Le non-sens de l’initiative de la «Coalition des Congolais pour la Transition», récupérée par Félix Antoine Tshilombo Tshisekedi, qui prône sans pinces ni rires une «Transition Sans Kabila» est indéniable. Entre autres, parce que les détenteurs des mandats électifs de député national, député provincial, et sénateur, comme le Chef de l’Etat, continueront de se prévaloir des dispositions prorogatives de la Constitution que sont les alinéas 2 des articles 103 (Député national) et 105 (Sénateur) en plus de l’alinéa 6 de l’article 197 (Député provincial). Bien plus, une telle transition est une violation de la Constitution en raison, notamment, du fait que la Loi fondamentale actuelle n’avait pas été conçue en 2004, examinée et adoptée par le Parlement avant d’être approuvée par référendum par le peuple en 2005, promulguée en 2006 par le Président de la République et amendée en 2011 par le Parlement pour finir par gérer une Transition qui résulterait d’un vide juridique fabriqué de toutes pièces…
La répétition étant la mère des sciences, les parties prenantes à l’Accord du 31 décembre 2016 ont eu la sagesse et l’intelligence de désigner par le terme «Période préélectorale et électorale» le laps de temps «qui va de la signature du présent compromis jusqu’à l’installation effective des institutions issues des élections», de sorte que l’on ne touche pas aux fondamentaux de la Constitution actuelle. L’unique alinéa mis sous bémol aux pourparlers du Centre interdiocésain de Kinshasa porte sur le référendum prévu à l’article 5 ainsi formulé : «Nonobstant les dispositions de l’article 5 alinéa 1, elles s’engagent à n’entreprendre ni soutenir aucune initiative de révision et de changement de Constitution».
Par parties prenantes – il est tout aussi important de le rappeler pour mettre fin à la confusion sciemment entretenue à ce sujet – il faut entendre, aux termes du point 1.1. du chapitre I relatif aux Concepts, «les signataires et les non signataires de l’Accord du 18 octobre 2016 avec leurs composantes (la Majorité Présidentielle, l’Opposition Politique et la Société civile signataire de l’Accord du 18 octobre d’une part, et le Rassemblement, le Front pour le Respect de la Constitution et la Société civile non-signataires de l’Accord, d’autre part)».
Cette précision s’impose aujourd’hui plus que jamais étant donné qu’on a l’impression d’assister à la réduction de l’espace politique à deux regroupements, la «Majorité présidentielle» et le «Rassemblement/Limete». Ainsi, on voit – juste un exemple – l’Unc Vital Kamerhe faisant pourtant partie de la plateforme «signataire de l’Accord du 18 octobre 2016» agir en électron libre, de même que la Mlc Eve Bazaïba oublier son appartenance à la plateforme «non signataire du même accord».
D’ailleurs, il est aisé de le prouver par la non-tenue, jusque-là, des réunions internes à chacune des parties prenantes. En sept mois bientôt d’existence, l’Accord du 31 décembre 2016 n’a jamais fait l’objet d’une séance d’évaluation au sein de l’une ou l’autre de deux parties prenantes…
A régime spécial, Constitution spéciale
Parenthèse ouverte vite refermée, on revient à la question principale suscitée par la dernière sortie médiatique de l’héritier Tshisekedi : «‘Transition Sans Kabila’ avec quelle Constitution ?».
Pour l’avoir récupérée de la «Convention des Congolais pour la Transition» opérant à l’étranger, Fatshi, ci-devant secrétaire général adjoint de l’Udps (poste non statutaire) et président du «Rassemblement/Limete» (poste honorifique) – devrait fixer l’opinion sur la faisabilité de cette option au risque de confirmer les propos discourtois tenus à son égard le 13 juillet 2017sur le site web 7sur7.cd par un certain Willy Delors Ongenda.
Pour rappel, cet internaute dont les idées sont plutôt proches de l’opposition combattante a estimé que Félix Tshisekedi «a commis une faute politique, une imposture et a prouvé qu’il a encore beaucoup à apprendre en la matière», avant de révéler qu’il a profité «d’un tête-à-tête confidentiel avec le Président du DNT» pour «s’approprier l’idée dont il ne connaît ni les mécanismes d’application moins encore la philosophie conceptuelle de l’action dénote si pas de la mauvaise foi, tout au moins de l’amateurisme politique». Il a terminé sa charge par cette sanction : «À travers cette imposture, M. Félix Tshisekedi a démontré que le RASSOP n’a aucun projet politique, aucune idéologie et donc n’est pas prêt ou capable de diriger notre pays»…
Effectivement, une Transition a ses spécificités. Depuis 1990, le pays a connu trois grandes phases de Transition, la première allant du 24 novembre 1990 au 17 mai 1997, la deuxième du 17 mai 1997 au 30 juin 2003 et la troisième du 30 juin 2003 au 6 décembre 2006 : «la première phase (…) a eu quatre textes tenant lieu de Loi fondamentale. La deuxième phase (…) en a eu un. La troisième phase (…) un également».
C’est connu de tout le monde : dans sa forme actuelle, la Constitution du 18 février 2006 – que toutes les parties prenantes à l’Accord du 31 décembre 2016 se sont engagées à respecter – n’est pas conçue pour gérer une Transition. Au demeurant, les préconisateurs du fameux régime spécial en cas de non-tenue des élections au plus tard le 19 décembre 2016 à 23h59 n’ont pas eu de ressources juridiques convaincantes pour soutenir devant des étudiants en droit leur initiative. Tout le monde l’a vite compris : «A régime spécial, Constitution spéciale».
Les masques vont tomber
Une «Transition Sans Kabila» n’est donc rien d’autre qu’un régime spécial. Qu’il prenne six mois comme le souhaite Fatshi n’a aucune importance dès lors que la Constitution en vigueur ne saura s’y appliquer. Que va-t-on alors faire de raisonnable ? Suspendre certains articles comme cela a été le cas de l’alinéa 1 de l’article 5 sur le référendum ? Ou suspendre carrément toute la Constitution pour lui substituer un Acte constitutionnel de la transition ?
Cela n’est possible que soit, à travers un énième dialogue ; soit, en impliquant les Parlementaires aux fins de modifications constitutionnelles, tout en espérant que ces élus consacrent leur propre illégitimité et leur légalité pour les beau yeux des promoteurs de l’idée d’une transition qui les dépouilles de leurs avantages électorau ne lieu et place de ceux qui leur ont accordé mandats.
Le non-sens de la proposition Félix Antoine Tshisekedi est d’autant plus flagrant qu’il implique le dépassement même du fameux délai d’une année dans lequel on veut enfermer l’Accord du 31 décembre 2017 pendant que «Les élections locales, municipales et urbaines seront organisées en 2018», lit-on au point IV.3 du chapitre IV relatif au Processus électoral !
C’est à croire que dans la tête du fils biologico-politique d’Etienne Tshisekedi – tout comme dans celle de ses «parrains» et compagnons du «Rassop/Limete», le scrutin en démocratie se limite à la présidentielle, aux législatives nationales et aux provinciales ; les élections à la base ne comptent pas.
En définitive, protagonistes internes (y compris la rue) et externes attendent du troisième conclave de la plateforme née à Bruxelles-Genval une réponse précise sur la thématique «Transition Sans Kabila et Constitution du 18 février 2006».
Les masques vont tomber…
Omer Nsongo die Lema avec Le Maximum