Juste 11 millions de dollars des recettes le mois, au maximum, et ce grâce à la nouvelle taxe sur la logistique terrestre. Le port de Matadi paie au prix fort la concurrence du tout nouveau port international de Ledya. Le DG Kimbembe Mazunga dont une bonne frange des matelots de l’ex-ONATRA réclame le départ, l’a reconnu, dans l’ambiance de grève qui paralyse la SCTP.
Pourtant, quelques mois plus tôt, le même DG rassurait que la rentabilité du port de Matadi ne serait nullement impactée par le nouveau port. Il est établi depuis des lustres que quand le département des ports maritimes éternue, tous les autres départements de la Société commerciale des transports et des ports, SCTP, ex ONATRA, attrapent un gros rhume. De l’aveu du DG Kimbembe, la société accuse actuellement des déficits de près de 400 millions de dollars contre 600 il y a quelques deux ans. Kimbembe fonde désormais ses espoirs sur la dizaine de nouvelles voitures acquises pour consolider la relance du trafic sur le chemin de fer Kinshasa-Matadi., et par conséquent, assurer une paie régulière des agents. Qui accusent 2 à 3 mois d’arriérés des salaires à Kinshasa et dans le Kongo central. Le retard des salaires se compterait en termes d’années dans d’autres zones d’exploitation comme à Mbandaka, a-t-on appris. De sources syndicales, il nous revient que les arriérés des salaires sont telle une hydre de Lerne, cet animal mythique dont les têtes croissaient au fur et à mesure qu’on les coupait. Par ailleurs d’aucuns soutiennent que la voie ferrée avec des prix aussi élevés des billets (65 à 15 dollars) selon les classes, ne saurait guère tenir la concurrence des exploitants routiers. Selon un directeur qui a tenu ferme à son anonymat, la SCTP réhabilite ses infrastructures (bateaux Kokolo et Gungu immobilisés, voie ferrée, ports… bâtiments résidentiels) pour certes les rendre compétitives mais dans l’unique visée d’en céder la gestion à une firme privée internationale. L’on sait, le dossier avait fait l’objet d’une question orale avec débat collée à la ministre du Portefeuille, Louise Munga, par le sénateur Jacques Ndjoli. Dans ses réponses, la ministre du Portefeuille n’aura jamais déclaré que le projet était annulé. Voilà plus d’une année que le ministère du Portefeuille a lancé, le 12 octobre 2015, l’avis de pré qualification relatif à la mise en concession intégrée des ports de Boma, Matadi et Kinshasa et du chemin de fer Matadi-Kinshasa, CFMK. Il s’en est suivi un conflit de compétence sinon de prérogatives entre le COPIREP, maître d’ouvrage délégué à l’ARMP, Autorité de régulation des marchés publics.
Pour le Comité de pilotage de la réforme des entreprises publiques, la concession des ports de Matadi, Boma et du chemin de fer Matadi-Kinshasa, tous patrimoines de la SCTP ex-ONATRA, relève plutôt d’un acte de désengagement de l’Etat d’une entreprise dont il demeure actionnaire unique. Et par conséquent cette opération est régie par la loi n°08/008 du 7 juillet 2008 portant dispositions générales relatives au désengagement de l’Etat des entreprises du Portefeuille. Le Secrétaire exécutif ai du Comité de pilotage de la réforme des entreprises publiques, Alex Nkusu, l’a fait savoir sans fioritures dans une correspondance à l’ARMP. Qui, bien au contraire, se fondant sur la loi 10/010/du 27 avril 2010 relative aux marchés publics, tient à avoir droit au chapitre. Toutefois, la procédure du COPIREP a fait du chemin avant de se heurter au bureau national syndical de l’ex-ONATRA. Le bureau syndical de la SCTP, Société commerciale des transports et ports, avait d’ailleurs adressé le 16 octobre 2015 une correspondance au Premier ministre, à l’époque Matata Ponyo, afin de surseoir à l’appel d’offres portant sur la privatisation partielle de la SCTP.
Pour la vingtaine des syndicats de la SCTP, l’appel d’offre viole la loi portant dispositions générales relatives au désengagement de l’Etat des entreprises du portefeuille. Les syndicalistes ont notamment évoqué l’article 3 du chapitre 2 de cette loi qui fait obligation à l’Etat de remettre à niveau les entreprises réformées avant toute cession. Ils proposent à Matata Ponyo de reconsidérer cet avis d’appel d’offres et de faciliter la réouverture des négociations transparentes sur la réforme de la SCTP. Les syndicalistes ont appelé le Premier ministre au respect du moratoire de trois ans pour cette remise à niveau des infrastructures d’exploitation tel que recommandé par le consultant Canadian pacific consulting services (CPCS). Ils font par ailleurs remarquer que les éléments d’actif immobilisés de la SCTP, publiés dans cet avis d’appel d’offre, avaient été contestés par le passé pour n’avoir pas fait l’objet d’un inventaire exhaustif pouvant conduire à la fixation réelle du capital de la SCTP. Ce qui a d’ailleurs conduit, selon ces syndicalistes, à la minoration des données de la SCTP. Mais il appert bien que les dés ont été déjà jetées. Le sort de l’ex-ONATRA…scellé. Ce n’est pas un secret d’Etat, l’ambassadeur de France en RDC, Luc Hallade a, au lendemain de la nomination de Kimbembe Mazunga, Vicky Katumwa à la SCTP, été voir le Premier ministre, Matata Ponyo. « Une firme française est positionnée pour reprendre le chemin de fer Matadi-Kinshasa », avait-t-il confié à la presse au sortir de son entretien avec le chef du gouvernement de la RDC. Le gouvernement r-dcongolais a, en effet, reçu 1.000.000 d’euros de l’AFD, Agence Française de Développement, en vue, notamment, de mener des études pour la mise en partenariat public privé au sein de la Société Commerciale des Transports et Ports, ex-ONATRA. C’est une lapalissade, la main qui donne est toujours au-dessus de celle qui reçoit : l’on voit mal la France sortir plus de USD 1,3 millions pour un projet dans lequel ses intérêts ne se retrouveraient pas. L’ombre de Bolloré plane, tout naturellement, sur ce dossier d’appel d’offre controversé.
POLD LEVI