Il ne se passe pas de jour sans qu’une tête couronnée de l’opposition anti kabiliste ou de ses ramifications dans une société civile politisée à outrance ne rabatte les oreilles des Congolais avec les ukases des ONGs internationales prétendument neutres et vouées au bien-être des damnées de la terre qui peuplent nos tropiques. La National Endowment for Democracy, NED en sigle, en fait partie. Ces nouveaux missionnaires de l’humanitaire et de la démocratie sans frontières ont acquis un tel statut que nombre de gouvernements de nos pays en sont venus à les ériger en partenaires avec lesquels ils traitent parfois d’égal à égal des affaires relevant pourtant de leurs responsabilités régaliennes.
Atilio A. Boron, qui a consacré un article aux dénonciations d’Edward Snowden sur l’espionnage à échelle planétaire tant des alliés que des ennemis, pratiqué par la National Security Agency américaine (NSA), l’Agence Nationale de Sécurité des Etats-Unis d’Amérique, indique que cette organisation fait partie de la panoplie des agences et institutions, publiques, semi-publiques ou privées que le gouvernement US met en œuvre dans divers pays dans l’unique but de servir les priorités de ses Intérêts Nationaux.
Depuis l’odieux assassinat du leader charismatique congolais, Patrice Emery Lumumba, les Congolais ont connu les actions de la très officielle Central Intelligence Agency (CIA) dans notre pays et en Afrique. Mais elle est loin d’être la seule à conduire des offensives contre l’autodétermination des peuples du continent noir. À l’appui des révélations de Wikileaks, Kim Scipes, de l’Université Purdue, accuse le Fonds national pour la démocratie (National Endowment for Democracy, NED) d’être est un des fers de lance de cette campagne mondiale. La NED que cet expert en la matière considère rien moins que comme « un déstabilisateur invisible ».
Dans une note récente, Scipes démontre que bien que la NED prétende passer pour indépendante, elle fut créée par le Congrès des États-Unis pendant la présidence de Ronald Reagan dont on sait qu’il n’avait pas la réputation d’un démocrate acquis à l’émancipation des pays « périphériques », loin s’en faut. C’est grâce à un appel spécial de ce président archi réactionnaire que cette organisation doit donc son existence.
Pour son fonctionnement, elle compte sur d’importants fonds publics, approuvés par le Congrès des Etats-Unis, et parmi les membres passés et actuels de son Directoire on compte les noms des principales figures de l’establishment le plus conservateur des États-Unis, comme le Dr. Henry Kissinger que Noam Chomsky considère comme le plus grand criminel de guerre au monde, Madeleine Albright, Zbigniew Brzezinski, Frank Carlucci (ex directeur adjoint de la CIA), Paul Wolfowitz, le sénateur John McCain, et l’ineffable Francis Fukuyama, entre autres faucons de la droite nord-américaine.
Un des premiers directeurs de la National Endowment for Democracy, Allen Weinstein, de l’Université de Georgetown, a eu l’honnêteté d’admettre dans une note publiée par le Washington Post, (22 septembre 1991), que « beaucoup de ce que nous faisons aujourd’hui a été fait de manière occulte par la CIA, il y a 25 ans ».
NED opère depuis son noyau central à travers un réseau d’instituts et d’organisations animés par des notables américains et des comparses nationaux des pays cibles. Les principaux sont l’Institut Républicain International (dirigé par McCain), l’Institut National Démocrate pour les Affaires Internationales (dirigé par Mme Albright), le Centre pour l’Entreprise Privée Internationale, émanant de la Chambre de Commerce des États-Unis, et le Centre américain pour la solidarité ouvrière internationale, dirigé par la puissante centrale syndicale US AFL-CIO.
Son activisme en République Démocratique du Congo, pays réputé pour ses immenses potentialités économiques, devrait donner à réfléchir. On sait qu’elle a développé une intense activité notamment au Venezuela, un autre « scandale géologique » (pétrolier) situé en Amérique latine depuis 1997, quand la marée chaviste était apparue comme inexorable dans ce pays.
Dans son rapport annuel correspondant à 2012, il apparaît que rien qu’au cours de cette année, la NED avait généreusement offert 1.338.331 dollars à des organisations et projets au Venezuela, dans des domaines comme la responsabilité gouvernementale, l’éducation civique, les idées et les valeurs démocratiques, la liberté d’information, les droits humains et d’autres du même style. En plus, en dehors de cela, cette même année, elle a consacré 465.000 dollars pour le renforcement du mouvement ouvrier en Amérique Latine auquel l’Institut Républicain International et l’Institut National Démocrate pour les Affaires Extérieures apportait respectivement 645.000 dollars pour 750 000 dollars, soit un pactole de 1.860.000 dollars officiellement enregistré apporté par la NED. Autrement dit de la partie émergée de l’iceberg car, les apports de dessous de table fait par la CIA, la NSA, la DEA et tant d’autres agences publiques destinés à casser le gouvernement anti-impérialiste d’Hugo Chavez ne sont connus de personne à ce jour. Les autorités américaines ont également fait intervenir le secteur privé à cette fin, par exemple la Fondation Société Ouverte de Georges Soros, dont a retrouvé quelques traces dans l’agitation ubuesque de groupes comme Balai Citoyen qui ont tenté d’importer l’anarchie et la discorde en RDC il y a quelques mois, ou le Dialogue Interaméricain. Ces structures semblent engagées dans une tentative de réédition en Afrique noire des manœuvres de canalisation de fonds et d’assistance technique aux groupes réactionnaires et anti patriotiques qu’ils avaient entreprises prétendument pour « renforcer la société civile du Venezuela », autrement dit pour organiser et financer l’opposition à Hugo Chavez en créant de toutes pièces des « leaders » comme un Capriles ou un López, qui n’ont pas fait le poids face au très emblématique leader de la révolution bolivarienne.
Selon la juriste Eva Golinger, spécialiste des relations entre les Etats-Unis et le Venezuela, depuis 2002 jusqu’à aujourd’hui, les États-Unis ont transféré par l’intermédiaire de ses diverses agences et institutions « promotrices de la démocratie et de la société civile » plus de 100 millions de dollars pour appuyer les activités de l’opposition au gouvernement bolivarien, en totale violation des lois en vigueur aussi bien aux Etats Unis qu’au Venezuela même, des lois en vertu desquelles il est absolument interdit que des organisations de pays tiers financent des partis ou des candidats aux élections qui se tiennent dans un pays tiers.
Les responsables africains en général et rd congolais en particulier ont intérêt à ouvrir l’œil, et le bon, face à ces prétentions hégémoniques qui ne se cachent plus et ne plus se laisser abuser par les mensonges et le double langage qui sont des dispositifs essentiels pour la survie d’un impérialisme qui n’ose plus s’afficher au grand jour. Le danger que courrent nos populations a été du reste précocement mis en évidence par Simon Bolivar, qui avec son exceptionnelle clairvoyance affirma qu’« ils nous dominent plus par l’ignorance que par la force ». À bon entendeur salut !
LE MAXIMUM