L’opinion connaît, depuis mardi 9 mai dans la mi-journée, la composition du gouvernement d’union nationale dirigé par le 1er ministre/Rassop (Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement) nommé un mois plus tôt, Bruno Tshibala. Une équipe de 60 personnes comprenant, outre le 1er ministre, 3 vices-premiers ministres, 9 ministres d’Etat, 35 ministres et 11 vice-ministres, que d’aucuns jugent éléphantesque : la nouvelle équipe gouvernementale bat le record de ministres d’Etat, c’est déjà cela. Mais il faut sans doute voir dans cette pléthore le souci de ratisser large et de rassembler autant que faire se peut. Par rapport à l’objectif visé, c’est-à-dire, dans l’optique de l’organisation d’élections aussi peu contestables que possibles, associer autant de tendances politiques que possible à la gestion des périodes pré-électorales et électorales. Dans cette optique, l’équipe Bruno Tshibala, c’est déjà mieux que l’équipe précédente, dirigée par l’UDPS Samy Badibanga, dont une grande partie des ministres fait, du reste, partie de la nouvelle mouture. L’ordonnance n° 17/005 du 8 mai 2017 signée par le Président de la République s’inscrit donc dans la logique enclenchée avec le dialogue de la Cité de l’OUA, qui s’est poursuivie à travers le dialogue du Centre interdiocésain de Kinshasa dont le but ultime était de ratisser plus large qu’en septembre 2016, au terme des assises facilitées par le Togolais Edem Kodjo.
Certes, il n’aura pas été possible d’inclure tout le monde dans la démarche unificatrice souhaitée par tous, le Président de la République, Joseph Kabila en premier. L’inclusivité parfaite derrière laquelle certains se sont abrités s’est avérée un vaste leurre susceptible de compromettre plus dangereusement encore la poursuite du laborieux processus électoral rd congolais. Le centre interdiocésain aura révélé que les acteurs politiques sont plus portés sur le partage du pouvoir au terme de conciliabules répétitifs et sur le dos du souverain primaire que vers les urnes. Dans les années ’90, à la fin du règne du Maréchal Mobutu, la RD Congo avait mis quelque 7 années en débats stériles sous le prétexte fallacieux selon lequel laisser Mobutu organiser les élections favoriserait la tricherie. Des attermoiements politiciens stoppées net en 1997 par une rébellion armée qui avait largement profité du délitement de l’Etat consécutif à l’absence durable d’un pouvoir légitime. 7 années, c’était plus que la durée d’un mandat présidentiel.
Dans ces conditions, courir derrière une inclusivité fallacieuse équivaudrait à chercher midi à 14 heures, comme on dit, et à reculer indéfiniment l’organisation d’élections susceptibles de permettre au peuple rd congolais de se choisir ses dirigeants pour les 5 années à venir et, ce faisant, habituer les uns et les autres au retour cyclique aux urnes pour évacuer définitivement le problème de la légitimité du pouvoir.
Le gouvernement d’union nationale dirigé par le Rassop Bruno Tshibala, c’est donc, en plus des ralliements à l’objectif d’une co-organisation des prochains scrutins acquis au terme du dialogue de la Cité de l’OUA, l’arrivée d’une partie de la frange de l’opposition née à Genval en Belgique à l’instigation d’Etienne Tshisekedi et Cie. On y enregistre l’arrivée de Joseph Kapika, un proche du défunt président connu pour avoir pris part aux rencontres ultra sécrètes Ibiza et de Venise. Mais aussi Jean-Pierre Lisanga Bonganga, le coordonnateur du groupe des Amis d’Etienne Tshisekedi, récemment mué en plate-forme politique. Le député national Emery Okundji des Fonus y représente sans doute plus que tout autre l’aile Kasavubu du Rassop dirigé par son frère, Joseph Olenghankoy. De même que le professeur Tshibangu Kalala, le juriste maison à qui revient le mérite d’avoir bétonné le dossier de cette aile du Rassop créée en réaction à la désignation du Katumbiste Pierre Lumbi Okongo en remplacement d’Etienne Tshisekedi à la présidence du Comité National de Suivi de l’Accord et du Processus Electoral. Avec eux, il faut ajouter le député Lumeya Dhu Maleghi, Ingele Ifoto et autre Eva Mwakasa.
Restent en dehors de cette tendance consensuelle vers l’organisation dans les meilleures conditions des scrutins présidentiel, législatifs et sénatoriales, les animateurs de l’aile dure du Rassop. Essentiellement donc, le G7 katumbiste et une partie de l’UDPS d’Etienne Tshisekedi, qui peuvent constituer un contrepoids rassurant quant à l’objectivité et à la transparence du processus en cours même s’ils ne font pas parties du gouvernement dit d’union nationale. Le Rassop/Limete, comme on le désigne pour le distinguer du Rassop/Kasavubu de Joseph Olenghankoy et Cie, vient d’ailleurs de se constituer en groupe parlementaire de l’opposition, et demeure donc dans les institutions de la République.
Le gouvernement Bruno Tshibala, c’est le gouvernement du ras-le-bol du chantage à l’inclusivité parfaite. On prend ceux qui en veulent et fonce vers les urnes.
Selon des sources bien informées, c’est ce samedi 13 mai que Bruno Tshibala et son équipe subiront l’épreuve de l’adoubement ou non par la chambre basse du parlement. Pour ce grand oral, le nouveau 1er ministre, dont les services s’attelaient à la rédaction du discours programme, devrait se pencher sur deux points essentiels : l’organisation des élections et l’amélioration du social des rd congolais, selon les mêmes sources.
J.N.
Voici la composition complète du gouvernement Tshibala