Le 17 mai 2021 à Paris, le président rwandais Paul Kagame a nié l’existence des crimes commis par les troupes rwandaises (RDF) à l’Est de la RDC. C’était lors d’un entretien accordé aux médias français RFI et France 24. Le n° 1 rwandais a également contesté les conclusions du Rapport mapping des Nations-Unies sur les crimes commis en RDC.
Ses propos ont provoqué une levée de boucliers dans l’opinion publique congolaise malgré gêné du gouvernement.
On déplore à Kinshasa cette énième tentative négationniste de Kigali dans la déstabilisation de la partie orientale de la RDC au cours de ces dernières années.
On rappelle cependant que du 5 au 10 juin 2000, les armées rwandaise et ougandaise se disputant le fruit de leur pillage, se sont affrontées à Kisangani, sur le sol de la RDC, tuant plus d’un millier de Congolais et détruisant plusieurs biens mobiliers et immobiliers.
Ces faits, indéniables, sont gravés dans la mémoire collective congolaise. Et les victimes de ce qu’on appelle communément la «guerre de six jours» et leurs familles continuent jusqu’à présent d’exiger justice et réparation.
En 2005, la Cour internationale de justice (CIJ) de La Haye avait d’ailleurs reconnu la responsabilité de Kampala dans les exactions commises par leurs troupes dans la partie Nord-Est de la RDC, mais ne s’était pas prononcée sur le cas du Rwanda, Kigali ne reconnaissant pas sa compétence.
Aujourd’hui, les propos de Paul Kagame ne changent rien à tous ces faits suffisamment documentés ni à la détermination des victimes d’obtenir un jour justice et réparation.
Ils marquent au contraire un recul par rapport aux avancées des échanges sous-régionaux, notamment dans le cadre des mécanismes de suivi de l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la RDC et la région, dit Accord d’Addis-Abeba.
La tentative qui consiste à minimiser ou à balayer du revers de la main les massacres ignobles perpétrés par les forces armées rwandaises en RDC ou leurs supplétifs locaux, ne sert ni la paix, ni la sécurité et encore moins la coopération régionale.
Elle ne saura non plus faire disparaître ces crimes dont la société civile ainsi que le gouvernement congolais par leurs livres blancs successifs et les instances internationales, à l’instar de l’ONU par leurs rapports ont porté à la connaissance du monde.
Kasika, Makobola, Tingi-Tingi, Mbandaka, Kisangani, autant d’espaces où ont été perpétrés des massacres attribués aux RDF sur le sol congolais.
Ce ne sont que quelques exemples du lourd tribut payé par la population congolaise pour avoir accepté d’acceuillir des réfugiés rwandais.
Les cicatrices restent indélébiles à cet égard dans la chair et la mémoire des hommes et des femmes de ce pays et ce ne sont pas les déclarations à l’emporte-pièce de Kagame qui les guérriront.
Les morts congolais méritent respect. Les femmes violées aussi. Il en est de même des familles endeuillées, des enfants traumatisés et des communautés désarticulées par la violence inouïe des agresseurs.
Pire, cracher sur le docteur Denis Mukwege qui ne s’est jamais lassé de panser les plaies de la plupart des femmes victimes de cette violence est une véritable forfaiture.
Depuis plus de vingt ans, des morts congolais s’accumulent à l’Est et se comptent par millions. Il est temps que le gouvernement et la communauté internationale cessent de faire la sourde oreille et réagissent à la hauteur de cet hécatombe inédit.
Le président Paul Kagame doit cesser de mépriser nos morts et nos souffrances. Sa posture laisse transparaître en réalité une peur panique de se voir un jour obligé de rendre des comptes quant à ce.
Tous les Congolais doivent se mobiliser pour dire non à ce négationnisme aussi arrogant qu’ignoble. Tous doivent se lever comme un seul homme pour se battre afin que justice soit faite aux victimes car c’est une cause nationale.
L’indignation et la colère exprimées avec force par les Congolaises et les Congolais aux quatre coins du pays sont légitimes. Elles marquent une nouvelle page dans la prise de conscience de necessité de lutter contre la falsification de l’histoire et sa réécriture au gré des intérêts de certains criminels qui se sont installés dans le confort du profit de nos malheurs et des razzias de nos ressources économiques.
Les faits sont têtus. Tôt ou tard, les responsables des crimes et massacres des Congolais répondront de leurs actes.
Le Congo n’oubliera pas le sang de ses fils et de ses filles qui continue à crier vengeance.
Nos morts sont présents en nous et alimentent chaque jour notre soif de justice et de vérité.
AS