A Kalmar, au sud-est de la Suède, Maria, la mère de l’experte suédoise Zaida Catalan, et sa fille cadette Elizabeth n’ont pas fait leur deuil en réceptionnant, le 4 avril dernier, la dépouille étêtée de leur fille et sœur aînée de 36 ans, une juriste très engagée. Elles tentent de reconstituer ce drame qui bouleverse leur vie.
Un soupir au loin
Le dimanche 12 mars à 14 h 50, le jour du rapt, Elizabeth, la sœur cadette de Zaïda, est chez sa mère à Kalmar. Le téléphone sonne. C’est le numéro de sa sœur Zaida qui apparaît. Heureuse, elle décroche en branchant le haut-parleur. “Mais je ne pouvais entendre sa voix » confiait-elle le 6 avril au tabloïd suédois “Expressen”. Il y avait des voix d’hommes en fond, certainement plus de cinq, et ils parlaient un anglais avec accent sur un ton très décontracté. « Il n’y avait pas de bruits menaçants en fond”, raconte Elizabeth.
Elle croyait alors que Zaida avait appelé par erreur et qu’elle se trouvait dans un café. “Puis j’ai entendu un soupir. Je présume que c’était Zaida. Puis la communication, qui a duré environ vingt secondes, a été coupée.” Elizabeth a tenté de rappeler sa sœur, en vain.
Inquiètes, la mère et la sœur de l’experte ont alerté immédiatement les Nations unies et le gouvernement suédois, mais les recherches entamées ont pris du temps, jusqu’à la découverte macabre des deux disparus.
L’Onu ne répond pas
Zaida a été identifiée grâce à un tatouage autour du poignet gauche, portant l’inscription latine “ad astra per aspera” (Vers les étoiles par des sentiers ardus). Sa famille a choisi de fournir des détails au sujet de l’enquête sur ce crime impuni.
“Zaida a été abattue de deux balles dans le dos et d’une troisième à la poitrine, ensuite elle a été décapitée”, dit Elizabeth. Et “sa tête n’est pas ici. Vous vous rendez compte ?! C’est écœurant. Les diables de porcs !” s’indigne la mère.
L’examen mené par des médecins légistes en Ouganda n’a montré aucun signe de viol avant le meurtre, démentant des informations parues, entre autres, dans un média d’opposition congolais.
Très critique envers l’employeur de sa sœur, Elizabeth a posé des questions à l’Onu, qui “n’a pas pu ou voulu y répondre”.
Elle cherchait notamment à savoir qui était le responsable du groupe d’experts dont faisait partie Zaida Catalan et Michael Sharp ; quelles mesures de sécurité avaient été prises pour cette mission en zone de guerre ; qui l’avait autorisée.
“Zaida ne m’a pas parlé de cette mission avant. Si j’avais su qu’elle était à risques et qu’elle s’y aventurait sans protection, je ne l’aurais jamais laissée y aller, jamais de la vie”, assure Maria, sa mère. Elle croit que sa fille ne prenait pas de risques inutiles et qu’“elle n’aurait pas mis sa vie en danger. Elle avait plein de projets en Suède, voulait acheter une maison de campagne, cet été”.
Une enquête indépendante
La famille a appris, en accueillant la dépouille mortelle, que la mission de Zaida avait été réalisée sans personnel de sécurité. “C’est terrible. On ne peut pas croire que ce soit vrai!”, s’exclament mère et fille, qui ont perdu toute confiance dans le système onusien. “Nous ne pensons pas que l’Onu a été à la hauteur. Elle refuse d’assumer ses responsabilités pour ce qui s’est passé”, constatent-elles, réclamant justice.
La famille frustrée et meurtrie exige la mise sur pied d’une enquête indépendante menée par les autorités suédoises et américaines pour déterminer les responsabilités dans ce double crime.
Le 4 avril, à l’arrivée du cercueil à Stockholm, la ministre des Affaires étrangères Margot Wallström a exprimé sur son compte Twitter, “le chagrin du gouvernement pour la mort de Zaida Catalan”, affirmant que “les responsables doivent être poursuivis en justice”.
AVEC EXPRESSEN