Les premières réactions ont commencé à affluer dimanche soir après le discours du président de la République Félix Tshisekedi. Parmi les mesures annoncées lors de son adresse à la nation, le chef de l’État a annoncé la nomination d’un informateur pour identifier une nouvelle majorité au sein de l’Assemblée nationale car selon lui, la majorité actuelle CACH-FCC s’est «effritée».
Une initiative commentée diversement au sein de la classe politique rd congolaise. Si les partisans du CACH et certains de Lamuka qui rongeaient leur frein dans l’opposition depuis deux ans ont applaudi bruyamment ce bouleversement qui leur ouvre la voie vers un pouvoir plus étendu pour les uns et la participation au gouvernement pour les autres, il en va tout autrement au sein du clan kabiliste où le brutal renversement de table par le leader de l’UDPS passe plutôt mal.
Intervenant en direct sur Top Congo Fm au cours du débat qui a suivi le discours présidentiel, le député national ALLIANCE CCU/FCC Lambert Mende Omalanga n’y est pas allé par le dos de la cuillère pour exprimer les réserves de sa famille politique vis-à-vis des mesures annoncées par le n°1 congolais. Selon l’ancien porte-parole du gouvernement sous Joseph Kabila, en nommant un informateur sans que le 1er ministre n’ait démissionné, volontairement ou à la suite d’une censure de l’Assemblée nationale, Félix Tshisekedi commettrait une violation de la constitution.
A l’opposé du député provincial kinois UDPS/ CACH Peter Kazadi qui a défendu la légitimité et la légalité des dispositions annoncées par le président, Mende a rappelé l’article 78 de la constitution en vertu duquel «le président de la République nomme le premier ministre au sein de la majorité parlementaire après consultation de celle-ci», en précisant que c’est à l’alinéa 2 qu’il est prévu qu’il puisse confier une mission d’information à une personnalité en vue d’identifier une coalition mais seulement «si une telle majorité n’existe pas».
Auparavant, Me Willy Wenga, avocat au barreau de Kinshasa, tout en questionnant le fait pour le président de désigner un informateur alors que le 1er ministre était toujours en fonction avait indiqué qu’il serait «de bonne politique que le 1er ministre facilite les choses au chef de l’Etat en lui remettant sa démission pour rendre vacant son poste et permettre la désignation de l’informateur annoncé». Problème : il a passé sous silence le fait que le 1er ministre, issu de la majorité FCC au parlement avait toujours la confiance de cette dernière. C’est ce que Lambert Mende a indiqué en brandissant comme preuve «l’approbation à une très confortable majorité du budget 2021 présenté la semaine dernière à la chambre basse par le premier ministre Ilunga Ilunkamba et son gouvernement».
Pour Mende, il est difficile d’imaginer que la majorité parlementaire qui se constate une seule fois pour toute la législature au terme de l’article 54, 7° du réglement intérieur de l’Assemblée nationale puisse ainsi basculer en pleine législature sans que des élections anticipées n’aient eu lieu. L’élu de Lodja a en outre mis l’accent sur les attaques contre le FCC par des boutefeux du CACH qui n’hésiteraient pas à user de violence et de corruption à cette fin, à contrecourant de l’engagement pris solennellement par Félix Tshisekedi lui-même de lutter sans relâche contre ces antivaleurs aussi bien dans son programme de campagne que lors de son message à la nation.
L’adresse du président Tshisekedi est intervenue alors qu’au parlement, un groupe de députés, emmenés par l’UDPS Jean-Marc Kabund réclame la déchéance de Jeannine Mabunda ainsi que l’ensemble de son bureau. Le FCC qui fait bloc derrière celle-ci et lui a réitéré son soutien. Dimanche, environ 312 députés pro Kabila ont en effet signé une pétition dans ce sens.
On a appris également que Jean Nguvulu, un fonctionnaire qui assume les fonctions de secrétaire général chargé des services administratifs de l’Assemblée nationale a été enlevé chez lui samedi en fin d’après-midi par les pétitionnaires anti-Mabunda et séquestré par des agents des renseignements généraux dans une chambre de l’hôtel Béatrice de Kinshasa-Gombe pour le contraindre à réceptionner dès le week-end les pétitions afin de «désactiver» aussi rapidement que possible le bureau de Jeanine Mabunda. Le député Boniface Balamage N’kolo, 2ème vice-président de l’Assemblée nationale qui a confirmé les faits a sommé les services relevant de l’Etat à conserver leur neutralité dans ces bisbilles politiques «en laissant le parlement fonctionner conformément à son propre règlement intérieur».
J.N.