La panique est, au fur et à mesure que s’impose l’inéluctabilité des élections générales fixées à décembre prochain, de plus en plus perceptible dans les rangs de l’aile radicale de l’opposition proche de l’ex. gouverneur Katumbi. La convocation à la hâte d’un conclave ponctuée par la création d’une nouvelle plateforme politique, électorale celle-là, apparaît comme une ultime fuite en avant pour se frayer une nouvelle voie de sortie contre cette perspective. « Ensemble pour le changement », le nouveau regroupement mis sur orbite à Johannesburg (Afrique du Sud) il y a quelques jours par le chairman du TP Mazembe et ses affidés est venu enterrer le Rassemblement des forces politiques et sociales (Rassop), la précédente plateforme créée à Genval pour se débarrasser des institutions de la RD Congo par des voies de fait, une stratégie montée avec l’appui de certains milieux politiques et mercantiles belges qui a lamentablement fait flop. Notamment parce que les populations Congolais s’y sont opposées en s’enrôlant plus que massivement, indiquant ainsi qu’ils préféraient la voie des urnes à une solution foulant aux pieds les prescrits de la constitution qu’ils avaient adoptée par referendum populaire il y a à peine une dizaine d’années.
Chemin jonché d’embuches pour Katumbi
Le chemin qui mène vers le ‘top job’ en RDC paraît donc de moins en moins aisé pour Katumbi et ses clients qui ne sont pas nés de la dernière pluie n’en sont pas dupes. Le fait est qu’en l’état actuel de la constitution et des lois en vigueur, l’ancien gouverneur de l’ex province du Katanga n’est pas éligible, pour la simple raison que sa nationalité, ou du moins le degré de sa nationalité, ne le lui permet pas. En effet, ne peut pas postuler à l’élection présidentielle dans n’importe quel pays qui le veut. La loi limite généralement de manière exhaustive et plus stricte que pour toute autre fonction les critères à remplir par les impétrants. En RDC, comme dans un certain nombre d’Etats de par le monde, pour prévenir toute tentative de haute trahison qui découlerait de la multiplicité des allégeances à des intérêts autres que nationaux du premier citoyen du pays, il est exigé que tout candidat à l’élection présidentielle soit un Congolais d’origine. Né certes en RD Congo, mais de parents étrangers, un père juif d’origine italienne et d’une mère d’origine zambienne, Moïse Katumbi Chapwe, même s’il remplissait les conditions pour postuler à diverses autres fonctions, ne peut donc espérer légalement solliciter la fonction de président de la République. La constitution et les lois en vigueur au pays de Lumumba depuis 2006, réservent cette ambition exclusivement aux nationaux nés de parents eux-mêmes congolais, même si leur naissance était survenue à l’étranger ou à bord d’un aéronef ou un navire en route vers nulle part. Chez les amis de Moïse Katumbi, tout le monde le sait : « En avant pour le changement », la plateforme électorale née en terre sudafricaine, s’avère donc plutôt une plateforme pour une candidature hypothétique et des plus incertaines. Entendre certains de ses clients se gargariser du fait que leur mentor soit venu au monde en terre congolaise est pour le moins ridicule. « A ce rythme, le grand acteur belgo américain Jean-Claude Van Damme fils d’un fleuriste belge né à Jadotville (Likasi) tous les autres enfants de commerçants et/ou diplomates étrangers venus au monde en RDC peuvent prétendre disposer du droit de devenir président de ce pays… », se gausse ce professeur de droit de l’Université de Kinshasa interrogé par Le Maximum…
Jean Claude van Damme, né à Likasi, peut aussi postuler ?
Le nouveau regroupement lancé à Johannesburg par Katumbi est en réalité un groupe de pression pour modifier la constitution en faveur du richissime ancien gouverneur de l’ex. Katanga. Le tour de passe-passe consisterait à mettre une révision de la loi fondamentale en y introduisant le « jus soli » (droit du sol qui reconnaît est né dans un pays le droit à la nationalité dans le fatras des mesures dites « de décrispation ». Rien de plus.
Les dernières sorties médiatiques de ses hommes de main confirment cette pression destinée à imposer que soit foulé aux pieds des principes consacrés par la constitution de la RD Congo in tempore non suspecto. La dernière en date, celle de l’inénarrable député national déserteur Francis Kalombo, n’y échappe pas et enfonce davantage l’homme qu’il défend fort maladroitement. Dans une interview accordée à des confrères en ligne, l’élu PPRD de 2011, détenteur d’un très controversé diplôme de licence en droit décerné par l’Université Pédagogique Nationale de Kinshasa il y a quelques années, a lâché un véritable pavé dans la marre. « Katumbi est né au Congo, contrairement à Kabila dont on ne sait même pas de quel coin il est sorti », déclare-t-il. Insinuant ainsi qu’il suffirait d’avoir vu le jour à l’intérieur de ce qui constitue les frontières de la RD Congo pour prétendre non seulement détenir la nationalité de ce pays, mais aussi aspirer à la plus haute fonction étatique. Le raisonnement est révélateur de limites de l’itinéraire intellectuel sinueux de celui qui aime bien se poser en « golden boy » kinois… Parce que même un étudiant de premier cycle en droit est suffisamment outillé pour savoir qu’en droit positif congolais, il ne suffit pas d’être né sur le territoire de la RDC pour être un citoyen congolais et que de nombreux citoyens congolais d’origine peuvent être venus au monde hors du territoire national.
Assaut déguisé contre la constitution
En réalité, c’est un assaut déguisé contre la constitution que lance, avec son habituelle légèreté, un Kalombo manifestement soucieux de « mériter » les prébendes de son mentor. Tous les juristes l’affirment, la nationalité d’origine est un concept régi par le principe de descendance sanguine et est héréditaire en RD Congo. Elle s’acquiert principalement par ses parents et secondairement par adoption, à la différence de certains pays où la même nationalité est régie par le droit du sol (jus soli), c’est-à-dire par le lieu de naissance. Ce qu’impliquent les propos des Francis Kalombo, Pierre Lumbi et autres Delly Sessanga, lorsqu’ils défendent la candidature à la candidature hypothétique de Moïse Katumbi, c’est une modification de la constitution pour permettre à leur « jocker » de se tirer d’affaire pour pouvoir se présenter à la prochaine élection présidentielle. La chose étant inenvisageable en l’état actuel de la constitution et de la loi, « Ensemble pour le changement » est, à cet égard, « ensemble pour la modification » des prescrits de la constitution qui ne permettent pas au « généreux » Katumbi Chapwe de postuler à la présidentielle.
J.N.