Afrique du Sud, Nigéria, Egypte et Proche-Orient et même l’Union européenne … la demande de l’énergie électrique auprès de la RD Congo devient un enjeu international. Le projet Grand Inga, plus de 40.000 mégawatts, dotera le pays, foi d’experts, d’un atout géostratégique et financier à la dimension du Gazprom russe… à condition que Kinshasa en conserve le leadership et la souveraineté.
Sud-africains et rd congolais sont encore à l’étape des négociations sur Inga III, alors que le dossier inhérent à l’appel d’offre en vue de la sélection de l’entreprise devant construire la centrale piétine. De l’avis des experts, le projet ne connaîtra pas un début de commencement en octobre 2016 comme avancé par les deux parties.
Faisant suite aux deux précédentes centrales hydroélectriques déjà opérationnelles (Inga I et II), l’étude de faisabilité réalisée par le groupement AECOM-EDF, présente le projet Grand Inga en un chapelet de 7 centrales dont Inga III, basse chute, constitue la première phase. Sa capacité installée sera de 4.755 mégawatts alors que celle d’Inga III, haute chute, est de 3.030 mégawatts. Inga IV aura une puissance de 4.200 mégawatts contre 6.970 pour Inga V, tandis que Inga VI, VII et VIII, auront respectivement 6.680, 6.700 et 6.740 mégawatts.
Le traité énergétique pour le développement du Grand Inga conclu le 23 octobre 2013 à Kinshasa, entre le président rd congolais Joseph Kabila et le président sud-africain Jacob Zuma, reconnaît le complexe hydroélectrique d’Inga comme «actif national appartenant au peuple congolais». Dans son discours, le 14 décembre 2015 devant le congrès, Joseph Kabila a annoncé, pour « à moyen terme [2018 selon les experts], la construction d’Inga III basse chute devant produire 4.800 MW dont 2.300 destinés à la satisfaction de la demande intérieure».
L’interrupteur du continent
Le reste, soit 2.500 MW, sera vendu au partenaire sud-africain. Qui, selon le traité convenu avec la RD Congo, jouira par la suite, d’un droit d’achat de 30% d’énergie produite sur chacune de 6 autres centrales du Grand Inga. La RDC est également en pourparlers avec le Nigeria pour la vente de l’énergie d’Inga IV.
Les négociations avec l’Egypte évolueraient également. Selon des experts du ministère rd congolais de l’Energie, le Sud-Soudan, le Soudan ainsi que le Kenya ont souhaité se connecter à la future ligne Inga-Egypte. D’après l’ONG Counter Balance, des réflexions sont mûries afin que du pays des Pharaons, le courant d’Inga alimente également le Moyen-Orient. Selon la même source, des études en vue de la construction d’une ligne haute tension, passant sous la Méditerranée, pour alimenter l’Europe, se poursuivent depuis quelques années. Ainsi le projet Grand Inga rapporterait gros à la RDC, note Counter Balance citant notamment la Banque mondiale. Selon la Banque africaine du développement, BAD, quelque 100 milliards de dollars seraient nécessaires pour la réalisation du Grand Inga.
L’intérêt que le projet suscite et le montage financier qu’il exige devraient, selon la BAD, utilement ouvrir Grand Inga à d’autres acteurs que la RDC et son partenaire l’Afrique du Sud. L’on sait déjà que des intérêts américains ont assuré le Premier ministre r-dcongolais, Augustin Matata Ponyo, d’injecter 5 milliards de dollars dans le projet Grand Inga. L’Agence française de développement ou encore la Banque européenne d’investissements ont également manifesté leur intérêt. Mais aussi des privés. La mouvance de la société civile r-dcongolaise redoute plutôt que des puissants intérêts financiers ne dépossèdent la RDC de son patrimoine. Sans doute, pour plus de clairvoyance et la maîtrise du projet, le gouvernement r-dcongolais a sollicité l’expertise du bureau d’études de CDF Suez ou encore du cabinet américain d’avocats Orrick Herrington & Sutcliffe. Fin 2015, le Chef de l’Etat r-dcongolais a également créé l’Agence de développement et de promotion du site d’Inga (ADEPI).
Gestion ténébreuse.
Dans tous les cas de figure, des associations de lutte contre la corruption (LICOCO, CORAP, etc.,) redoutent plutôt la gestion à l’interne de cette future manne financière que devrait rapporter le projet Grand Inga. Déjà, les centrales Inga I et II ont représenté plus de 30% de la dette publique de la RDC estimée à 12 milliards de dollars en 2010 quand le pays a atteint le point d’achèvement de l’initiative pour les pays pauvres très endettés, IPPTE, grâce à laquelle 90% de cette dette ont été annulés. D’aucuns sont d’avis que les deux projets énergétiques n’auront été que des éléphants blancs. L’apport de la vente du courant d’Inga à l’étranger qui représentait, durant la période faste (1990-2005) de la Société nationale d’électricité, 20% de la balance commerciale de la RDC, s’est complètement réduit en peau de chagrin dans le budget de l’Etat… pour ne pas dire nul. Quelque 32 millions de dollars versés par le Congo d’en face pour sa consommation du courant d’Inga ont été détournés. Point d’enquête. Les auteurs présumés du péculat occupent toujours de hautes fonctions au sein de l’appareil d’Etat. Concomitamment, à l’interne, le taux de desserte en énergie électrique en RDC n’est plus que de 9%- 15% selon les sources officielles) alors que la moyenne en Afrique subsaharienne se situe autour de 30%.
MABENGO MATETA
Stagiaire UPN