En RD Congo, la publication d’un calendrier électoral intégral par la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI), le 5 novembre 2017, qui prévoit la tenue de trois scrutins électoraux (la présidentielle, les législatives nationales et les législatives provinciales) en juin 2018, n’a pas calmé toutes ardeurs. Particulièrement les ardeurs occidentales à influer sur le cours des choses dans ce pays que ses richesses naturelles exposent, aujourd’hui peut-être plus que jamais, à une convoitise vorace. Manifestement pris de court et contraint de faire contre mauvaise fortune bon cœur, les puissances occidentales ne renoncent pas pour autant à leurs assauts pour affaiblir le pouvoir en place, et compromettre ou perturber le processus qui devrait mener à la passation « civilisée » du pouvoir au sommet de l’Etat.
Les réactions enregistrées au lendemain des manifestations politiques organisées à l’initiative des mouvements dits citoyens soutenus par les partis politiques de l’opposition radicale indiquent que les Occidentaux, ainsi qu’on désigne ici les capitales européennes associées à la puissante Etats-Unis, encouragent la perturbation du processus électoral. Le 16 novembre 2017, après l’échec cuisant d’une manifestation interdite et muselée par les forces de l’ordre à Kinshasa et dans les principales villes et agglomérations des provinces de la RD Congo, l’Union Européenne, la Suisse le Canada et les Etats-Unis se sont fendus d’un communiqué commun relatif au « respect des libertés d’expression et de réunion » très éloquent à ce sujet. Dans lequel ils se disent « préoccupés » par les déclarations officielles qui ont annoncé « de manière anticipatoire la perturbation des manifestations pacifiques organisées par la société civile et des partis d’opposition le 15 novembre ». Allusion faite aux communiqués d’interdiction de manifester sans autorisation préalable et aux menaces adressées aux contrevenants à ces interdictions, émis par des autorités municipales et de police à la veille de ces manif’s. Les représentations occidentales en RD Congo se sont ainsi mises ensemble pour condamner une anticipation des perturbations, feignant d’oublier que les appels à manifester des radicaux de l’opposition dégénèrent systématiquement en manifestations violentes. Et surtout, ils se trahissent eux-mêmes en commettant la faute présumée qu’ils reprochent aux autorités rd congolaises lorsqu’ils qualifient anticipativement les manifestations projetées de « manifestation pacifique ». Le parti-pris en faveur des forces politique hostiles à la majorité au pouvoir à Kinshasa est flagrant parce que nul ne peut prévoir à l’avance l’issue d’une manifestation publique. C’est ce que prouvent les affrontements entre forces de police et ressortissants marocains samedi 11 novembre à Bruxelles, à l’occasion de la qualification du Maroc à la finale de la prochaine coupe du monde. « Si des réjouissances ont dégénéré à ce point, qu’attendre de manifestations à caractère politique, et comment ne pas prévenir pour limiter d’éventuels dégâts ? », s’interroge un cadre de la PNC, Police Nationale Congolaise, interrogé par Le Maximum.
Les desseins partisans des puissances occidentales apparaissent encore plus clairement dans la suite du communiqué du 16 novembre dernier. « De telles déclarations (des responsables des forces de l’ordre ndlr.) ne correspondent pas aux principes démocratiques et au respect des libertés d’expression et de réunion. Ils sont également contradictoires avec l’engagement du gouvernement de la RDC de soutenir un processus électoral crédible, libre et apaisé en 2018 », écrivent-ils. Ce qui laisse entendre que pour ces pays de l’hémisphère Nord, un processus électoral n’est « crédible, libre et apaisé » que s’il est traversé de manifestations politiques non encadrées à tout rompre ! « C’est de l’anarchie, peste une source gouvernementale qui a requis l’anonymat. En démocratie, les libertés d’expression sont assurées et encadrées par les lois, qu’il faut respecter. Dans notre pays aussi, où une période particulière est réservée aux manifestations électorales, c’est la période de campagne électorale. On ne peut pas entretenir une atmosphère de campagne électorale d’ici juin 2018. Cela ne s’est jamais vu nulle part », explique-t-il.
L’interlocuteur du Maximum note que les chancelleries occidentales, tentent de jeter de la confusion dans les esprits entre les libertés de réunion et d’expression, qui ne sont nullement entravées en RD Congo, et les libertés qui entourent l’organisation des manifestations publiques, qui requièrent plus d’attention aussi bien des organisateurs que des pouvoirs publics compte tenu de leur incidence sur la préservation de l’ordre public.
Ci-après, le communiqué rendu public par les Chefs de Mission des pays membres de l’Union européenne, des Etats-Unis, de la Suisse et du Canada.
J.N.
Respect des libertés d’expression et de réunion
La Délégation de l’Union européenne publie la déclaration suivante en accord avec les Chefs de Mission des pays membres de l’Union européenne présents à Kinshasa, des Etats Unis, de la Suisse et du Canada
Kinshasa, 16 novembre 2017
Nous sommes vivement préoccupés par les déclarations récentes, attribuées à un certain nombre de responsables des forces de police congolaises et de Gouverneurs de provinces ayant annoncé de manière anticipatoire la perturbation de manifestations pacifiques organisées par la société civile et des partis d’opposition ce 15 novembre.
De telles déclarations ne correspondent pas aux principes démocratiques et au respect des libertés d’expression et de réunion. Ils sont également contradictoires avec l’engagement du gouvernement de la RDC de soutenir un processus électoral crédible, libre et apaisé en 2018.
Le droit de se rassembler et le droit d’organiser des réunions publiques sont inhérents à tout processus démocratique crédible. Plutôt que de travailler à interdire et perturber ces réunions, le gouvernement congolais pourrait travailler avec la société civile et les représentants de l’opposition pour s’assurer que ces événements se déroulent en toute sécurité et sans incident. Nous continuons par ailleurs à encourager ceux qui organisent de telles réunions publiques à adopter une attitude non-violente et à s’assurer que leurs actes n’empiètent pas sur les droits de tiers. Les autorités doivent s’abstenir d’un recours à la force excessive et sont susceptibles d’être tenues responsables de leur conduite, y compris à titre individuel.