«Je suis prête à me battre pour mon pays, pourquoi vous ne m’acceptez pas dans le mouvement. Je veux être avec vous», déclare-t-elle selon une dépêche d’Actualite.cd du 16 novembre 2017 intitulée «Yalala, 15 ans, les menottes de la honte !» «J’ai déjà entendu parler d’elle. Elle participe aux réunions à Idjwi. C’est une congolaise. C’est une citoyenne qui se révolte. Les menottes, c’est la honte. Je suis choquée de voir que même les mineurs commencent à s’impliquer. C’est l’état du pays. Personnellement, je l’encourage, bien que j’aurai souhaité qu’elle attende d’avoir 18 ans», a dit à ACTUALITE.CD une certaine Rebecca Kavugho…
16 novembre 2017. Watshapp. A 12 :46, CK écrit : «Cette image fera le tour du monde». A 12 :46, PM répond : «On y travaille, il va être le symbole de la résistance et la photocopie du système Kabila». A 14 :18, PM renchérit : «Pour ton information l’homme qui a des yeux pour tout sauf voir, je suis dans l’opposition depuis 2011 (j’ai pas voté Kabila en tout cas) mon parti était dans la majorité mais moi, ma conscience et mes actions sont de l’opposition, j’ai fait la prison en 2014, janvier 2015 pour ce pays et je suis encore prêt à le faire pour le Congo !!! La photo est authentique la fille est menottée, une autre personne touche sa jupe…un système barbare pire que celui des groupes armés !!!». Effectivement, le 17 novembre 2017, comme l’a promis PM, c’est le buzz sur les réseaux sociaux, mais aussi dans des médias classiques…
Premier miracle : les organisateurs et les «accompagnateurs» de la manifestation du 15 novembre 2017, restés silencieux après l’échec patent de leur initiative, s’en souviennent, quarante-huit heures après, comme s’ils avaient été atteints d’un virus, dans leurs comptes twitter. De Sindika Dokolo à Martin Fayulu en passant par André Claudel Lubaya, c’est le concours du meilleur tweet ! Actualité.cd constate : «Il y a 24 heures, elle était une parfaite inconnue. Maintenant, elle est une véritable attraction sur les réseaux sociaux en RDC. Elle a 15 ans. Elle est en troisième des humanités. Elle habite Idjwi Sud, cette petite île aussi belle que rebelote la province du Sud-Kivu. Elle a été là. Là, dans la foule quand la police est venue ‘ramasser’ les militants qui manifestaient pour rejeter le calendrier électoral de la Ceni et demander la démission de Joseph Kabila. Elle savait ce qui se passait. Elle était informée. Elle qui vit aux rythmes des revendications depuis près d’une année. Elle dont le père, Claude Yalala, milite activement au sein de la LUCHA voilà une année».
Bien entendu, on veut en faire une autre Malala, du nom de cette jeune fille pakistanaise qualifiée de «militante » alors qu’à seulement 14 ans, elle avait été attaquée à l’arme lourde par les Talibans en 2009 pour avoir eu le tort de dénoncer, à 11 ans déjà, les terroristes qui incendiaient les écoles pour filles dans la vallée de Swat. « Evacuée » par la suite à l’étranger pour des soins appropriés, elle deviendra une icône et obtiendra de nombreux prix honorifiques. Les Etats-Unis et l’Union européenne internationaliseront sa cause au point de lui faire bénéficier à 17 ans, en partage avec l’Indien Kailash Satyarthi, du saint des saints de la reconnaissance du monde civilisé : le prix Nobel de la paix le 10 décembre 2014.
Après les «enfants-soldats», les «enfants-militants»
Ironie du sort : la la petite congolaise Yalala n’a pas été à l’école le mercredi 15 novembre 2017. Une violation d’un de ses droits fondamentaux. Elle aurait “préféré” (!) aux cours l’accompagnement de son père Claude Yalala à une manifestation politique organisée par Lucha. On peut d’ailleurs soupçonner ce père bizarre de l’y avoir entraînée d’autorité. Reste à savoir maintenant à quelles fins puisque dans ce pays, la prudence la plus élémentaire chez les parents consiste à garder leurs progénitures à la maison des manifestations politiques pour les mettre à l’abri des contre-manifestations ou des charges répressives des forces de l’ordre. Que le fameux Claude Yalala fasse participer sa fille à une marche de l’opposition, qui plus est dans cette province du Kivu où tout peut arriver et même d’où tout arrive en RD Congo, c’est qu’il avait une idée derrière la tête. La photo qui fait le buzz sur les réseaux sociaux en est l’illustration la plus flagrante.
