L’affaire du double meurtre Des deux experts onusiens lâchement assassinés au Kasaï Central au mois de mars dernier a pris une tournure particulière il y a 48 heures, grâce à ce qui a été présenté par RFI comme une révélation. Selon une enquête dite exclusive de notre consœur Sonia Rolley de RFI, auteure d’une enquête parallèle à la justice rd congolaise chargée du dossier, les versions de la justice rd congolaise et des enquêteurs onusiens qui se sont chargés d’investigations sur le double crime devraient être mises en doute. Parce que Sonia Rolley serait entré en possession d’un enregistrement qui suggérant la piste d’un « guet-apens ». Une catégorie d’actes criminels ne pouvant dans son entendement être attribuée seulement à des agents d’un Etat et pas d’un groupe armé ! Guet-apens : apanage des barbouzes ?
Mieux, il s’agirait d’une conversation entre les deux infortunés experts onusiens et des membres de la cour royale de Kamwina Nsapu non autrement identifiés, qui aurait été « infiltrée » par des barbouzes des services de sécurité congolais. Ces derniers auraient, selon la journaliste de RFI, « induit en erreur » les deux experts. Et les auraient orientés vers leurs assassins que les recherches de notre consœur ne semblent pas avoir réussi à identifier. Ce qui est le dernier de ses soucis…
Pas besoin d’être sorcier pour se rendre compte que ce que visent les révélations de Sonia Rolley, c’est de décrédibiliser l’enquête et le procès entrepris par la police scientifique et la justice militaire de la RD Congo qui, sur la base, entre autres, d’images filmées, ont réussi à remonter la filière du double meurtre de mars dernier. Une filière qui mène vers des miliciens se réclamant sans aucun doute raisonnable de Kamwina Nsapu, dont une grande partie a pu être identifiée. Malheureusement pour la consœur, qui était jusqu’à il y peu la toute puissante patronne du bureau de de la chaîne publique française à Kinshasa avant que les autorités décident de ne pas renouveler son accréditation pour des raisons qui n’ont pas été rendues publiques, des enquêtes onusiennes indépendantes ont, elles aussi, abouti aux mêmes conclusions que celles des instances congolaises, ou presque.
Mais au-delà du problème de la véracité ou non des allégations de Sonia Rolley, transparait quelque chose de très choquant, pour la profession et pour la dignité africaine.
Investigations “judiciaires”
Parce que si on peut comprendre qu’une journaliste entreprenne ses propres investigations sur un crime humainement inacceptable qui a bouleversé toute âme normale, que Sonia Rolley en vienne jusqu’à désigner des coupables déborde résolument des limites des règles de la profession et de la décence. Il est admis en effet dans tous les pays du monde civilisé, que cette responsabilité n’est réservée qu’aux seules instances judiciaires. Sonia Rolley serait parvenue à découvrir quelque vérité sur le crime de Bukonde que la première obligation légale qui lui incombait eut consisté, non pas à en découdre avec les résultats d’un procès en cours d’instance conduit par la justice de la RDC avec l’appui des Nations Unies mais de mettre ses « découvertes » à la disposition de qui de droit pour que les coupables soient punis, une tâche qui ne relève pas de notre profession.
Sous certains cieux, l’attitude de notre consœur Sonia Rolley est assimilable à une obstruction de la justice par rétention d’informations susceptibles d’aider à la manifestation de la vérité, et sanctionnable.
Pire, les résultats de la prétendue enquête de notre consœur s’inscrivent dans une logique qui frise le racisme. Sonia Rolley et RFI se comportant comme s’ils se trouvaient dans une république bananière où la justice ne vaut pas plus que la sagacité d’une journaliste occidentale en délicatesse avec les services d’immigration qu’accuse carrément d’avoir recruté un de ceux qui auraient induit Michael Sharp et Zaidan Catalan en erreur. Qu’elle ait raison ou qu’elle ait tort (les suites du procès en cours le démontreront), la ficelle de la mauvaise foi et de la volonté de nuire de Sonia est trop évidente pour être tue.
J.N.