Il devient de plus en plus difficile d’avoir un échange cohérent et rationnel avec certains Congolais sur l’avenir de leur pays. Les insultes, les procès d’intention et les querelles de clocher prennent trop souvent le pas sur un débat objectif et sensé. Chacun y va de ses poncifs en forme de rengaines qu’il répète à longueur de journée. Ils se réduisent en quelques formules à l’emporte-pièce : « Il n’y a qu’à… ». C’est soit « Kabila doit quitter le pouvoir avant les élections », soit « Kabila doit partir en exil ou être arrêté ». On lit également dans les très volubiles réseaux sociaux souvent anonymes des appels incohérents : « touche pas à ma constitution », y lit-on à côté des appels enflammés à « l’instauration d’un régime de transition sous la tutelle de l’ONU » pourtant formellement exclu par ladite constitution… qui consacre la souveraineté pleine et entière de la RDC, membre à part entière des Nations-Unies. La haine et la discorde entretenue par les bienfaiteurs étrangers qui s’évertuent à opposer les Congolais les uns aux autres ont atteint des proportions telles que même les artistes nationaux qui osent aller se produire en Europe occidentale, notamment, sont systématiquement pris pour cibles par des groupes de leurs compatriotes qui menacent de les agresser. Leur crime : vivre au Congo en donnant, ce faisant, l’impression que les choses y sont aussi normales qu’ailleurs, contrairement aux campagnes auto-flagellatoires diffusées aux quatre vents par des bandes violentes dans la diaspora congolaise, soucieuses de justifier les statuts de réfugiés politiques qui leur permettent de poursuivre un exil qu’ils estiment (naïvement) doré.
Faute d’arguments objectifs rigoureux des (faux) intellectuels s’abîment dans une dangereuse stigmatisation basée sur l’origine des individus. Pourtant comme le constate fort opportunément l’architecte V. Linda, « chacun d’entre nous (Congolais de l’étranger) est marqué par l’expérience quotidienne en famille et au travail (…). Certains de mes enfants et des petits-enfants sont métissés. Dans ma profession, de projet en projet, j’assure l’encadrement du personnel (des Américain, des Chinois, des Hindous et des Afro-Américains). Seuls comptaient les objectifs organisationnels. Pas l’origine, la race ou l’ethnie des gens » écrit-il.
Cet exilé congolais cite Patrice Emery Lumumba qui, dans sa mémorable allocution du 30 juin 1960, s’était engagé à ce que les citoyens du Congo indépendant soient « traités en fonction de leurs mérites ». Il condamne ceux qui se laissent aller à s’occuper des origines présumées des personnes même lorsqu’elles occupent des positions de pouvoir, alors que l’on peut argumenter sur leur compétence. S’insurgeant contre ceux qui, à la faveur de la controverse autour d’une plainte déposée devant la justice belge contre Ministre congolais de la Justice, Alexis Thambwe Mwamba, il s’est indigné de lire un posting traitant ce dirigeant congolais de « sujet burundais ». « Je connais Alexis Thambwe Mwamba. Il n’est pas burundais. Il a été longtemps avec Mobutu. Il vient aussi de passer toute une décennie avec Kabila. Ne peut-on donc pas critiquer sa gestion ou des crimes qu’il aurait commis, au lieu de parler de cette prétendue origine étrangère ? », s’est-il insurgé.
JN