Le sujet est encore tabou. L’aide au développement accordé aux pays africains préoccupe la société Civile africaine. Mettre en cause le bien-fondé des milliards d’euros ou de dollars déversés chaque année en Afrique est un sacrilège pour la grande majorité des dirigeants politiques occidentaux. Pourtant, il y a quelques années, une économiste Zambienne, Dambisa Moyo, dans son ouvrage dénonçait non seulement l’inefficacité de cette l’aide mais aussi ses conséquences.
Dambisa Moyo appelle de ses vœux un modèle de développement fondé sur le commerce et le marché. Au cours de 50 dernières années, le montant total de l’aide au développement transféré des pays riches vers l’Afrique s’élève à plus d’un trillion de dollars (mille milliards). Ceci inclut des dons directs ainsi que des prêts à taux réduits. A l’heure actuelle, l’aide représente environ 15% du Produit intérieur brut, PIB de l’Afrique. Ceci a-t-il permis de faire reculer la pauvreté ? Non, répond Dambisa Moyo.
Au contraire, l’aide au développement encourage la corruption et permet à des régimes de se maintenir artificiellement. En raison des montants importants qu’elle engage, elle attise des convoitises et peut aviver des tensions ethniques et peuvent parfois conduire à la guerre civile.
Sur le plan économique, l’aide recul vient à la compétitive des secteurs productifs, réduisant leur capacité à exporter. Elle contribue aussi au maintien de secteurs publics pléthoriques qu’il conviendrait de réformer en profondeur. Ce n’est donc un hasard si, selon l’économiste Zambien entre 1970 et 1998, c’est-à-dire durant la période au cours de laquelle l’aide au développement était au plus haut, la pauvreté augmentait de 11% à 66%.
Au fond, cette aide souffre d’un défaut essentiel, elle détruit les incitations à évoluer, à se reformer et à se développer. Pourtant ; leur suppression n’aggraverait-elle pas la situation ? Au contraire, il s’agit d’une condition essentielle pour que l’Afrique trouve le chemin d’une croissance durable. A la base de cette idée se trouve une contraction simple : tous les pays qui ont connu un développement important, que ce soit en Europe, en Afrique ou en Asie, doivent leurs performances non pas à l’aide extérieur mais à leur capacité de créer des richesses. «Il y a plus de 30 ans, rappelle Dambisa Moyo, le Malawi, le Burundi et le Burkina Faso disposaient d’un revenu par habitant supérieur à celui de la Chine». Depuis des années, la Chine connaît une croissance économique soutenue parce qu’elle a réussi à gagner en compétitivité et à attirer à elle des investissements étrangers. Ce n’est pas encore le cas de nombreux pays africains.
Solutions possibles pour l’Afrique
En fait, la moitié de l’ouvrage de Dambisa Moyo offre des solutions possibles pour l’Afrique. Première piste de l’économiste : s’ouvrir au commerce extérieur et aux investissements directs étrangers. Aujourd’hui l’Afrique ne représente que 1% des échanges mondiaux alors qu’elle est proche d’un marché de taille, le marché européen. Or, une réelle insertion dans le commerce international suppose un contexte politique et juridique stable, ainsi accéder aux marchés mondiaux et vivre de leur production, ce qui serait beaucoup plus efficace que de leur octroyer des aides au développement.
Enfin, tantôt que de financer par des prêts à taux réduits, l’écoute suggère que les Etats Africains se financent par émission d’obligation sur les marchés de capitaux. Ceci les pousserait à respecter une discipline plus stricte : ils devraient convaincre les investisseurs de leur solidité financière.
Derrière l’ensemble des propositions avancées par Dambisa transparait une propriété. Elle fait allusion du Botswana qui fait figure d’exception en Afrique. En fait, note-t-elle, entre 1968 et 2001 la croissance moyenne y a été de 6,5% en raison des politiques favorisant la liberté économique : ouverture des marchés à la concurrence internationale, politique monétaire non inflationniste avec une pression fiscale modérée. Il ya donc de fatalité concernant l’Afrique, tranche-t-elle à vif.
R.M.