Insolite : jusqu’à 13h00 le dimanche 21 décembre 2016, la dépêche par laquelle Rfi a annoncé dans ses journaux du matin la position du G7 par rapport au communiqué du Quartet « ONU-UA-UE-OIF » du 16 février 2016 n’était toujours pas affichée sur sa page web pendant que celle concernant Martin Fayulu l’était à 8h58. C’est seulement à 13h05 qu’elle a été mise en ligne. Pourquoi ce gel de près de 10 heures d’une nouvelle d’une telle importance ? La réponse pourrait ne jamais venir. On sait maintenant que, s’inspirant sur une base purement « empirique » du schéma haïtien d’élection d’un Président intérimaire sous le mandat duquel un scrutin mal embouché sera organisé dans les 120 jours, ces « champions du respect de la constitution rd congolaise » ont pris ainsi le temps de peaufiner leur As de pique qu’ils ont abattu sans se soucier le moins du monde de ladite constitution. La carte de ces ex-Kabilistes passés à l’opposition il y a de cela cinq mois à peine révèle enfin les raisons de leur rejet du Dialogue et leur refus d’une concertation « technique » avec la Céni.
Il devient aujourd’hui clair comme l’eau de roche que le G7 s’inscrit dans une véritable stratégie du chaos. Ainsi, dans la logique de ses membres, si les élections concernées par les délais constitutionnels, entendez la présidentielle et les législatives, ne sont pas organisées « à bonne date », c’est-à-dire, selon leur propre interprétation, avant le 20 décembre 2016, il ne restera plus qu’à constater le vide juridique à partir duquel il va falloir envisager la désignation par la classe politique d’un Président de la République Démocratique du Congo à titre intérimaire.
« L’organisation des scrutins à bonne date équivaut à tenir ces élections dans les délais constitutionnels“, souligne le G7 avant de prévenir que passé ce délai, se créera une vacance du pouvoir au sommet de l’Etat. Et c’est le président de la République seul qui en portera la responsabilité. Dans ces conditions, poursuit le communiqué, les élections devront être organisées sous la responsabilité d’un président intérimaire. Cela dans un délai de 120 jours conformément à la Constitution actuellement en vigueur », peut-on lire dans leur communiqué relayé par Rfi.
Cette prise de position, inspirée de l’élection à Haïti du Président provisoire Jocelerme Priver en succession de Michel Martelly – dont le mandat est arrivé à terme le 6 février 2016 – est pourtant tout ce qu’il y a d’irrationnel.
En Haïti, le vide juridique s’est créé après la tenue du premier tour de la présidentielle 2016. Le blocage s’est produit faute de second tour de l’élection présidentielle prévue par la constitution de cet Etat des Caraïbes, le candidat de l’opposition, Jude Célestin, ayant refusé d’affronter celui de la Majorité, Jovenal Moïse.
En fait, le G7 entend mettre en exécution l’article 76 de la Constitution dont voici le libellé : « La vacance de la présidence de la République est déclarée par la Cour constitutionnelle saisie par le Gouvernement. Le Président de la République par intérim veille à l’organisation de l’élection du nouveau Président de la République dans les conditions et les délais prévus par la Constitution. En cas de vacance ou lorsque l’empêchement est déclaré définitif par la Cour constitutionnelle, l’élection du nouveau Président de la République a lieu, sur convocation de la Commission électorale nationale indépendante, soixante jours au moins et quatre-vingt-dix jours au plus, après l’ouverture de la vacance ou de la déclaration du caractère définitif de l’empêchement. En cas de force majeure, ce délai peut être prolongé à cent vingt jours au plus, par la Cour constitutionnelle saisie par la Commission électorale nationale indépendante. Le Président élu commence un nouveau mandat ».
Nul besoin d’être juriste ni constitutionnaliste pour s’en rendre compte qu’en proposant cette solution à la haïtienne, le G7 viole délibérément la Constitution congolaise en ce qu’aucune disposition ne prévoit l’élection d’un Président de la République intérimaire en RDC. L’article 75 dispose plutôt «En cas de vacance pour cause de décès, de démission ou pour toute autre cause d’empêchement définitif, les fonctions de Président de la République, à l’exception de celles mentionnées aux articles 78, 81 et 82 sont provisoirement exercées par le Président du Sénat ». On n’est nullement dans l’un de ces cas de figure.
Relevons seulement que par l’article 78, l’exception est que le Président intérimaire ne peut pas nommer un Premier ministre. Ce dernier reste en place.
Par l’article 81, l’exception est qu’il ne peut ni nommer, ni relever de leurs fonctions, encore moins révoquer les ambassadeurs et les envoyés extraordinaires, les officiers généraux et supérieurs des forces armées et de la police nationale, le chef d’état-major général, les chefs d’état-major et les commandants des grandes unités des forces armées, les hauts fonctionnaires de l’administration publique, les responsables des services et établissements publics et les mandataires de l’Etat dans les entreprises et organismes publics, excepté les commissaires aux comptes. Ces hauts cadres restent en place.
Par l’article 82, l’exception est qu’il ne peut nommer, ni relever de leurs fonctions ou, le cas échéant, révoquer par ordonnance « les magistrats du siège et du parquet ». Ces hauts magistrats restent aussi en place.
Mieux, l’article 148 dispose, à propos de l’Assemblée nationale et du Sénat, qu’«Aucune dissolution ne peut intervenir dans l’année qui suit les élections, ni pendant les périodes de l’état d’urgence ou de siège ou de guerre, ni pendant que la République est dirigée par un Président intérimaire». Ces institutions restent en place.
Les Constitutionnalistes – il y en a une flopée au sein du G7 – le savent bien. Pourquoi font-ils semblant d’inventer la roue ?
Le G7 est donc prêt à s’assumer
C’est justement pour cela que la carte abattue par le G7 est celle du mépris de Mwando, Lumbi, Kyungu, Endundo, Kamitatu, Lutundula, Banza et, assurément, Katumbi à l’égard de l’opinion nationale. Car, même si le stratagème adopté par cette frange des nouveaux venus dans l’Opposition est de contourner l’alinéa 2 de l’article 70 selon lequel « A la fin de son mandat, le Président de la République reste en fonction jusqu’à l’installation effective du nouveau Président élu », l’initiative d’une désignation du Président ne se justifie que par la présence d’un électorat.
En Haïti, constituent cet électorat les députés et les sénateurs. En RDC – si l’on suit le schéma du G7 – il va falloir réunir le congrès comprenant des Sénateurs (pourtant réputés tous fin mandat depuis 2012) et des Députés qui seront, eux aussi, fin mandat à partir du 16 février 2017, ce pour avoir été « validés » le 16 février 2012… Sans préjudice de la déconvenue qui serait la leur ‘in fine’, les deux chambres législatives en question étant tant toujours à majorité kabiliste.
Mais la question qui vaut la peine d’être posée est celle de savoir est de savoir par quelle alchimie les initiateurs de ce schéma alambiqués uns et pensent réaliser pareil exploit !
Maintenant qu’ils ont enfin révélé eux-mêmes leur intention véritable, il revient à tous les protagonistes internes et externes de prendre acte du fait que pour le G7, les considérations techniques de la CENI ne comptent pas, pas plus que d’ailleurs les avis et recommandations de la Communauté internationale.
Preuve est, si besoin est, que ce regroupement est prêt à s’assumer dans la stratégie du chaos qui lui tient lieu de soubassement idéologique.
LE MAXIMUM AVEC OMER NSONGO D.L.