Longtemps installée dans un immeuble triangulaire et colossal situé au rond-point Forescom à Kinshasa, l’ex. Banque Internationale pour l’Afrique au Zaïre (BIAZ), est au creux de la vague. Rien à redire. L’une des principales institutions bancaires de la RD Congo fait la une des journaux, en même temps que ses clients, près de 400.000, dont de nombreuses PME, broient plus que du noir. L’enfer remonte au mois de février dernier à peu près, lorsqu’il appert que la BIAC ne sait plus servir ses clients. Parce que son refinancement a été suspendu sur une décision de la primature qui, selon l’argumentaire avancé à l’époque, craignait que les 40 millions USD versés à l’institution en vue du redressement de ses comptes n’entraînent des tendances inflationnistes. L’argument ne tient pas bien la route, notaient des experts en la matière, parce qu’en RD Congo, ce sont à peu près 4 milliards USD qui constituent le chiffre d’affaires bancaires. 40 pauvres millions USD ne pouvaient donc influencer les fameuses tendances inflationnistes outre mesure. Mais rien n’y a fait. La réputation de la BIAC a été profondément entamée par la publicité faite autour de ses problèmes de gestion. Et la confiance des épargnants irrémédiablement entamée. Les mois de février, mars et avril ont vu des files de clients de la BIAC accourir devant les guichets. Pour retirer la totalité de leurs dépôts.
L’affaire BIAC a ainsi fini par émouvoir au plus haut niveau en RD Congo. Gouvernement (dans une certaine mesure), parlement, la majorité présidentielle, tous ont joué des pieds et des mains pour sauver l’édifice et protéger les épargnants. D’autant plus que si dans cette affaire de problèmes de gestion, la BIAC était déficitaire de quelque 17 millions USD, l’Etat rd congolais à travers la police nationale et le ministère des postes, télécoms et télécommunications devaient à l’institution bancaire la bagatelle de 30 millions USD. Il y avait donc de quoi sauver la banque, envers et contre tous. Début avril 2016, la BCC décide de rouvrir la ligne de refinancement de la BIAC, et l’institution se remet manifestement sur les rails. Au cours d’une prestation devant les députés à l’assemblée nationale, le gouverneur de la Banque Centrale du Congo, Déogratias Mutombo, accuse carrément le Premier Ministre, Matata Ponyo, d’être à la base des difficultés de la BIAC. Il n’a pas suffisamment collaboré au redressement de sa trésorerie, assurait le remplaçant de Jean-Claude Mulongo à la tête de l’institut d’émission, le 6 juin 2016.
L’opinion publique en RD Congo et à travers le monde était en droit d’espérer une amélioration de la situation de la BIAC lorsqu’un coup de massue, peut-être le dernier, a été asséné. Le 30 mai 2016, Déogratias Mutombo, le gouverneur de la Banque Centrale, a adressé une plainte à charge de la BIAC et de ses dirigeants en bonne et due forme au Procureur Général de la République. Motif : mégestion ayant suscité la banqueroute. L’instruction de la plainte, confiée à l’avocat général Joseph Nsabua enjoint aux banques le gel des avoir de 7 personnes physiques visées par la plainte ainsi que les entreprises qui leur sont apparentées.
Mégestion ayant entraîné banqueroute ? Les experts n’en reviennent pas et refusent d’avaler la pilule. Parce que c’est depuis 2012 que la BIAC est sous contrôle de gestion par la BCC. En février dernier, un rapport d’audit diligenté par l’institut d’émission a été rédigé. Il ne faisait aucune allusion à quelque fait de mégestion que ce soit. Ni à une menace de banqueroute. On se perd donc en conjectures sur les décisions du Premier Ministre, de geler le refinancement de la BIAC, autant que sur celle de Déogratias Mutombo de déclarer banqueroute après avoir accusé Matata Ponyo de tous les maux d’Israël.
Au-delà des difficultés conjoncturelles d’une des plus grandes institutions bancaires de la RD Congo, le problème de la BIAC en soulève bien d’autres. Parce qu’il survient et semble exacerbé à un moment critique pour la RD Congo : à quelques mois des élections et en plein dans une période où l’économie et les finances du pays souffrent la chute des prix produits miniers dont dépend le pays. Au finish, c’est la fameuse situation macro-économique dont se vante le gouvernement à longueur de journée, le climat des affaires dont dépend l’amélioration de l’économie nationale, qui en prennent un sérieux. Comme si, quelque part, une main noire tentait de noyer les efforts consentis depuis près d’une décennie. A qui profite le crime ?
J.N.