A partir de son bureau de la Cité de l’UA, Félix-Antoine Tshisekedi a pris part par visio-conférence, mardi 29 mars 2022, au 19ème sommet des chefs d’Etat de l’organisation sous régionale. En tant que membre à part entière, cette fois, étant donné que ces assises étaient consacrées à l’admission officielle de la RDC, très attendue par les 6 premiers membres de l’organisation née en 2000.
La RDC a ainsi rejoint le Burundi, le Kenya, l’Ouganda, le Rwanda, le Soudan du Sud et la Tanzanie dans l’espoir de profiter d’échanges commerciaux dans un marché commun et une communauté douanière forts de quelques 280 millions de consommateurs. Ses richesses minières y sont très attendues, de même que les Etats de cette communauté lorgnent avec avidité sur ses 90 millions de consommateurs pour multiplier leurs exportations de produits finis et agricoles.
Le jeu en valait la chandelle et Uhuru Kenyatta, le chef de l’Etat Kenyan qui assure la présidence tournante de la CAE, a mis les bouchées doubles pour accélérer l’adhésion de ce pays continent qu’est la RDC. Notamment, en impulsant la modification du protocole du marché commun de l’organisation. Au principe de l’Union douanière adopté en 2005, et du marché commun adoubé 4 ans plus tard, en 2009, ont été ajoutés le principe du renforcement des liens commerciaux entre les membres de la CAE afin de mettre sur pied un marché commun pleinement fonctionnel en raison de l’énorme marché de consommation que représente le nouvel adhérent.
Elargissement du marché
L’entrée de la RDC devrait ainsi renforcer les liens commerciaux et élargir le marché des biens et services au sein de la communauté, espère-t-on aussi bien à Kigali, à Bujumbura, à Nairobi qu’à Kampala et Arusha.
D’où l’enthousiasme observé mardi dernier au cours du sommet des chefs d’Etat de la CEA, qui n’ont eu que des mots heureux à l’intention du nouvel adhérent. Président en exercice de l’organisation sous régionale, le Kenyan Uhuru Kenyatta a déclaré que la date du 29 mars 2022 est «un jour historique dans l’histoire de la CAE puisque nous admettons la RDC. L’admission de la RDC est historique, non seulement pour nos pays mais aussi pour notre continent dans son ensemble. Elle permettra à la communauté de réaliser le développement indispensable basé sur les économies d’échelle».
Alors que l’Ougandais Yoweri Museveni indiquait que «pour les personnes qui recherchent la prospérité, il s’agit d’un enjeu très important. Nous souhaitons la bienvenue à la RDC dans la CAE. Nous devons maintenant travailler à la paix dans l’est du Congo, car cette région connaît des problèmes depuis un certain temps». Ce n’étaient pas des paroles en l’air, les troupes ougandaises étant intervenues aux côtés des FARDC, le même mardi 29 mars à Bunagana, pour stopper l’avance des rebelles du M23 dans cette localité frontalière entre les deux pays, où d’importants travaux routiers communs sont en cours.
Enthousiasme des pairs
Egalement présent à ce sommet, le Rwandais Paul Kagame a, lui aussi, souhaité la bienvenue à son voisin congolais en exhortant « toutes les institutions de la CAE à accélérer les processus d’admission conformément au Traité et à nos règles ». Pour sa part, la Tanzanienne Samia Suluhu Hassan a dit espérer que « la RDC ratifiera l’admission à temps pour permettre à la communauté de bénéficier de l’intégration ».
Aussitôt l’admission de son pays validé, Félix-Antoine Tshisekedi a proposé la création d’un nouvel organe qui se penchera sur l’environnement, les ressources naturelles, les mines, l’énergie et dont le siège pourrait être installé à Kinshasa. Car, selon des données révélées par des médias, les membres de la CAE ont exporté vers la RDC quelques 941 millions USD de marchandises, rien que pour l’année 2019, contre des importations plafonnées à 5 % de la valeur de ces exportations. Les attentes sont donc énormes au sein de la communauté qui pourrait engranger 240 millions USD supplémentaires par an en volume d’exportation, dont le Rwanda et l’Ouganda seraient les principaux bénéficiaires, selon les mêmes sources. A ce jour, les pays de la communauté exportent des aliments transformés, des produits sidérurgiques et pétroliers, du ciment …En s’organisant en hub d’assemblage des produits de haute technologie comme des machines, du matériel électrique et des véhicules, la communauté pourrait devenir une plaque tournante des exportations, estiment des économistes.
Implications sécuritaires
Pour la RDC et son président, l’adhésion à la CEA comporte des implications sécuritaires non négligeables, parce qu’il n’y a pas de prospérité commerciale sans le rétablissement de la paix. Kinshasa entend donc profiter pleinement du concoursdes pays membres de l’organisation dans ses efforts de pacification des territoires de l’Est qui leur sont frontalières. A l’instar de Kampala qui, depuis fin novembre 2021, s’est engagée dans une opération conjointe de traque des rebelles ADF au Nord-Kivu et en Ituri. Pour protéger le projet de construction de 223 km de routes en cours de réalisation en RDC. Les opportunités commerciales ne peuvent être pleinement exploitées si certaines parties de l’Est de la RDC demeurent en proie à l’insécurité, estime-t-on à Kampala.
D’autres Etats de la communauté, à l’instar de la Tanzanie qui a déjà eu l’occasion de donner un coup de pouce aux efforts de rétablissement de la paix à l’Est de la RDC dans le cadre de la brigade spéciale de l’ONU, devrait pouvoir suivre l’exemple de Kampala, espère le successeur de Joseph Kabila. Le président Tshisekedi s’est juré de rétablir la paix et l’autorité de l’Etat sur toute l’étendue de la RDC, particulièrement dans les territoires de l’Est, rappelle-t-on.
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