Près de 685 millions dollars, voilà les assignations que doivent réaliser, sur instruction du gouvernement, durant l’exercice 2016, les hôpitaux généraux de référence dont l’ex-Mama Yemo, Sendwe (Lubumbashi), etc., En clair, des hôpitaux généraux de référence fonctionnent comme des régies financières à l’image de la DGRAD, la DGI et la DGDA avec des plafonds financiers à atteindre sinon dépasser. Faute de quoi les médecins-directeurs risquent de se faire défenestrer.
D’abord l’argent, ensuite les soins.
L’on comprend pourquoi un cadavre gardé deux jours de suite à la morgue de Cliniques Ngaliema coûte, à la famille éplorée, près de 500.000 FC soit 5 mois de loyer d’une maison de deux chambres et salon dans la cité kinoise. Faire venir une ambulance pour évacuer un patient coûte dix fois plus cher que louer un taximètre. La fiche de consultation que ce soit à l’ex-Mama Yemo- considéré comme l’hôpital des pauvres- ou ailleurs titille les 10 dollars. Si, par contre, la consultation ne dépasserait guère les 5 dollars à l’hôpital du Cinquantenaire, l’internement coûte autant, au quotidien, que dans un flat-hôtel de quartiers populeux de Kinshasa.
Les réalisations de ces hôpitaux font, en effet partie, des recettes des budgets annexes incorporés dans le budget général de l’Etat. Sur les 830,4 milliards de FC soit 893 millions de dollars des budgets annexes inscrits dans le budget général 2016, les hôpitaux doivent en réaliser à près de 80%, le reste, soit environ 200 millions de dollars, proviendra essentiellement des universités et des instituts supérieurs qui essaiment pourtant. L’inverse serait plutôt logique, plus humain: attendre plus d’argent des universités que des hôpitaux. Hélas.
Les patients paient à la place des pétroliers.
De toutes les sources des recettes courantes de l’Etat pour l’exercice budgétaire 2016, seules les recettes qui reposent sur les contributions des hôpitaux ont connu un accroissement…plutôt spectaculaire par rapport à 2015. Si les assignations 2016 de la DGRAD connaissent, en effet, un taux d’accroissement de 16,2% par rapport à 2015, celles de la DGDA n’auront augmenté que de 0,02%. Les recettes attendues de la DGI ainsi que des pétroliers producteurs sont respectivement en régression de 3,3% et de 58,9%. Les assignations des budgets annexes essentiellement des hôpitaux ont été gavées à 55,2% par rapport à 2015 par le gouvernement et reconduit comme tel par les deux chambres du Parlement. Pour d’aucuns, les hôpitaux, les malades c’est selon, vont payer à la facture de la dégringolade des pétroliers producteurs. Déjà en 2013, les assignations de la Santé publique, en fait l’argent attendu des hôpitaux était de l’ordre de 395.717.415.000 FC soit 425,5 millions de dollars en 2014, et 409.963.241.940 FC soit plus de 440 millions de dollars en 2015. L’on est à un peu moins de 700 millions de dollars pour 2016. Ces assignations qui vont crescendo donnent à croire que la Santé publique n’est nullement secouée par une quelconque crise. Voilà un secteur où se confirme l’adage selon lequel le malheur des uns fait le bonheur des autres.
Médecin chrétien, la prière du croque-mort.
Ça n’est pas du cynisme, mais bien au contraire, une lapalissade: plus des malad(i)es, plus d’accidents…des morts constituent et rassurent les sources des revenus pour des hôpitaux. Quoique l’on assiste, particulièrement à Kinshasa, à un phénomène dit « docteur chrétien» -en fait des médecins à la fois pasteurs dans des églises dites de réveil-, aucune blouse blanche ne contestera les actes générateurs des recettes ci-haut cités. La prière du médecin-chrétien ne serait alors pas forcément aux antipodes de celle du croque-mort. En tout état de cause, l’argent coule à flots dans le secteur de la santé publique. Et le péculat avec, tel un cancer congénital de l’administration publique r-dcongolaise. Des millions de dollars ont été détournés l’an dernier dans la santé publique, a déploré le ministre du Budget, Michel Bongongo. Mais ses accusations n’ont pas à ce jour été suivies des poursuites judiciaires. Par contre, médecins et infirmiers r-dcongolais comptent parmi les plus plaintifs et revendicatifs de tous les corps professionnels de la RDC. Pas un quadrimestre de suite sans que le Syndicat national des médecins (Synamed) ne donne de la voix sur une éventuelle augmentation de la prime de risque, ou de l’inscription sur les listings de paie des jeunes médecins ou encore des véhicules. Depuis le 1er janvier 2016, quelque 2.500 agents sont éligibles à la paie dans le secteur de la santé publique, portant ainsi les effectifs des emplois rémunérés à 46.267 personnes.
Des millions des partenaires dilapidés.
Cependant les plaidoyers pour la prise en charge des victimes de telle ou telle maladie sont plutôt rarissimes à moins qu’ils soient politiquement ou financièrement motivés…comme au désormais célèbre hôpital de Panzi, dans le Sud-Kivu. Et pourtant, en RDC, le paludisme arrache sans relâche des vies humaines dans les zones urbaines faute des soins adéquats. Voilà sans doute pourquoi l’Espagne s’est engagée à financer la lutte contre le paludisme (malaria), courant 2016, pour 7 ,7 milliards de FC soit 8,2 millions de dollars. La France a déjà mis à la disposition de la RDC un financement de 715 millions d’euros sur la période 2015-2017 pour lutter contre la tuberculose et le paludisme. L’aide publique de la France profite notamment à l’hôpital de Monkole, propriété, a-t-on appris, de l’ancien ministre de la Santé publique, Mashako Mamba. Mais il demeure que l’accès des soins dans cet hôpital est fort onéreux. Et c’est loin d’être un cas isolé. Voilà qui explique la tendance à l’automédication sinon au recours aux fameux tradi-praticiens…diététiciens chinois et autres guérisseurs ouest-africains docteurs autoproclamés.
POLD LEVI K.M. MAWEJA