Pas de miracle annoncé jeudi 15 décembre 2016 au Centre Interdiocésain de Kinshasa où les évêques de la Conférence Episcopale Nationale (CENCO) tentaient encore, à la fin de la journée, de concilier l’inconciliable. Pour l’essentiel, en effet, les divergences nées de la confrontation des options de l’accord politique du 18 octobre 2016 à la Cité de l’OUA aux propositions (impositions) du Rassemblement katumbiste-tshisekedi sont demeurées sensiblement intactes.
Sur la gestion de l’après 19 décembre prochain, les parties ne s’étaient pas encore entendues, les radicaux du duo Katumbi – Tshisekedi s’arc-boutant sur l’exigence du départ immédiat et sans condition de Joseph Kabila et une transition sans le Chef de l’Etat élu en 2011, sous un régime spécial qui est un véritable déni de la constitution. Ce à quoi la Majorité présidentielle et l’opposition ainsi que les membres de la société civile parties prenantes au dialogue disent niet au motif qu’il n’est pas question de modification constitutionnelle. Le Rassemblement a voulu imposer une lecture sélective de la constitution, en en acceptant certains passages tout en rejetant d’autres. « Nous sommes pour l’application intégrale de la Constitution », martelait l’ATD José Makila Sumanda, à la presse, entre deux séances de travaux en commissions.
Sur les mesures dites de décrispation également, pas de progrès notables. Si elle est favorable à l’élargissement des personnes détenues pour leurs opinions, la majorité présidentielle reste ferme sur le sort de celles qui sont poursuivies ou condamnées pour des crimes de droit commun. Ce qu’au Rassemblement on n’entend pas de la même oreille : les Moïse Katumbi, Maïtre Muyambo, Moïse Moni Della, Eugène Diomi Ndongala, Antipas Mbusa Nyamuisi, Roger Lumbala et Floribert Anzuluni seraient tous sans distinction détenus ou « exilés politiques ». On exige sans rire qu’ils « recouvrent leurs libertés » ou qu’ils soient autorisés à revenir au pays avec l’assurance de ne plus être poursuivis par la justice. La revendication coince, bruyamment. Quel serait le sort de la justice rd congolaise si Moïse Katumbi, un justiciable poursuivi et condamné par défaut dans une affaire de stellionat qui l’oppose à des privés (la famille Stoupis de Lubumbashi) était tout simplement mis hors cause pour des raisons d’ordre politique ? Que penser des autres victimes ou coupables d’infractions d’abus sexuels sur mineures à travers le pays si le prédateur invétéré Eugène Diomi Ndongala dont il est avéré que c’est le sport favori était relaxé sans autre forme de procès ? « C’est impensable que des gens qui aspirent à un Etat de droit se mobilisent pour de telles exigences », s’insurge un parlementaire de la majorité participant aux travaux du centre interdiocésain. Quant aux acteurs politiques comme Antipas Mbusa Nyamuisi et Roger Lumbala qui ont pris le parti de s’expatrier pour échapper à la justice à la suite de dénonciations internationales quant à leurs activismes dans l’agression de la RD Congo par le M23, il est difficile de les faire passer pour d’innocents exilés politiques, explique-t-on dans les couloirs du ministère de la Justice. « C’est une forme déguisée pour faire table rase de tout : institutions politiques, pouvoir judiciaire … ce n’est pas pour cela que les pourparlers ont été engagés. C’est pour parfaire ce qui a été fait à la Cité de l’OUA », souffle au Maximum un délégué de l’opposition politique modérée interrogé jeudi dans la mi-journée outré par l’agitation d’Olivier Kamitatu Etsu, venu exprès de Bruxelles pour obtenir « coûte que coûte » la relaxe de ses amis. A la limite, la majorité, emmenée par le garde des sceaux Alexis Thambwe Mwamba, a obtenu qu’une commission spéciale de magistrats, chargée de traiter tous les dossiers soit mise sur pied pour statuer là-dessus dans les meilleurs délais.
Parfaire ou refaire ? Ci-git tout l’enjeu des discussions pilotées par les calotins au Centre Interdiocésain, dont tous n’ont pas la même acception, loin de là. Si les parties prenantes aux assises qui se sont clôturées en octobre dernier à la Cité de l’Union africaine au Mont Ngaliema à Kinshasa et l’accord politique qui en est issu, il s’agit d’amender ou d’améliorer, pour les radicaux du Rassemblement tshisekediste-katumbiste, il est manifestement question de faire table rase des conclusions de la Cité de l’OUA, quitte à rédiger une espèce de constitution de la transition. Et ça bloque désespérément.
Sur la tenue des élections, dont la présidentielle, la Majorité présidentielle et les parties prenantes au dialogue de la Cité de l’OUA s’en tiennent à 2018, comme arrêté en fonction des estimations techniques fournies en son temps par la CENI. Là où les radicaux campent pour leur part sur l’organisation de la présidentielle en 2017, sans présenter un argumentaire précis à l’appui de cette prétention calendaire. De même que la Majorité Présidentielle s’oppose résolument à ce qu’il soit inscrit dans l’accord à intervenir au Centre Interdiocésain que le Président de la République signe quelque engagement que ce soit à ne pas se représenter, la déclaration de non candidature d’un président de la République sortant n’étant prévu dans aucune disposition constitutionnelle ou légale.
Jusque-là donc, pas de miracle, même de la Ste Vierge Marie, au Centre interdiocésain de Kinshasa : les travaux ne se clôtureront pas normalement aux dates prévues.
J.N.