la DGDA (DIRECTION GENERALE DES DOUANES ET ACCISES), la DGI, Direction Générale des Impôts, négocie aussi la signature d’un protocole d’accord avec la CENAREF en vue d’endiguer la fraude et l’évasion fiscales. A travers ce protocole d’accord, la DGI veut notamment s’assurer un «meilleur suivi des obligations déclaratives et de paiement, particulièrement dans les secteurs miniers, pétroliers producteurs, de télécommunication et bancaires où les rémunérations sont indexées », lit-on dans le cahier des «Mesures à mettre en œuvre pour la réalisation des prévisions 2018». La CENAREF fait, en pratique, office de petite Agence nationale des renseignements, ANR, dans le secteur de business et des finances publiques. Elle est, pour ce faire, rattachée à la trésorerie nationale, la Banque centrale du Congo. Le protocole d’accord DGI-CENAREF découle, selon des experts, de l’évaluation des finances publiques réalisée, mi-2017, laquelle a notamment décelé «une discordance des chiffres entre les statistiques collectées auprès des banques commerciales et ceux du compte général du trésor de la Banque centrale du Congo, BCC ». La Direction générale des impôts, selon nos sources, devrait ainsi exploiter à fonds «des données de recoupement de la Direction générale de migration DGM ainsi que des licences de transfert de fonds vers l’étranger obtenues auprès des banques commerciales en vue de faire la lumière sur la gestion de rapatriement des devises en RDC à titre d’impôts, redevances et autres droits», poursuivent des sources autorisées à l’Hôtel des impôts. Mais la lutte contre le blanchiment des capitaux pourrait donner des effets contraires, redoutent des experts, du fait de la multiplicité des services.
Télescopage entre la CENAREF et COLUB
Mi- juin 2018, le ministère des Finances a patronné les accises de l’Evaluation nationale des risques (ENR) organisée par la Cenaref. Pourtant quelques mois plus tôt, le 16 novembre2017, Henri Yav Mulang avait procédé à l’installation du Comité consultatif de la Lutte contre le Blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, le COLUB. Composé de 28 membres, ce comité a pour mission d’assister le Gouvernement dans la définition et la mise en œuvre de la politique nationale de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme. De par leurs champs d’action, CENAREF et COLUB, c’est du blanc bonnet, bonnet blanc. Ces institutions font partie «d’un cadre légal destiné, notamment à faciliter la prévention, la détection et la répression des actes constitutifs de blanchiment des capitaux et de financement du terrorisme », avait laissé comprendre le ministre des Finances lors de la mise en place des membres du COLUB. Et Yav Mulang de poursuivre, «La loi n°04/016 du 19 juillet 2004 portant lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme s’est concrétisée par la signature par le Premier Ministre successivement des décrets n° 08/20, 08/21 et 08/22 du 24 septembre 2008, portant respectivement, organisation et fonctionnement d’une cellule nationale des Renseignements Financiers, Cenaref. La création du Comité Consultatif de Lutte contre le Blanchiment des Capitaux et le Financement du Terrorisme, COLUB et la création du Fonds de Lutte contre le crime organisé, FOLUCO». Il s’avère cependant qu’en raison de diverses pesanteurs et en dépit de l’avancée remarquable que ces structures représentaient dans la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, explique le ministre des Finances, leur mise en œuvre, du moins des deux dernières, a pris du temps, au point de laisser planer sur lui le risque d’être listé parmi les Etats à haut risque et non coopératifs. Mais de l’avis des observateurs, ces structures ont le mérite d’avoir plus donné des emplois à des emplois à des acteurs politiques ou leurs proches qu’à lutter véritablement contre le blanchiment des capitaux et le financement de terrorisme.
POLD LEVI