L’Etat rd congolais s’est officiellement engagé à rouvrir la Banque de crédits agricoles. Cinq ans après, jour pour jour, non seulement, le projet ne figure même plus dans le canevas du gouvernement mais l’accès aux crédits pour un entrepreneur local relève du parcours du combattant.
La question a été abordée lors d’une récente plénière du Sénat. Le rapporteur de la Chambre haute, Flory Musendu, a estimé que l’essor de l’agro-industrie passe par la révision de la nouvelle loi portant principes fondamentaux applicables dans l’agriculture, appelée aussi Code agricole.
Le rapporteur du Sénat a, à la même occasion, présenté au président Léon Kengo Wa Dondo, son projet de loi portant amendement de certains articles du Code agricole, notamment, la clause qui impose que les nationaux disposent de parts majoritaires dans un partenariat latifundiaire, ou encore celle qui exclut les étrangers d’une manière ou d’une autre dans la chaîne d’activités agropastorales en RD Congo. C’est une lapalissade que d’affirmer que les capitaux frais à même de soutenir l’industrie agricole en RD Congo ne pourraient que venir que de l’étranger. L’Etat s’est emmêlé charrue et grue dans le projet du parc agro-industriel de Bukanga-Lonzo, qui a coûté une bagatelle somme de 83 millions de dollars. Un arbre qui cache mal la forêt des besoins en investissements dans le secteur agricole, a fait comprendre Albert Yuma, président de la Fédération des entreprises du Congo, FEC, lors de la dernière assemblée générale ordinaire de ce principal patronat national. Par ailleurs, quelque 1.800 plantations (hévéa, palmier à huile, coton, café…sucrière) demeurent à l’abandon, depuis des lustres, sur l’ensemble du territoire national et ne sont guère à l’abri d’une spoliation, apprend-on au Secrétariat général de l’Agriculture.
Selon Sylvestre Motayo Mbela, patron de la SECAF, Société d’exploitation de café, les cultures pérennes (café, cacao, thé et hévéa) résistent tant mieux bien que mal à la crise des cours des matières premières à l’échelle internationale. D’autant plus qu’en Côte d’Ivoire, les ressources générées par le cacao et le café participent à hauteur de 15 % à la formation du Produit intérieur brut, PIB et à près de 40 % des recettes d’exportation de ce pays.
En RD Congo, cet industriel déplore plutôt des négociants rwandais et ougandais contrôlent l’essentiel des exportations de café de l’Est du pays du fait que la filière locale souffre d’un manque de financement pour mieux canaliser la vente de son produit à l’étranger. «Si l’Etat investit 15 millions de dollars dans la culture, à coup sûr, il gagne, à moyen terme, au moins 45 millions de dollars», fait savoir Motayo. La part du secteur agricole dans le budget 2016 était de 8 %. Elle devrait se rétrécir suite à la révision à la baisse du budget de 8 à 6 milliards de dollars.
Banques et cultures pérennes.
Dans son speech de la rentrée parlementaire, le président du Sénat, Léon Kengo, avait justement déploré que les cultures pérennes étaient curieusement laissées à l’abandon alors qu’elles rapportaient, il y a quelques décennies, jusqu’à 45 % de revenus de l’Etat en monnaies. Le sénateur Mokonda Bonza l’avait précédemment mis en exergue dans sa question orale posée, début juin 2016, à l’alors Premier ministre Matata Ponyo. La réponse du Premier ministre était plutôt évasive sur le plan numéraire. Pourtant, dans le cadre du programme du Cadre intégré renforcé, CIR, les partenaires traditionnels de la RD Congo, dont FAO, PNUD, USAID et ONUDI, se sont engagés à soutenir la relance de la production de l’huile de palme, appelée or orange du fait de sa demande qui va crescendo au niveau mondial.
Première étape, le Kongo Central, dans le Mayumbe. Ici le projet a nécessité 4.359.080 dollars. Alors que le CIR a décaissé plus de la moitié du montant requis, soit 2.661.080 dollars, le gouvernement rd congolais s’est engagé à ne verser que 237.000 dollars ! Et le reste, soit 1.461.000 dollars, c’est aux bénéficiaires de le trouver. Qui sont-ce ? De petits producteurs familiaux qui n’ont pas accès aux crédits bancaires, ont déploré des associations paysannes lors de la dernière foire agricole de Matadi, soutenue par l’organisme néerlandais de développement, SNV.
Hélas, l’appel lancé aux banques et autres investisseurs nationaux et étrangers à soutenir l’agriculture en RD Congo, à travers le Programme national d’investissement agricole, PNIA, lors du dernier forum Agri-business, n’aura vraisemblablement eu qu’un écho limité. «C’est au gouvernement d’en manifester avant tout l’intérêt», fait comprendre cet ingénieur agronome. « Voilà pratiquement 5 ans que le projet de la relance de la Banque des crédits agricoles a été annoncé…mais rien n’est venu». La création d’une banque agricole fait, en effet, partie de 28 mesures dites urgentes prises par le gouvernement lors du conseil extraordinaire des ministres du 26 janvier2016. Près de six mois après, la décision prise en mode « urgence » semble plutôt avoir été renvoyée dans les moyens et longs termes. M. Leny Ilondo, auteur d’un article scientifique, intitulé « RD Congo : éviter un risque financier systémique » propose plutôt que le gouvernement et la BCC accordent aux banques commerciales des allègements substantiels pour soutenir leur déploiement consécutif au processus de bancarisation, d’autant plus que le démembrement des provinces et la montée de leur autonomie nécessiteraient des investissements additionnels pour ces banques.
PALM