Surprise, mercredi dans la soirée, dans le dossier judiciaire ouvert à grand renfort de publicité contre le sénateur et ancien 1er ministre, Augustin Matata Ponyo. Interpellé par le procureur général près la Cour constitutionnelle puis assigné à résidence dans le cadre du dossier relatif à l’indemnisation d’hommes d’affaires étrangers préjudiciés par la zaïrianisation mobutienne des années ’73, «l’homme de la bonne gouvernance» a recouvert sa liberté moins de 24 heures après, selon des sources médiatiques à Kinshasa. Me Laurent Onyemba, un de ses avocats, a assuré à la presse que le parquet près la Cour constitutionnelle a décidé de la main levée de la résidence surveillée qui lui était infligée la veille. Sur ce dossier qui a entraîné l’ancien 1er ministre dans les couloirs de la plus haute instance judiciaire du pays, ces partisans, qui se recrutent essentiellement dans les rangs du Front Commun pour le Congo (FCC) de l’ancien président Joseph Kabila, le criaient pourtant sur tous les toits : ce dossier, diligenté sous les auspices des institutions de Brettons Woods pour permettre à la RDC d’accéder au statut de Pays Pauvre Très Endetté (PPTE), semblait scandaleusement mal ficelé par l’accusation. L’évolution de l’instruction lancée tambour battant lundi 12 juillet 2021 semble leur donner raison. Pour quelques temps encore.
L’attrait de Matata en justice en est ainsi à son second rebondissement, qui traduit toute la difficulté de la tâche des instances judiciaires nationales. Mi-juin 2021, Jean-Paul Mukoko Nkokesha, procureur général près la Cour constitutionnelle, sollicitait par un réquisitoire adressé au Sénat la levée des immunités parlementaires du sénateur dans le cadre de la gestion, plutôt calamiteuse, du projet du Parc Agro-industriel de Bukanga-Lonzo. L’officier du ministère public s’est heurté au refus des sénateurs qui se sont opposés par un vote de 51 voix contre 45.
Dossier zaïrianisation
Bis repetita le 5 juillet dernier, l’organe de la loi sollicitant cette fois une autorisation aux fins d’instruction du même sénateur Matata dans le cadre de l’indemnisation des victimes de la zaïrianisation à l’époque où il assumait les charges de ministre des Finances. En l’absence des sénateurs en vacances parlementaires, le bureau de la chambre haute dirigé par Modeste Bahati Lukwebo avait décidé d’accéder à la demande du procureur général : «Nous avons donné au sénateur Matata l’occasion d’aller présenter ses moyens de défense», s’était quasiment défendu Bahati que l’opinion a accusé d’avoir lâché un collègue.
La polémique née de cette décision n’a rien changé à l’évolution du dossier, des professeurs de droit comme Jacques Djoli (pourtant membre de l’Union Sacrée de la Nation) estimant que le bureau était allé au-delà de la demande de la justice qui se limitait à une simple autorisation de poursuite à l’encontre de Matata aux fins d’instruction. D’aucuns dans le camp de l’ancien 1er ministre ont crié à l’acharnement, mais rien n’y a fait. Invité par le procureur général près la Cour constitutionnelle lundi dernier après avoir été débouté par la Cour de cassation suite à sa requête en annulation de la décision du bureau du sénat, le bâtisseur de Kindu (Maniema) a carrément été placé sous mandat d’arrêt.
Mercredi 14 juillet 2021, Matata Ponyo a de nouveau été auditionné par la Cour constitutionnelle, cette fois sur le dossier Bukanga-Lonzo, selon des sources judiciaires citées par la presse. Le projet stoppé en 2018 en raison de l’hémorragie financière qu’il entraînait a englouti 285 millions USD. L’IGF estime que 205 millions USD ont été détournés sous la responsabilité de l’ancien premier ministre.
LE MAXIMUM