34 morts et 124 blessés parmi les réfugiés burundais. C’est le bilan macabre de ce qu’on a qualifié d’échauffourées qui se sont produites vendredi 15 septembre dernier à Kamanyola, une localité frontalière du Burundi dans la province du Nord Kivu. Les victimes avaient toutes été atteintes de balles tirées par des éléments de l’armée nationale de la RD Congo. Selon les premières explications du drame, les Fardc avaient usé d’armes à feu pour tenter de disperser des réfugiés qui lançaient des jets de pierre … d’individus appartenant à une secte religieuse burundaise dite de la prophétesse Zebiya contre eux. Cette « femme de Dieu » aurait eu des visions de la Vierge Marie dans la Nord du Burundi, selon nos confrères de l’Agence France Presse.
A ce stade, il n’y avait certainement pas encore suffisamment d’éléments pour apprécier sereinement ce qui s’était passé à Kamanyola. Mais dans l’émotion qui a suivi la diffusion d’images, certes peu soutenables, des morts burundais en RD Congo, les redresseurs de torts de la communauté internationale se sont aussitôt engouffrés dans la brèche et exiger qui, une enquête, et qui encore, des explications de Kinshasa.
Instances supra-gouvernementales
Véritable supra-gouvernement en RD Congo, la Mission des Nations-Unies pour la stabilisation au Congo s’est aussitôt fendue d’une exigence d’enquête, certes formulée sous la forme d’une demande. Le Haut- Commissariat aux Nations Unies pour les Réfugiés (HRC) aussi, parce que l’armée rd congolaise avait répondu à la mort d’un de ces officiers en ouvrant le feu sur les manifestants « de façon disproportionnée », selon le terme consacré. Un terme qui dans les faits signifie qu’en RD Congo, les proportions sont définies par … des instances extra ou supra gouvernementales.
A Kamanyola, un élément Fardc avait pourtant été tué et non pas lapidé par les réfugiés burundais. Le lieutenant Mbuza avait succombé à un tir d’arme à feu, ce qui impliquait que les prétendus réfugiés était armé ! Mais de cela, ni la Monusco ni le HCR ne s’en sont préoccupés. Leurs priorités sont ailleurs, dans la préservation voire, l’imposition de sortes de droits, décidément très extensibles, des réfugiés sur le sol qui les héberge en RD Congo. Dont la détention d’armes à feu et leur usage.
Situation explosive occultée
Depuis lundi 18 septembre 2017 filtrent des informations sur la situation créée par les réfugiés burundais au Sud Kivu. Elle est rien moins que délétère et susceptible de dégénérer à tout instant, selon des sources locales à l’évidence beaucoup plus crédibles que les instances onusiennes manifestement engagées dans la désarticulation systématique de la territorialité en RD Congo. Comme cette délégation de la société civile du Sud Kivu qui a effectué le déplacement pour évaluer la situation. Elle révèle qu’à Kamanyola, ce ne sont pas des réfugiés qu’elle trouvé, mais 2.906 adeptes de la secte Yezebia. Ils ont refusé de se faire enregistrer comme réfugiés aussi bien par le HRC que par la Commission Nationale pour les Réfugiés de la RD Congo. « Des informations recueillies sur place renseignent que ces burundais organisent leurs patrouilles les nuits munis d’armes blanches constituées essentiellement de bâtons bourrés de clous au bout, des lances et flèches, machettes et couteaux et même des grenades », écrit Patient Bashombe, président de la société civile de Walungu. Qui rapporte aussi que ces manifestants burundais avaient réussi à ravir la seule arme à feu de la Police Nationale Congolaise de Kamanyola, avant de s’en servir pour abattre le lieutenant Mbuza Ngando « Bisodo » et blesser plusieurs militaires et policiers.
Terre promise, terre permise
D’autres sources dans la région renseignent que ces adeptes de Yezebia, dont le campement est entouré et protégé par des éléments de la Monusco disposant d’auto-blindés et chars de combats sont convaincus d’avoir atteint à Kamanyola la terre promise révélée par la Vierge Marie à leur prophétesse. Ce qui expliquerait leur comportement de conquérants dans la région. La société civile de Walungu rapporte qu’une cinquantaine de ces burundais a récemment déserté le campement pour se rendre dans les plateaux qui surplombent Kamanyola, vers Ngomo, sans avoir été identifiés.
A Walungu, population civile et autorités exigent le départ des réfugiés burundais dont la présence s’avère une source d’insécurité permanente, susceptible de s’aggraver si l’armée burundaise en face tentait des incursions pour en découdre avec ses ressortissants trop entreprenants. «Nous avons hébergé des réfugiés dans nos différentes maisons à leur arrivée. Mais en un moment, nous avons constaté qu’ils avaient érigé des églises où aucun congolais ne pouvait entrer et quelqu’un était toujours à la porte pour une surveillance, on ne savait pas exactement qu’est-ce qu’ils discutaient. La population me demande de mettre une pression pour qu’ils retournent chez eux au Burundi le plutôt possible car ils sont source d’insécurité”, a expliqué Dominique Bofondo, administrateur du territoire de Walungu à l’issue d’une réunion avec les acteurs de la société civile mardi dernier à Kamanyola. Encore faudrait-il que Monusco et HCR daignent entendre cette voix des rd congolais. Pas si sûr.
J.N.