Alors que le délai imparti fixé par les avocats de la RDC pour avoir les réponses d’Apple sur une série des questions lui posées est largement dépassé, la société américaine n’a toujours pipé mot sur les différentes préoccupations des juristes congolais quant à son implication présumée dans l’utilisation des minerais produits dans l’Est du pays. Une zone en proie à des violences de tout genre, orchestrées par le président rwandais Paul Kagame et ses soutiens via ses supplétifs du M23.
En ce qui concerne l’utilisation présumée des minerais de sang, le cabinet d’avocats mandaté par la RDC déclare qu’il dispose de nouvelles informations concernant l’utilisation par Apple de «minerais de sang» qu’il se serait procuré par des voies non reconnues. Les avocats de la RDC ont déclaré le mercredi dernier qu’ils disposent des nouvelles preuves qui leur ont été fournies par des lanceurs d’alertes. Ce qui, selon eux, renforce les craintes concernant l’approvisionnement de la firme américaine Apple en minerais provenant de la zone de conflit à l’Est de la RDC.
Dans une déclaration lue et relayée par l’agence Reuters, ces avocats exige d’Apple les réponses à des questions sur sa chaîne d’approvisionnement. Le cabinet conseil sélectionné pour la cause a indiqué qu’il évaluait des probables poursuites judiciaires contre Apple. «Il est plus que jamais urgent que Apple fournisse de vraies réponses concernant sa chaîne d’approvisionnement», estiment les avocats de la RDC.
Le 22 avril 2024, le cabinet d’avocats Amsterdam & Partners LLP, engagé par le gouvernement de la RDC, a informé Tim Cook, PDG d’Apple, d’une série de préoccupations concernant la chaîne d’approvisionnement de l’entreprise. Le cabinet a aussi écrit à la filiale de la multinationale américaine en France, lui demandant des réponses dans les trois semaines qui suivaient.
Amsterdam & Partners LLP enquête au nom et pour le compte de la RDC sur des allégations selon lesquelles des minerais extraits de l’Est du pays, par plusieurs entreprises et groupes armés, sont introduits en contrebande via le Rwanda, l’Ouganda et le Burundi.
Quatre semaines plus tard, fustige le cabinet d’avocats, «le géant de la technologie est resté silencieux. Il n’a ni répondu, encore moins accusé réception des questions».
Toutefois, selon Robert Amsterdam, l’un des avocats qui suit le dossier au nom et pour le compte de la RDC, son cabinet avait depuis, reçu de nouvelles preuves de la part de lanceurs d’alertes. «Il est plus que jamais urgent que Apple fournisse de vraies réponses aux questions très sérieuses que nous avons soulevées», a-t-il exprimé dans un communiqué.
Apple réfute
les accusations
Apple, la multinationale américaine, avait précédemment affirmé qu’elle n’achetait, ni se procurer directement ou via des intermédiaires, des minerais bruts et qu’elle avait audité ses fournisseurs depuis plusieurs années et publié ses conclusions.
Dans un rapport publié l’année dernière, la société de Cupertino avait indiqué que 100 % des fonderies et raffineries de sa chaîne d’approvisionnement pour tous les produits Apple fabriqués en 2023, étaient connues et avaient participé à un audit indépendant sur les minerais de sang en rapport avec l’étain, le tantale et le tungstène et l’or. «Nous n’avons trouvé aucune raison de conclure que l’une des fonderies ou raffineurs de 3TG de notre chaîne d’approvisionnement, au 31 décembre 2023, a directement ou indirectement financé ou bénéficié à des groupes armés en RDC ou dans un pays voisin», indique le rapport la société de Cupertino.
Peter Sahlas, un autre avocat du cabinet Amsterdam & Partners LLP, selon l’agence Reuters, déclare que des personnes ayant travaillé sur la vérification de la chaîne d’approvisionnement d’Apple en RDC ont signalé que leurs contrats avaient été résiliés après avoir exprimé des préoccupations concernant la présence de «minéraux de sang» dans la chaîne d’approvisionnement de la firme américaine. «Nous engageons des discussions avec ces individus, évaluons leurs témoignages et nous en dirons plus une fois que nous aurons terminé des vérifications approfondies», a fait savoir Sahlas sans donner plus de détails.
Depuis la lettre envoyée en avril 2024 par les avocats engagés par le gouvernement congolais, les affrontements se sont intensifiés dans l’Est du pays où les rebelles du M23, soutenus par le Rwanda, ont pris le contrôle de Rubaya, une ville minière clé pour le coltan utilisé dans les smartphones et autres appareils.
Pour rappel, dans une mise en demeure envoyée à Apple, l’État congolais reproche au géant de la tech d’utiliser des minerais stratégiques «exploités illégalement» qui proviendraient de mines où les «droits humains sont violés» par des rebelles. Pour le compte de la RDC, des courriers ont été adressés, par les avocats français William Bourdon et Vincent Brengarth, aux deux filiales d’Apple en France et à la maison-mère américaine. Ces lettres posent des questions subsidiaires sur les «minerais 3T utilisés dans les produits Apple». Ces trois minerais sont le coltan (principale source du tantale), l’étain et le tungstène.
IT