Invité par les dirigeants de Facebook, le ministre de la Communication et Médias, Lambert Mende Omalanga a séjourné à San Francisco, Californie (USA) du 20 au 24 juin 2018. Accompagné d’une délégation de son ministère à laquelle s’était jointe la directrice adjointe du bureau du président de la République, Mme Mukalayi Kionde en séjour aux Etats-Unis, le ministre porte-parole du gouvernement a eu droit à une visite guidée de Facebook avant une séance de travail portant sur les mécanismes de lutte contre les actes d’incitation à la haine et l’apologie des violences et des crimes sur les médias en ligne.
Ci-après, son allocution qui a servi de document de référence pour des discussions qui ont été considérées par la direction de Facebook Inc. et la délégation rd congolaise de très instructives et fructueuses.
Avis et considérations sur le développement des réseaux sociaux sur l’espace de la RDC
(Mémorandum du Gouvernement congolais à l’intention de Facebook Inc.)
1) Dans le cadre du projet « CAB 5 », La RDC s’est lancée dans un vaste chantier pour réduire la fracture numérique à travers la fibre optique et le satellite au regard de sa place au cœur de l’Afrique. Des milliers de kilomètres des réseaux à fibre optique déjà posés pour la construction du backbone national avec le câble international wacks au point d’atterrage de Muanda sur le littoral Atlantique et des contrats avec quelques opérateurs satellitaires permettent à ce jour au pays de se connecter au haut débit ;
2) Le développement de ces infrastructures des technologies de l’information et de la communication avec notamment la 4G aujourd’hui révolutionne le paysage médiatique et impose une nouvelle approche de la gestion des médias en ligne et notamment des impératifs de la cyber-sécurité (protection de la foi publique et lutte contre la criminalité) ;
3) La RDC représente un marché de plus de soixante millions de consommateurs potentiels des réseaux sociaux comme Facebook. D’où la nécessité pour l’Etat, tout en luttant contre la fracture numérique, de légiférer et réguler l’utilisation des réseaux sociaux afin de préserver le public contre les cyber-crimes ;
4) C’est pourquoi l’Etat congolais a intégré dans la législation et la réglementation sur les médias en général des dispositions pour lutter contre les usurpations d’identités, les fake news avérés, les atteintes à la vie privée et à la dignité humaine, les diffamations et autres atteintes à la sécurité publique par ce moyen. Il s’agit aussi de réprimer les appels à la haine, à la violence qui sont réprimés par la loi car elles mettent à mal la coexistence pacifique et harmonieuse entre les différentes composantes de la nation ;
5) Cette lutte contre l’apologie du crime et la criminalité concernera dorénavant également les réseaux sociaux et autres médias en ligne, ce qui nécessite une collaboration entre l’Etat et les opérateurs de ce secteur. D‘où l’importance pour le Gouvernement d’établir des liens avec les opérateurs comme Facebook Inc. En effet, l’information la plus complète possible des usagers desdits réseaux sociaux s’avère indispensable à ce sujet.
Une action de sensibilisation des acteurs publics et de ceux de la société civile utilisateurs à divers titres des réseaux sociaux est souhaitable afin que cet outil de communication de plus en plus apprécié, utile et incontournable ne devienne pas un terrain propice pour la délinquance et l’instauration d’une culture attentatoire aux lois, à l’ordre public, à la sécurité et aux droits d’autrui.
Quelques pistes de solution :
A) Mise à un même niveau la législation et la réglementation en vigueur concernant les médias audiovisuels, écrits et ceux en ligne pour faire respecter par l’Etat le principe constitutionnel de l’égalité de tous devant la loi et les institutions publiques (c’est le sens de notre dernier arrêté concernant les médias en ligne) ;
B) Face au développement fulgurant des médias en ligne, une telle mise à niveau serait illusoire, voire impossible, sans la coopération et la collaboration des grands opérateurs des médias en ligne comme Facebook Inc. Cette coopération est moralement justifiée pour autant que l’on considère les réseaux sociaux comme un progrès pour l’humanité et non comme un simple jouet pouvant se transformer en un instrument de nuisance et/ou de malfaisance à la disposition du tout-venant, et notamment de personnes déviantes, délinquantes ou criminelles. Il suffit à cet égard de rappeler le bond en avant fait en faveur du bien-être collectif avec l’énergie atomique qui, en même temps qu’elle offre des solutions adéquates au déficit d’électricité fossiles ou propres dans certains pays ou au progrès de la médecine, peut, lorsqu’elle est placée sans contrôle dans toutes les mains, aboutir à la fabrication d’armes de destruction massive qui menacent l’humanité. Les polémiques actuelles dans la Péninsule coréenne et dans les relations entre les USA et l’Iran sont des indications claires que ce dilemme n’est pas une simple vue de l’esprit.
Il importe de prendre conscience du fait que les NTIC créent autant de nouveaux droits que des obligations fondées sur la responsabilité qui obligent à réparation tout fait quelconque d’un individu ayant causé dommage à un autre sur laquelle repose toute société civilisée.
C) Il importe dès lors que d’une manière générale, les opérateurs des réseaux sociaux s’impliquent dans des programmes de mise à niveau et d’information pour les cadres des administrations et des appareils judiciaires appelés à appliquer les législations les réglementations sur les médias en général et les médias online en particulier. Dans ce sens, les Etats et ces opérateurs des réseaux devraient de plus en plus penser, ensemble autant que possible, des mesures préventives comme (i) la sensibilisation régulière des agents publics intervenant dans ce secteur et (ii) la mise à la disposition des utilisateurs de Numéros verts (Hotlines) à l’intention de tous les utilisateurs qui viendraient à constater des usages desdits réseaux sociaux contraires aux valeurs humaines universellement admises.
San Francisco, CA (USA), Juin 2018
Lambert MENDE OMALANGA
(Ministre de la Communication et Médias, porte-parole du Gouvernement de la RDC)