Rien de neuf sous les tropiques. C’est le moins qu’on puisse affirmer à l’observation des manœuvres politiques et diplomatiques en cours autour de l’avenir politique de la RD Congo. Certaines capitales européennes en crise économique plus ou moins aiguë lorgnent résolument sur la RD Congo pour se refaire une santé financière à peu de frais. Et semblent décidées à se débarrasser de la majorité au pouvoir dans ce pays continent au centre de l’Afrique et de son président, Joseph Kabila. Kinshasa est coupable d’avoir ouvert ses immenses richesses naturelles aux concurrents asiatiques, particulièrement chinois. C’est le crime principal, mais pas le seul. Sous la conduite de dirigeants démocratiquement élus depuis 2006, la RD Congo conforte chaque jour un processus de démocratisation qui entraîne un souverainisme mal apprécié des puissances économiques occidentales au penchants néocolonialistes avérés.
6 ans avant les troisièmes élections démocratiques prévues en décembre 2018 en RD Congo, les puissances occidentales avaient déjà tenté d’empêcher la tenue d’élections en 2011, selon de récentes révélations du président de la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI), le pasteur méthodiste Ngoy Mulunda Nyanga. Selon un scénario mis en œuvre avec succès en Côte d’Ivoire, d’importantes sommes d’argent et un exil européen avaient été proposés au patron de l’administration électorale quelques semaines avant les scrutins qui ont porté Joseph Kabila au pouvoir en novembre 2011. Le complot contre la RD Congo a échoué cette fois-là, mais relancé des manœuvres plus élaborées pour se défaire des « indociles » au pouvoir à Kinshasa.
Mi-2016, les libéraux au pouvoir en Belgique ont compromis l’entente politique entre Joseph Kabila et l’opposant historique Etienne Tshisekedi autour d’un dialogue visant l’organisation consensuelle des prochains scrutins électoraux. Une aile radicale de l’opposition politique en RD Congo a vu le jour à Genval en Belgique, qui prônait le départ de Joseph Kabila du pouvoir avant toute élection, malgré les dispositions constitutionnelles qui ne prévoient pas de vide juridique au sommet de l’Etat avant la tenue des élections, quoiqu’il arrive. Deux ans après la naissance du Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement, coaché par le richissime ex gouverneur de l’ex Katanga, Moïse Katumbi Chapwe, le candidat de Bruxelles et d’une partie de l’Union Européenne au remplacement de Joseph Kabila, la stratégie a échoué. En partie en raison du décès début février 2017 d’Etienne Tshisekedi, le vieil opposant sur lequel les espoirs belges étaient fondés.
Les plans de déstabilisation interne (militaire et populaire) ayant montré leurs limites, les dirigeants politiques occidentaux jouent depuis quelques semaines la carte de la déstabilisation par les Etats voisins. Kigali et Luanda sont les principales capitales mises à profit dans ce plan, même si Brazzaville n’est pas exclu du schéma.
Le Rwandais Paul Kagame, qui préside pour un an l’Union Africaine, est sollicité avec insistance pour faire valoir la thèse de l’interdiction de se représenter à la prochaine présidentielle de Joseph Kabila. Le Chef de l’Etat rwandais, qui n’a jamais dissimulé ses visées expansionnistes sur son riche voisin, présente l’avantage pour les dirigeants européens d’avoir déjà agressé militairement et occupé d’immenses pans du territoire rd congolais dans un passé récent. De même qu’on doit à l’armée de son pays d’entretenir, également au vu et su de tout le monde, l’insécurité et l’instabilité dans les territoires de l’Est de la RD Congo. « Ce n’est plus qu’un secret de polichinelle. Kigali doit son apparente prospérité économique aux richesses naturelles de la RD Congo. Kagame voit d’un mauvais œil le réveil imminent de son riche voisin et craint de perdre son influence sur ce pays », explique un diplomate africain en poste à Kinshasa.
L’Angolais Joao Lourenço, dont le pays a déjà joué un rôle militaire déterminant dans la chute du Maréchal Mobutu à la fin des années ’90 mais fait face à une crise économique sans précédent depuis plusieurs années, semble appâté par la perspective d’aides occidentales qui sortiraient Luanda du marasme. A la tête d’une des organisations sous-régionales qui ont soutenu la RD Congo jusque-là, l’homme fort de Luanda n’est pas non plus insensible à la montée en puissance de son voisin rd congolais et ne verrait pas d’un mauvais œil les politiques néocoloniales dépossédantes des occidentaux. Pourvu qu’elles profitent à Luanda.
Ainsi se dessine sur la RD Congo et contre la majorité au pouvoir, le scénario déjà expérimenté en janvier 2017 Gambie, lorsque le président Yahya Jammeh a été contraint à l’exil en Guinée Equatoriale par l’entregent des Chefs d’Etat de la CEDEAO, le Sénégal de Macky Sall en tête. Seulement, Kinshasa n’est pas Banjul, et Joseph Kabila n’est pas, comme l’ancien Chef d’Etat Gambien, le perdant de sa 4ème élection présidentielle consécutive. En RD Congo, « la majorité au pouvoir compte encore de nombreux et chauds partisans dont qui ne devraient pas s’en laisser conter », explique encore ce diplomate africain. Qui est d’avis que « faire partir Kabila du pouvoir par la force est encore plus dangereux pour la paix dans la région que sa candidature ou celle de son dauphin, du reste tout à fait légale, à la prochaine présidentiellee».
J.N.