Des détails de la photo de Yalala frappent : A 15 ans, toute fillette qui se fait arrêter et en plus menotter par la police devrait paniquer, trépigner, sangloter même. Or, le regard de notre « Malala nationale » est des plus sereins. Comme si elle jouait une partition convenue à l’avance ! On en vient à supposer qu’elle savait bien à quoi s’en tenir. Dieu merci, les policiers de la garnison d’Idjwi ne sont pas munis d’armes létales, encore moins de bombe lacrymogène. On imagine l’effet si cela en avait été le cas.
De plus, entendre Yalala, à 15 ans d’âge, déclarer à la presse que «Je suis prête à me battre pour mon pays, pourquoi vous ne m’acceptez pas dans le mouvement. Je veux être avec vous», a tout d’une récitation de paroles dictées et bien assimilées. Ce récit contredit du reste la déclaration de Rebecca Kavugho de Lucha qui révèle que Yalala «participe aux réunions à Idjwi», alors que dans les propos qui sont attribués, la fille exprime plutôt une demande d’adhésion au mouvement de son père. C’est que l’une des deux personnes dont les paroles sont rapportées ment. Et lorsque Rebecca se dit «choquée de voir que même les mineurs commencent à s’impliquer» dans les manifestations publiques, elle fait un aveu d’une extrême gravité : le recrutement de militants au sein de l’opposition et des mouvements dits “citoyens” parmi la petite enfance.
Ainsi, après les groupes armés qui ont créé le phénomène «enfants-soldats» et des “enfants kamikazes” qui s’explosent pour tuer des soldats et des civils innocents dans le Nord du Nigéria pour le compte des tristement célèbres Boko Haram, voici les mouvements pro-démocratie qui exploitent les «enfants-politiciens». Vers quelle spirale les groupes comme Lucha sont-ils en train d’entraîner la rd Congo ?
Yalala pourrait ne jamais être Malala…
Les projections – à faire absolument puisque gouverner autant que s’opposer, c’est aussi prévoir – devraient inquiéter l’opinion, particulièrement au regard que la menace islamique fait peser sur le continent.
Les 13 et 14 novembre 2017, Dakar a accueilli le 4ème forum international paix et sécurité sous le thème «Défis sécuritaires actuels en Afrique : pour des solutions intégrées».
L’ambassadeur des Etats-Unis au Sénégal, Tulinabo Mushingi (américain d’origine congolaise qui a parrainé le mouvement pro-démocratie Balai Citoyen en prévision du soulèvement burkinabé et est soupçonné de l’avoir mis en contact avec la Lucha) a présidé la réunion sur «les stratégies à mettre en place pour freiner la menace terroriste dont sont victimes les 6 communautés (Sénégal, Burkina Faso, Mali, Niger, et Tunisie)».
«Invité Afrique» de RFI mardi 14 novembre dernier, le Président sénégalais Macky Sall s’est exprimé sur le retour possible des djihadistes après l’aventure en Syrie. «La crainte c’est qu’on va les défaire en Irak, en Syrie. Ils vont se retrouver d’abord en Libye et puis ils vont descendre dans le Sahel, puisque l’Afrique va constituer le ventre mou. Dès lors qu’il y a une réaction très forte au Moyen-Orient contre ces bandes, ils vont rechercher des territoires faciles…».
S’agissant particulièrement des djihadistes originaires du continent, il ajoute : «…où est-ce que vous voulez qu’ils aillent ? Déjà, beaucoup ont quitté. Ils sont certainement en train de retourner dans leurs pays respectifs, y compris en France ou ailleurs. Chez nous aussi. Donc, le problème ce n’est pas qu’ils reviennent. S’ils reviennent et qu’ils ne font rien, il n’y a pas de problème. Mais ils vont reconstituer. Ils ont une idéologie, c’est la destruction. Donc, il faut que l’Afrique ne serve pas, ne soit pas le ventre mou de la lutte contre le terrorisme international».
Les Congolais, principalement ceux des provinces frontalières avec des Etats comme le Sud-Soudan, l’Ouganda, le Rwanda, le Burundi et la Tanzanie, devraient les premiers se demander ce qu’il adviendrait des phénomènes «enfants-soldats/enfants-manifestants politiques» si tous les plans de réinsertion venaient à échouer du fait, notamment, de leur implication dans les mouvements pro-démocratie !
Yalala pourrait ne jamais être Malala…
Omer Nsongo die Lema avec Le Maximum