La publication des listes des candidats aux législatives provinciales et nationales de décembre 2018 en RD Congo est d’une rare richesse en enseignements. Sur les prétentions des partis et regroupements politiques pour les 5 prochaines années autant que sur les candidats eux-mêmes. Mais également sur l’immense travail abattu par la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI), face auquel les critiques émises ci et là paraissent extrêmement insignifiantes et révèlent, en réalité, l’étroitesse des vues habituellement reprochée aux acteurs politiques en RD Congo. Ce n’est pas un hasard si, à ce jour, nul n’a osé rendre public un registre complet des candidats à la députation nationale sur toute l’étendue du territoire national, par exemple. C’est hors de portée de nombreuses bourses et pratiquement impossible : la liste des candidats députés nationaux compte quelque 1800 pages A4.
La première leçon qui aurait due en être tirée est que la CENI est loin d’avoir tort de privilégier un nouveau type de bulletin de vote. Pour la seule circonscription électorale de la Tshangu, forte de 18 sièges de députés, 844 candidats des partis et regroupements politiques ainsi des indépendants ont été régulièrement enregistrés. Cela fait une liste provisoire de quelque 81 pages ! Mais ce n’est pas encore le bulletin de vote : pour en faire un bulletin de vote, il faut associer à chaque nom de candidat une photo, mais aussi les identités et les photos de deux suppléants par candidat. Cela fait, selon un calcul simple, 844 candidats x 3 = 2.532 noms + 2.532 photos à placer dans un bulletin … si ont peut encore appeler bulletin cette sorte de registre gigantesque, en réalité. Il est plus que curieux que nul dans la classe politique ne fasse état de cet état de choses : c’est anormal.
Une véritable ruée vers les 500 sièges de l’Assemblée Nationale
L’autre révélation, et pas des moindres, des listes provisoires des candidats aux prochaines élections législatives, c’est la véritable ruée vers les 500 sièges de l’Assemblée nationale de la IIIème législature. Au total 15.502 dossiers de candidatures aux législatives nationales ont été déclarés recevables par la CENI, c’est-à-dire, à peu près 3200 prétendants pour un siège à la chambre basse du parlement. Dans ces conditions, difficile, voire, impossible, de croire à ceux des leaders politiques qui, des travées de l’opposition surtout, crient sur tous les toits leurs menaces de boycott de la prochaine présidentielle sous un prétexte ou un autre. Tous ont trahi une extraordinaire avidité à régenter la future Assemblée nationale en jetant dans la bataille le plus de candidats possibles. De l’UDPS/Tshisekedi, au MLC de Jean-Pierre Bemba en passant par l’UNC de Vital Kamerhe, le PALU, l’AFDC, le PPRD, la CCU … tous ont joué des pieds et des mains, avec des bonheurs divers, pour atteindre le chiffre magique de 500 candidatures déposées. Le Rassemblement des Forces Politiques et Sociales (Rassop), la Dynamique de l’opposition, ou encore l’Alternance pour la République et … le G7, tous ont concouru dans une effervescence aussi peu habituelle que discrète. La question qui se pose aujourd’hui n’est même plus de savoir si oui ou non les leaders de l’opposition prendront part à la prochaine présidentielle. C’est de savoir qui consentira à sacrifier son potentiel de sièges à la prochaine Assemblée nationale à un autre leader que lui-même, qu’il s’agit.
Kinshasa, le plus grand nombre sièges par provinces
Rien que pour la seule ville de Kinshasa qui compte 55 sièges, l’UNC, le PALU, le PPRD, pour ne compter que ceux des partis les plus connus, ont jeté 55 candidats chacun dans la bataille législative. L’UDPS/Tshisekedi, qui aligne 54 candidats, n’est pas en reste. Autant que le G7, 54 candidats ; la Dynamique de l’opposition, 45 candidats ; le MLC, 47 candidats ; le Rassop,
37 candidats, la SYENCO, 15 candidats ; et l’Alternance pour la République, 45 candidats.
De ces listes des candidats, des noms émergent, qui donnent une idée des prétentions des partis politiques et des ambitions des candidats proposés à la sanction populaire.
Dans le district de la Lukunga, l’UDPS/Tshisekedi aligne, entre autres, Mme Pascaline Kudura Adiyo, l’épouse l’ancien porte-parole du président de la République, passé entre-temps à l’opposition. Mais aussi, l’ingénieur Alexis Mutanda, déjà élu dans la même circonscription en 2011, et Monsieur Eteni. Ces candidats se mesureront au PALU Mayobo Ngatien, mais aussi aux MLC Solange Kwale et Moïse Musangana, deux confrères qui ont choisi de dédaigner stylos et micros pour se frotter dans les urnes à Martin Fayulu, le patron de la Dynamique de l’opposition. Le candidat à la prochaine présidentielle a pris la précaution de postuler aux législatives 2018, lui aussi. Le jeune Thierry Monsenepwo et Dieudonné Nkishi de la CCU affichent quant à eux de sérieuses prétentions pour le compte de l’alliance politique CCU et Alliés. Tandis que l’UNC de Vital Kamerhe y aligne Kudura Kasongo Mr, qui y affrontera donc Mme son épouse (UDPS/T), ainsi que Molendo Sakombi.
Dans le district du Mont Amba, le parti de la 10ème rue Limete aligne Augustin Kabuya, Jacquemin Shabani, Peter Kazadi, Rémy Massamba et Alonga, entre autres. Ils feront face dans les urnes à Baudouin Mayo Mambeke et Adolphe Wenga de l’UNC. Mais aussi aux G7 Oscar Kiziamina et Désiré Luhahi. Dans cette circonscription électorale, la lutte sera des plus âpres parce que le PPRD y aligne Déo Indulu, René Lokwa et Godard Motemona, entre autres. Egalement dans la course, Kalele Malobo et Nyembo Biyule de la plateforme CCU & Alliés. Tandis que la Dynamique de l’opposition aligne Serge Welo, le professeur Mathieu Kalele, l’artiste musicien Jean-Goubald Kalala et autres Kazadi Rex. Okende Katako Mandack et Kiovue Jeef, deux dynamiques jeunes de la CCU & Alliés leur disputeront les scrutins.
A la Tshangu, l’UDPS semble bien timide en n’alignant qu’un certain Paul Tshilumbu, parmi les cadres connus du parti. Qui en découdra avec Charles Kisolokele Lubuku pour le compte du G7, mais aussi André Kimbuta Yango, le gouverneur PPRD de la ville de Kinshasa. La Dynamique de l’opposition aligne un ancien élu du coin, Ditu Monizi qui fera face à Laurent Wombakonga de la CCU.
Dossiers à suivre.
J.N.